Photo : S. Zoheir Par Faouzia Ababsa Pourquoi nos PME et PMI ne sont-elles pas performantes ? Pourquoi se limitent-elles au giron familial ? Pourquoi ne présentent-elles aucune contrepartie aux multiples avantages fiscaux et de soutien dont elles ont bénéficié de la part des différents dispositifs ? Autant de questions qui ont été débattues hier au centre de presse d'El Moudjahid, dont le forum avait pour thème la performance des PME. Un thème récurrent, à la limite du rébarbatif pour certains observateurs de la scène économique nationale. Mais qui a toutefois le mérite de mettre à nu les insuffisances, les «fourberies», l'incapacité des uns et les dysfonctionnements ainsi que la bureaucratie des autres. En effet, et même les opérateurs économiques le reconnaissent aisément, la pression fiscale dans notre pays est la plus faible de l'ensemble du pourtour de la Méditerranée. La fiscalité a été allégée de près de 60% depuis une dizaine d'années. Cependant, les opérateurs continuent, contre vents et marées, de revendiquer plus d'exonération et de baisse, notamment des charges patronales. Mais point ou presque de créations d'emplois. En fait, comme l'a souligné à juste titre le commissaire aux comptes, Djamel Djerad, 90% des PME algériennes sont familiales, le but étant que les dividendes engrangés ne quittent pas le giron familial et ne contribuent pas au développement de l'économie. Il faut dire que M. Djerad n'a pas été tendre avec les petites entreprises, lui qui scrute les comptes de plusieurs d'entre elles en sa qualité d'expert-comptable et de commissaire aux comptes. Il a affirmé d'autre part que ces PME préfèrent le statut juridique des SARL au lieu des sociétés aux noms collectifs. Parce que, en cas de faillite ou de problèmes financiers, la saisie, si tant est qu'elle intervienne, se fait uniquement sur le capital des 100 000 DA, à l'inverse de la société par actions qui risque la confiscation des biens personnels des actionnaires. D'autre part, la plupart de ces SARL sont dans l'incapacité de publier leurs comptes sociaux et de les transmettre au Centre national du registre du commerce. Les raisons ? Elles sont liées au fait que le gérant de la SARL cumule plusieurs fonctions, dont celles de gestionnaire des stocks, de comptable, de démarcheur, d'acheteur. La majorité des patrons de ces PME refusent de procéder au recrutement de juristes qui puissent les conseiller ou encore d'experts comptables dont la mission justement est de tenir les comptes. Et pour cause ! Cela les pénalise, en ce sens que ce sont des charges financières supplémentaires. Les intervenants dans le forum d'El Moudjahid se sont accordés à dire que les avantages consentis aux PME par les différents dispositifs d'accompagnement des entreprises (ANDI, ANSEJ, FGAR…) ne sont pas contrôlés. C'est-à-dire qu'il n'y aucun suivi de la part de ces organismes pour savoir exactement si lesdits avantages ont été utilisés dans le développement de l'entreprise, la création de l'emploi. M. Djerad reviendra sur le sujet en affirmant que nombre de patrons de PME se sont enrichis d'une manière fulgurante, ostentatoire. Il estime que les avantages ne sont pas investis dans l'exploitation, mais plutôt dans l'achat de grosses voitures. Mieux, pour bénéficier de divers dispositifs, il y en a même qui se font louer leur propre villa ou domicile. Pour sa part, le responsable de la communication du FGAR (Fonds de garantie des crédits aux petites et moyennes entreprises) a souligné que les PME font dans la monopolisation de la gestion, la sous-capitalisation, en plus de la non-implication des promoteurs dans le projet. En plus clair, ils se présentent au Fonds avec un document dont ils sont incapables d'en définir le contour, encore moins fixer le montant du crédit qu'ils veulent solliciter. Ce n'est pas tout. Le FGAR, dont la mission est de faciliter l'accès aux financements bancaires à moyen terme pour supporter le démarrage et l'expansion des PME, est également associé au programme de mise à niveau financé par l'Union européenne. Beaucoup d'entreprises sollicitent ce dispositif, avec cette précision qu'elles le font alors qu'elles sont au bord de la faillite. Mme Haddad, vice-présidente de l'association des femmes chefs d'entreprises, a focalisé sont intervention sur la nécessité de l'élaboration d'études pour comprendre pourquoi certaines régions de l'est du pays voient des PME pousser comme des champignons (régions incubatrice par excellence), à l'inverse de l'ouest du pays. Elle a aussi estimé que les pouvoirs publics se devaient d'intégrer la création et le développement dans les programmes de développement des collectivités locales. «Il faut absolument que les wilayas et les APC se réapproprient le développement local». Le représentant des impôts a mis, lui, l'accent sur l'ensemble des mesures prises pas son administration en faveur des entreprises et annoncé que d'autres allaient intervenir dans la loi de finances complémentaire. Tous les intervenants se sont accordés sur l'obligation de résorber le chômage. C'est le défi de la réalisation de la stabilité macro-économique et sociale.