De notre correspondant à Annaba M. Rahmani Pour les villes de l'intérieur, les festivals se suivent et se ressemblent, concentrés pour la plupart dans la capitale. Ceux-ci s'y organisent, s'y passent et se terminent sans que ces localités y prêtent la moindre attention parce qu'elles ne se sentent pas concernées. Les populations qui y vivent en entendent fortuitement parler à la télévision ou à la radio en y prêtant une oreille distraite. Pourtant, cette Algérie du terroir avec son folklore et ses personnages hauts en couleur constitue la richesse culturelle de ce pays avec un patrimoine matériel et immatériel incommensurable. Cette Algérie, de la petite Andalousie de Tlemcen avec sa musique à l'Arc de triomphe de Caracalla dans l'antique Thevest, en faisant un crochet par les vertes prairies d'El Tarf et ses paysages féeriques, pour voyager dans les glorieux Aurès et finir au pied du majestueux Djurdjura est celle des humbles, de ces hommes et de ces femmes qui font ce pays. Pourtant, les manifestations culturelles choisissent invariablement la capitale pour s'y produire et concèdent rarement quelques incursions à l'intérieur, une sorte de flash l'espace d'une ou de deux journées pour dépayser le touriste-participant et le ramener vite fait dans les résidences luxueuses d'Alger la Blanche. A Annaba, les gens se sentent frustrés par cette façon de faire et estiment que c'est injuste que tout soit concentré sur la seule capitale. «Eh ! Nous existons, nous aussi. Nous sommes en Algérie, nous lance un vieux fonctionnaire, et c'est Annaba avec son histoire millénaire, «son» saint Augustin, ses grands artistes, ses paysages et ses plages. Ce n'est pas normal qu'elle soit ignorée de la sorte. C'est la quatrième ville d'Algérie. Nous voudrions avoir une partie de ces festivals chez nous pour faire connaître notre cité et la faire découvrir aux autres. Ici, nous apprécions beaucoup la culture et toutes les musiques sont les bienvenues! » Sur cette même question, un étudiant rencontré sur le cours de la Révolution, très au courant de la préparation du Festival panafricain nous confiera : «Je voudrais bien voir ici à Annaba ces grands artistes africains comme Youssou N'dour ou Mory Kanté avec cette musique toute africaine dont les notes renvoient à ce continent vierge aux espaces infinis. Cela redonnera à Annaba son africanité. Les voir se produire sur scène sera quelque chose d'unique pour le public annabi mélomane. J'espère que les responsables du festival n'oublieront pas la Coquette dans leur programme.» Le Panaf, qui se tiendra bien sûr (comme d'habitude) à Alger, verra la participation de 48 pays africains sur les 53 membres que compte l'Union africaine. Près de 2 500 artistes, musiciens, chanteurs, hommes de théâtre, de lettres, chorégraphes, peintres et troupes folkloriques participeront à cette manifestation continentale financée par l'Algérie. Mais cette fois, on a quelque peu dérogé à la règle en accordant une attention particulière aux autres villes et en leur concédant quelques spectacles qui viendront animer les soirées de ces cités et les faire «revivre» tout en leur donnant l'occasion de s'exprimer à leur tour. Ainsi, Annaba aura «sa part» de cette manifestation grandiose à l'échelle du continent noir. A la direction de la culture, on est très content d'annoncer qu'Annaba sera de la partie et organisera à son tour des spectacles avec de grands artistes qui se déplaceront expressément d'Alger pour animer les soirées de la Coquette. Pas moins de onze plateaux sont prévus pour accueillir 17 artistes qui viendront se produire au mois de juillet au grand bonheur du public annabi friand de ces manifestations culturelles en cette saison estivale qui voit la population d'Annaba doubler. Il y aura Hakim Salhi, Zahouania, Raïna Raï, Lotfi Double Kanon, Nadjim, cheb Akil, Dahmani, Kader japonais, Freeman, Laroussi, Chouyoukh, Denny Golsen, P. Dedey, Drice, Ziad et bien d'autres. A la direction de la culture, c'est le branle-bas de combat, on se prépare, on revoit le programme, on le peaufine et on inspecte les sites et les salles qui abriteront les spectacles. «Ce sera vraiment quelque chose. Cela donnera à Annaba une autre dimension et on viendra de partout pour assister aux différentes représentations qui s'y tiendront. Les habitants d'Annaba adorent sortir et profiter des spectacles, et du spectacle nous leur en donnerons et de qualité !» nous dit un fonctionnaire de la direction de la culture. Cette fois, on a «sorti» la culture et les spectacles de la capitale qui en avait le monopole, espérons que cette initiative sera suivie d'autres pour que tous puissent en profiter.