Entre 1969 et 2009, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts africains. Lorsque le premier festival a été accueilli par l'Algérie, cette dernière sortait sept ans plus tôt d'une guerre de libération nationale triomphale considérée comme l'une des plus illustres révolutions d'indépendance du XXe siècle. L'Algérie était alors la Mecque des révolutionnaires et le refuge naturel de tous les parias des régimes vassaux de l'Occident et du capitalisme en recul face à la déferlante des indépendances prometteuses et porteuses de rêves fous d'un monde plus juste, plus égalitaire et d'un ordre économique au service des intérêts des laissés-pour-compte des siècles de colonialisme et de pillage du tiers-monde. Le tiers-monde avait alors le vent en poupe et se présentait, à tort, comme une alternative à une réalité économique et sociale injuste où les disparités, aussi bien au niveau national qu'international, étaient insupportables. La guerre froide faisait rage entre les blocs Est et Ouest, le non-alignement se voulait aussi une force d'arbitrage portée par le vent révolutionnaire qui soufflait en Afrique, en Asie, en Amérique latine et dans une Europe qui tremblait face à un puissant mouvement de jeune qui avait commencé en France une année plus tôt et qui voulait porter «l'imagination au pouvoir». C'est dans ce contexte mondial que le 1er Festival panafricain s'était tenu dans une Algérie dont la jeunesse fougueuse voulait aller au-delà des tâches démocratiques bourgeoises, et inscrire résolument l'Algérie dans une trajectoire révolutionnaire faisant d'elle un rempart contre le capitalisme et l'impérialisme. Le 1er Panaf était donc l'expression de ce duel manifeste entre le Nord et le Sud, entre les aspirations des populations africaines à un affranchissement total des séquelles du colonialisme aussi bien économiques que socio-culturelles. Ainsi, les Africains s'étaient donné rendez-vous à Alger sur fond d'émancipation, alors que leurs instruments politiques et idéologiques pour y parvenir étaient aussi populistes que démagogiques et ce, au-delà de la sincérité de certains discours. Quarante ans plus tard, ce sont les mêmes défis qui motivent les Africains, lesquels se retrouvent à Alger, mais dotés d'une conscience plus aiguë de leur situation, d'une volonté plus affirmée pour changer leurs conditions et d'un réalisme certain incarné par l'Union africaine, le NEPAD et des institutions continentales qui s'imposent face aux velléités réfractaires de certains régimes nostalgiques du temps de la domination occidentale sur les destins des peuples africains et sur leurs richesses. Le deuxième Festival panafricain d'Alger se veut donc un confluent des cultures africaines authentiques qui expriment l'âme du berceau de l'humanité, ses souffrances, ses combats et ses rêves d'émancipation. D'Alger au Cap, de Lagos à Antananarivo, l'Afrique déploiera demain ses couleurs, sa diversité, ses différences et ses convergences dans les rues et places d'Alger, proclamée capitale de la culture africaine pendant 15 jours. Les fêtes de l'indépendance nationale et celle de la jeunesse seront, à cette occasion, célébrées par toute l'Afrique dans une communion continentale de couleurs et de sons authentiques. A. G.