Une fois la tempête passée, Bouguerra Soltani, président du Mouvement de la société pour la paix, MSP, tente de recoller les morceaux. Mieux, en ouvrant la session du conseil national de son parti, hier mardi à Boumerdès, l'ancien ministre d'Etat sans portefeuille s'est même permis une arrogance : «Le seul charisme qui tient est celui des institutions du parti.» Bien sûr que l'allusion ne souffre d'aucune ambiguïté, puisque pour la première fois depuis l'apparition de l'aile dissidente de Abdelmadjid Menasra, Soltani a mis des images sur les noms de ses détracteurs. «Celui qui persiste à quitter sa maison n'a pas besoin d'inventer des raisons.» Le chef du MSP a pratiquement les coudées franches et sait maintenant que toute tentative de conciliation est vouée à l'échec. Les choses ne peuvent pas en être autrement, puisque les dissidents ont choisi leur destinée. Mieux, en créant un mouvement politique, ils ont signifié à leur chef que le retour au bercail relève plutôt de la chimère. Et Soltani a bien reçu le message. Dans un ultime baroud d'honneur, le président du MSP a démenti les informations selon lesquelles une bonne partie de la base militante aurait quitté le parti. Il a, dans le même discours, promis de démontrer que le taux de ceux qui ont quitté le parti «est inférieur à 3%» alors que les opposants parlent, eux, de 60%. Quelle différence !!! Malgré tout cela, Bouguerra Soltani laisse la porte ouverte à «ceux qui veulent revenir». Il ne s'agit pas, bien sûr, des personnalités en vue, mais des militants de base. Le leader islamiste n'a cependant pas abordé le départ effréné de certains députés. Une situation qui compromet jusqu'à l'existence du groupe parlementaire, tant la saignée est importante. Il faut dire que la crise vécue par le MSP depuis le dernier congrès de 2007 est tout de même difficile. Depuis la réélection de Soltani à la tête du parti, son rival du congrès, Abdelmadjid Menasra, considéré un moment comme un des «fils spirituels» du leader historique du Hamas, Mahfoud Nahnah, a mené plusieurs offensives pour l'en déloger. A commencer par des critiques publiques qui ont fini par atterrir sur le bureau de l'organisation des Frères musulmans, établie à Londres, qui avait tenté une conciliation durant l'été 2008. Peine perdue, malgré les multiples appels à la réconciliation. Et Abdelmadjid Menasra a fini par quitter le parti avec armes et bagages, en créant le «Mouvement pour la prédilection et le changement». Il est suivi par plusieurs cadres du MSP. Lors du discours de Boumerdès –le premier depuis le début de l'été- Menasra n'est pas le seul à être dans le collimateur du dirigeant islamiste. Le gouvernement n'est pas en reste, quitte à froisser encore une fois les partenaires de l'Alliance présidentielle. Rien n'est épargné par le cyclone Soltani. Ni le dernier Festival panafricain, ni les débats sur les codes communal et de wilaya, ni l'incident de Bab Ezzouar, encore moins la question de la représentation de la femme en politique n'ont été écartés. Et le comble, c'est que le discours de Soltani a une telle connotation idéologique que certaines phrases virent à la lassitude. Comme dans cette évocation du rôle des femmes en politique qui semble agacer l'homme. «Les droits politiques des femmes sont un ensemble. Et parler des compétences ou de quotas reste un discours incomplet si on ne l'intègre pas dans un processus global des droits de l'Homme aux premières loges desquels on trouve son droit au mariage et l'édification d'une famille, la protection de l'enfance et de la mère des fléaux du célibat et de ce qu'on appelle les mères célibataires…» dit-il, remettant en débat la question de la polygamie et du code de la famille dans son ensemble. S'il avoue que le système des quotas est «anti-démocratique», il dit «accepter le principe, pour le moment» tout en mettant en garde contre «le provisoire qui dure». Dans cette longue liste, où le maintien de l'Etat d'urgence est toujours présent, le chef du MSP n'oublie pas de s'attaquer à la persistance de l'utilisation de la langue française. Sauf que, dans cet océan de critiques, Soltani s'est tout de même trouvé une consolation : le vendredi est maintenu comme journée chômée. A. B.