La forte tension qui caractérise le marché des vivres en ce mois sacré de Ramadhan persiste. Il faut souligner que les marchandises existent en quantités suffisantes mais l'approvisionnement du marché se fait manifestement au compte-gouttes. Des informations rapportées par des confrères évoquent même le cas de stocks de produits agricoles avariés çà et là à cause de leur soustraction préméditée du circuit marchand. Comme d'habitude, ce sont les gros négociants et les spéculateurs de tous poils qui créent la pénurie pour se faire de substantielles plus-values sur des denrées de première nécessité. Les ménages crient évidemment au chantage et dénoncent la cherté de la vie. Les pouvoirs publics promettent en vain d'instaurer la discipline et prennent quelques initiatives afin de réguler le marché. Malgré une légère baisse enregistrée tardivement sur certains produits, les viandes, les sucreries, les fruits et légumes restent, en effet, bien au-dessus des moyens du simple salarié. Illustration : la mensualité d'un cadre moyen ne suffirait pas à assurer un Ramadhan «correct» pour une petite famille de quatre personnes. Cependant, l'ambiance religieuse et festive pousse irrésistiblement le consommateur à bien «garnir» la table du dîner quitte à s'endetter jusqu'au cou. Les budgets des familles sont manifestement mis à rude épreuve. Les petites économies fondent comme neige au soleil. Après les dépenses relatives aux vacances et celles pas encore finies du mois de Ramadhan, l'Aïd et la rentrée pédagogique pointent déjà le nez. Cela va sans dire que la fièvre s'est naturellement élargie au prêt-à-porter et aux fournitures scolaires. Les coûts se multiplient à tous les «stands». Les familles ayant déjà contracté des crédits bancaires pour l'habitat ou l'automobile se sont mises carrément au régime «sec». Nul n'est aujourd'hui à l'abri du souci pécuniaire. Toutes ses considérations risquent bien entendu de déteindre sur la rentrée sociale qui s'annonce morose. Visiblement conscients de ce climat chargé, le gouvernement, la centrale syndicale et le patronat remettent, d'un commun accord, la question de la politique salariale sur le tapis. La tripartite, prévue pour la fin de ce mois de septembre, planchera en priorité sur la question du SMNG (salaire minimum garanti) qui serait appelé à connaître une hausse significative. Avec les 12 000 dinars qui leur sont accordés actuellement, les smicards vivent à crédit. Les prix pratiqués actuellement sur le marché ne laisse absolument aucune chance aux petits revenus. Les trois principaux partenaires du monde du travail se promettent de répondre en urgence à cette insistante problématique pour garantir un salaire digne à tout travailleur algérien. L'Exécutif s'apprête, en outre, à lancer de nouveaux dispositifs réglementaires pour encourager l'emploi et la création de petites et moyennes entreprises. D'importants avantages fiscaux et de consistantes réductions des cotisations de la Sécurité sociale seront accordés aux entreprises qui ouvriraient de nouveaux postes d'emploi et celles qui «permaniseraient» des employés cumulant plus de six mois de travail. Ce sont là de louables mesures destinées à calmer un front social bouillonnant en sourdine. Mais la réponse à ce problème se trouve aussi en partie dans la lutte sans merci contre la spéculation et le commerce informel. Il ne sert à rien de réévaluer le SMNG si on laisse l'anarchie ambiante se saisir éternellement du marché. Le salaire de la dignité doit, bien évidemment, être protégé en freinant nette les ardeurs malsaines des smasria. K. A.