Photo : Riad Par Karima Mokrani Les assurances des pouvoirs publics de mettre en place les moyens nécessaires pour faire face aux risques de propagation du virus de la grippe porcine, en Algérie, sont loin de rassurer les citoyens. Beaucoup redoutent une progression rapide du virus à l'approche de l'automne mais aussi à cause de la rentrée scolaire et des départs en pèlerinage. Huit millions d'élèves sont attendus à cette rentrée et 36 000 personnes sont inscrites pour le hadj. L'association de Promotion de l'image pour l'éducation et la prévention (Primage) appelle au renforcement de la communication sociale, à propos de cette grippe, notamment en milieu scolaire. «Il faut donner régulièrement des informations sur ce nouveau phénomène qui menace la planète. Il faut, surtout, cibler les écoliers et leur transmettre des messages clés qu'ils transmettront à leur tour aux parents… Une population bien informée est une population qui gère mieux les situations de crise», soutient son président, Dr Djamel Eddine Oulmane. Notre interlocuteur insiste sur la prochaine rentrée scolaire et s'inquiète du fait que le ministère de l'Education nationale n'ait parlé d'aucun plan de prévention au profit de ces enfants. Du moins pour le moment. «Le ministère de l'Education nationale n'a donné aucune information sur les conditions d'accueil et de prise en charge de nos enfants dans les établissements scolaires. Nous n'avons entendu parler d'aucun plan spécifique de prévention contre la grippe porcine. On est, pourtant, à quelques jours seulement de la rentrée», fait-il remarquer. Et notre interlocuteur d'attirer l'attention sur un problème assez sérieux qui persiste dans de nombreuses écoles à travers le pays : le manque d'eau. «On dit aux enfants de se laver régulièrement les mains, alors qu'un grand nombre d'établissements éducatifs ne disposent pas d'eau. Il faut absolument résoudre ce problème au plus vite. Il faut mettre des citernes et javelliser l'eau.» Le Dr Oulmane évoque la décision gouvernementale d'autoriser le hadj 2009 et exprime son étonnement : «Aucune mission médicale ne pourra prendre en charge les hadjis en cas d'une contamination large de nos pèlerins.» En effet, souligne-t-il, les risques de contamination par le virus de la grippe porcine sont assez grands pour cette catégorie de personnes : «Les 36 000 pèlerins encourent tous le risque d'être contaminés du fait qu'ils seront, pendant tout un mois, en contact avec des personnes venues de pays différents, sérieusement touchés par le virus. De plus, les pèlerins des différentes nationalités vivront ensemble dans des conditions qui laissent à désirer [promiscuité…]». Le président de l'association Primage rappelle que plus de 800 cas, dont 16 décès, ont été enregistrés dans ce pays considéré comme un carrefour pour les pèlerins du monde entier. Rappelant que le pays dispose d'un stock important de Tamiflu pour la prise en charge des personnes atteintes, notre interlocuteur estime toutefois, que cela reste insuffisant en cas d'un afflux de malades. Il est d'autant plus inquiet que, selon le dernier rapport de l'OMS, 15% des personnes atteintes nécessitent une prise en charge assez lourde. «Est-ce que notre pays est prêt à faire face à ce genre de situation ?» demande-t-il. Non sans souligner que les établissements de santé algériens ne contiennent pas assez de lits pour les malades en soins intensifs. «Il faut attendre que des lits se vident…» dit-il sur un ton d'insatisfaction. Le Dr Oulmane insiste sur la communication sociale et la large sensibilisation des citoyens, notant à l'occasion qu'en comparaison d'autres pays, l'Algérie est plus ou moins prémunie à présent. Il appelle à la vigilance et à la prévention pour préserver les chances de notre pays de ne pas avoir une pandémie. Il reste, toutefois, convaincu qu'avec l'arrivée de l'automne, le nombre des cas va augmenter et de façon très rapide : «Il y a aura une progression rapide du virus avec l'arrivée de l'automne et de l'hiver. Les conditions climatiques et la baisse des chaleurs favorisent sa progression.» Le médecin rassure, toutefois, sur le fait que, malgré sa progression rapide, le virus de la grippe porcine est moins virulent que celui de la grippe aviaire : «Le virus de la grippe aviaire tue 50 fois plus que celui de la grippe porcine.» Le ministère de la Santé se mobilise Soulignons, à l'occasion, qu'un dispositif de contrôle de la grippe porcine est mis au niveau des ports et aéroports par les services du ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière. Ils ont installé des caméras thermiques et suivent les mouvements des voyageurs. Ces caméras sont opérationnelles depuis plus d'un mois et elles fonctionnent bien. C'est grâce à elles que des cas ont été repérés. Mais c'est grâce aussi au travail des équipes de médecins et d'infirmiers mobilisés sur place. Par ailleurs, a indiqué hier un responsable de ce département de la santé, une réunion du comité ad hoc chargé du suivi de cette maladie a eu lieu hier.Une réunion qui entre dans le cadre du plan national de préparation à la grippe A (H1N1) à l'approche de la rentrée scolaire et sociale. Les participants ont convenu de procéder à une mobilisation supplémentaire des moyens humains en cas de nécessité. Il est question également de renouveler les stocks en médicaments, d'intensifier les mesures en matière «d'information, d'éducation, de communication de manière à informer la population sur la situation épidémiologique, les mesures prises et les recommandations sanitaires».