De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Constantine serait–elle en passe de sacrifier sa djaouzia royale pour un substitut à base d'amandes ? A voir la prolifération de cette nouvelle gamme on serait en mesure de dire que la médina tolère désormais la variété dans ses mets friands au risque de trop épicer son riche menu acquis depuis la période ottomane. Toutefois, il s'avère que le qalbellouz ne détrônera pas la djaouzia encore moins la zlabya pour la simple raison que chaque consommateur opte pour ses caprices ramadhanesques. Et pour preuve, les étals se vident au quotidien de toute sorte de pâtisserie traditionnelle ou autre, car le Constantinois, à l'image des autres citoyens, devient un «acheteur» potentiel. Ainsi, «galbellouz l'algérois» s'est peu à peu ancré dans les traditions constantinoises au début de l'an 2000 à la faveur d'un groupe de commerçants algérois qui s'est installé dans la capitale de l'Est pour tenter l'expérience qui allait être payante. Au départ, ils avaient loué un local au niveau du boulevard Belouizdad et faisaient travailler quelques jeunes de la cité comme serveurs. Le chiffre d'affaires donnait du tournis à ces employés qui guettaient scrupuleusement la formule. Dès lors, le bouche-à-oreille, en plus des files d'attente interminables, aura ouvert l'appétit à certains chômeurs débrouillards de la ville. Depuis, chaque Ramadhan apporte son lot de néo-commerçants. Ils sont pratiquement implantés au boulevard Saint-Jean (Belouizdad). Pour eux, la formule est simple. Ils dénichent des mois à l'avance des locaux de «transit» auprès de quelques propriétaires, lesquels les louent à des prix faramineux. L'avenue verra la multiplication de cette nouvelle activité détrônant de peu le quartier populaire de «El Batha», fief de ce gâteau traditionnel à la constantinoise, vendu dans de petits plateaux ronds. En fait, qalbellouz s'est frayé un chemin, et les Constantinois se l'arrachent avant le f'tour et même dans la soirée. Cédé à 25 DA le morceau, il fait désormais partie de la palette sucrée des habitants. Pour faire recette, un vendeur a carrément ramené des spécialistes d'Alger pour lui concocter le vrai… et faire fortune. «Qalbellouz normal, qalbellouz spécial !!» Le prix de ce dernier est évidemment plus élevé, il varie entre 45 et 50 DA. La cité millénaire se transformera lors de la soirée en un véritable barbecue géant. Chaque rue dégage de la fumée. C'est une nouvelle mode gastronomique qui s'installe confortablement dans la cité et ce, devant l'absence des contrôleurs d'hygiène en «play off» à ces heures-ci. On aura tout vu à Constantine durant ce mois sacré du Ramadhan. La ville s'est transformée en un big bazar où toute activité commerciale serait permise. La rentrée scolaire a également vu des commerces de fournitures. Qu'est-ce qui arrêtera l'anarchie ? «Même les Chinois présents à Constantine vont verser dans la fabrication de qalbellouz», ironise un homme.