De notre correspondant à Paris Merzak Meneceur Alors que la controverse portant sur les propos jugés racistes tenus par le ministre de l'Intérieur, M. Brice Hortefeux, a continué d'alimenter l'actualité médiatico-politique française du week-end, le titulaire du portefeuille de l'immigration, M. Eric Besson, a ouvert dimanche dernier un deuxième «front» sensible concernant, celui-là, les candidats étrangers au regroupement familial. M. Besson a déclaré qu'il ne signerait pas le décret d'application de la loi du 20 novembre 2007 qui prévoit la mise en place de tests ADN afin de s'assurer de la filiation des enfants de la famille de l'immigré candidats au regroupement familial. Pour justifier sa décision, le ministre, transfuge du Parti socialiste qui a rejoint Sarkozy lors de la campagne présidentielle, s'est exprimé ainsi : «Je ne signerai pas ce décret d'application pour une raison simple. Je ne suis pas en mesure dans les délais impartis par la loi, 31 décembre 2009, de respecter l'esprit et la lettre de la loi […] Le législateur a émis tellement de contraintes que le décret d'application n'est pas possible en l'état.» Il a expliqué que les consulats français ne sont pas équipés pour relever des empreintes génétiques et que «la confidentialité absolue des données» ne pouvait être garantie si les tests s'effectuaient hors consulats. Il a donc avancé un argument technique, l'absence de moyens, pour, en quelque sorte, enfreindre la loi, ce qui est exceptionnel de la part d'un membre du gouvernement. Ces contraintes ont été imposées par le Sénat lors de l'adoption de la loi en 2007 dans un climat de tension et de division, y compris chez les parlementaires de la majorité présidentielle, et face à une forte opposition du mouvement de défense des droits de l'Homme et des immigrés. Brice Hortefeux, alors ministre de l'Immigration, n'a pu faire adopter son projet initial qui était plus restrictif quant aux conditions de la mise en œuvre des tests ADN. Son successeur a affiché une autre sensibilité dès sa prise de fonction en janvier dernier. Il a temporisé, gagné du temps en demandant une étude de faisabilité, puis une seconde. Il a finalement trouvé «la solution» pour que le décret d'application passe à la trappe, donnant satisfaction à tous ceux qui s'y opposaient pour des raisons éthiques et morales, comme en témoignent les premières réactions. Pour la Ligue des droits de l'Homme les tests ADN n'avaient «aucun sens». «C'était un clin d'œil à l'extrême droite, une machine à banaliser l'idéologie du Front national», a déclaré son président, M. Jean-Pierre Dubois. Les partis de gauche ont exprimé leur satisfaction alors que SOS-Racisme, comme d'autres associations, s'est félicité que «le détestable chapitre des tests ADN soit définitivement clos». Définitivement clos ? Certainement. Selon Le Monde, «pour que cette mesure ait une chance de voir le jour, il faudrait maintenant que le législateur reporte d'un ou deux ans le délai d'expérimentation». Le quotidien parisien du soir interroge : «Mais qui, du gouvernement ou des députés prendrait aujourd'hui le risque de relancer ce débat très polémique ?» Le gouvernement certainement pas puisque le Premier ministre, François Fillon, a apporté son soutien à la décision de Besson qui a agi avec l'accord de son supérieur. Pour les députés, la question se pose après la réaction du président du group UMP à l'Assemblée nationale. Ainsi, M. Jean-François Copé, qui tient de temps à autre à marquer sa différence avec le président Sarkozy, a déclaré que «[…] lorsque la loi est votée, les gouvernements ont l'obligation de mettre en œuvre les décrets d'application». Signe d'une future fronde d'une partie des députés ou réaction personnelle sans lendemain ? Il n'est pas exclu que le chef de l'Etat interviendrait pour ramener le calme et l'unité auprès des siens. Venant juste après «l'affaire» Hortefeux, une controverse sur les tests ADN au sein même de la majorité ferait un mauvais effet politique auprès des électeurs à quelques mois des élections régionales.