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Rouafid de Tanger ressuscite les «zendaniate» de Tétouan
Festival international du malouf de Constantine
Publié dans La Tribune le 05 - 10 - 2009


Photo : N. Hannachi
De notre correspondant à Constantine
Nasser Hannachi
C'est la musique savante arabo-andalouse qui a caractérisé la seconde soirée du Festival international du malouf organisé dans son fief, Constantine. L'ensemble marocain Rouafid de Tanger a scotché les spectateurs à leur siège pendant plus d'une heure, d'autant que la voix doucereuse de Zineb Afailal ajoutait un charme rarissime à cette formation «açlia» (originelle, ndlr) jusqu'à sa dernière note. En effet, le chef-d'œuvre andalou, véritablement authentique, que venait d'offrir l'ensemble sous la direction du musicien et musicologue cheikh Omar Metioui, «le porteur fidèle» des transcriptions de la musique arabo-andalouse, devrait servir de repère du moins en ce qui concerne la préservation des instruments, «âme et basic» de ce genre musical. «Attention au piano !» devait ironiser le maestro à l'adresse de la chanteuse locale Sorya à la sortie du TRC. «Si l'on excepte l'utilisation des violons qui sont tolérés pour jouer les modes, les autres instruments, à l'image de la guitare et du piano, sont déconseillés. C'est-à-dire les instruments musicaux tempérés ou fixes», explique M. Metioui. «Cela dénature l'exécution naturelle et fidèle des noubas.
De plus, les fioritures et autres trilles –répétitions rapides de notes liées- sont limitées. Heureusement que la percussion et la voix viennent remplir
ce rôle», poursuit-il Pour soutenir sa thèse, le maître certifiera que les instruments de sa troupe sont commandés en Espagne chez M. Carlos.
De surcroît, le cheikh conseille aux associations locales de préserver le luth arabe contre celui dit charqi (oriental), et prône surtout l'intégration du rabab dans l'orchestre.
Cela n'est évidemment qu'une recommandation, mais comment ne pas l'exprimer puisque le festival épouse un contexte culturel et pédagogique ?
A vrai dire, le genre marocain était présent avec son âme. Mieux, M. Metioui aura même taquiné l'école constantinoise en interprétant «son» Bashraf sika, lui ajoutant quelques passages métissés, mais sans brouillage musical. Après avoir ouvert la mesure avec une suite de «twishya», soit des pièces musicales rythmées donnant un aperçu sur le «tabaa» (mode), Rouafid exécutera un des mouvements de la nouba, Ras al dil, majestueusement chantée par Zineb.
En véritable symbiose avec les mélomanes nombreux présents au théâtre, la formation musicale attaquera sa deuxième partie du programme avec des «zendaniate», genre rythmé dont les auteurs sont algériens et marocains et qui a vu le jour à Tétouan. La soirée atteindra sa note sensible avec l'interprétation de Chemaa (la bougie), une qasida de cheikh Souiri, Ya Bint Bladi et particulièrement El Haraymiya (l'infidèle) de Chekara.
Cette chanson sera exécutée par Zineb en duo avec Nabil.
La chanson au texte lyrique et sensuel sera portée par de belles harmonisations du chef d'orchestre. Les applaudissements feront vibrer la salle au terme de cette dernière chanson.
Incontestablement, la troupe marocaine a hissé le niveau de cette rencontre dès lors que les ingrédients s'y prêtaient.
Il y avait de la voix, de l'authenticité et par-dessus tout du professionnalisme. «Gare à la déperdition du répertoire !
C'est pourquoi il faut que les associations constantinoises se délestent de leurs divergences pour communiquer en art.
La tolérance s'impose aux côtés d'un travail assidu qui leur permettra d'aller de l'avant», nous confiera M. Metioui à la fin de spectacle. Le maître dira par ailleurs qu'il ne s'oppose pas à la fusion souple du malouf pour,
expliquera-t-il, «être connu davantage à l'extérieur de son antre». Lauréat du dernier festival national ayant eu lieu en juin dernier, le jeune prodige Abas Righi, natif de Constantine, semble avoir mis un pas de disciple dans la cour des grands souvent réservée aux interprètes habituels. L'artiste aura franchi la barrière avec éloquence.
En se produisant sur scène en compagnie de sa troupe, dont le chef d'orchestre du groupe régional, Boukredera, il a surpris l'assistance par sa puissance vocale et sa maîtrise du luth arbi. Toujours à la recherche de la perfection, il lâchait modestement à la fin de son spectacle : «Il me manquait quelque chose.» Pourtant, aucun mélomane n'a relevé la moindre défaillance dans son exécution du Bashraf Kebir, mode «Zidane» qu'il a entonné, en dépit de quelques retours d'écoute nuisibles, liés à la sonorisation. Du reste, les férus du malouf ont vécu des moments agréables et l'ont applaudi pour avoir bercé leurs oreilles… par Alliya moudir errah, Manabda el kassa.
Ainsi, pour sa troisième participation à cette manifestation, Righi semble avoir pris de la maturité et notamment de l'expérience sur scène.
Il sera présent prochainement au Festival national du malouf programmé à Alger. Une éventuelle consécration le propulsera davantage, d'autant qu'il s'apprête à mettre dans le commerce son nouveau produit intitulé Layoum où il inclut le haouzi, le mahdjouz et le mouachah. Désormais, il faut compter ses mesures… avec Righi.


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