Deux hommes qui se rencontrent. En fait, ce sont deux artistes de renom, l'un est poète et dramaturge, l'autre est musicien. Deux talents qui se croisent pour créer une œuvre, un spectacle original mariant la lecture de textes aux notes de musique. Yann Apperry et Claude Barthélémy se sont produits au Centre culturel français d'Alger mardi dernier. Face à un public nombreux, les deux artistes rejoignent la scène faiblement éclairée. Assis sur deux chaises face à leurs pupitres, ils ont présenté leur nouveau show intitulé Bruit blanc. Mais pour cette soirée, ils ont opté pour la partie Blue Steel qui s'inscrit dans le sillage de leur création. Claude fait une intro improvisée alors que Yann commence à dérouler le fil de son histoire. L'histoire, qui a un air de déjà-vu, raconte un bout de la vie mouvementée de Barthélémy, un poète français accro de la musique blues. L'artiste rêve de changer de vie. Il part aux Etats-Unis, direction La Nouvelle-Orléans, le berceau du blues. Barthélemy prend le nom d'oncle Claude et se met en quête de son rêve : devenir un authentique bluesman. Mais entre le rêve et la réalité, il y a la vie qui ne lui fait pas de cadeau et lui fera même perdre la tête. Dans sa chambre d'hôtel, qui porte le numéro 13, il décide de mettre fin à ses jours. La corde au cou, un tabouret sous les pieds, il veut partir. Mais son geste fatal est interrompu par un suppôt du diable, «Stolymag», qui lui met entre les mains un marché : vendre son âme au diable contre un vrai talent de bluesman. Claude accepte. Mais il perdra au change et se perd. Sa fille se noiera dans une rivière… Dans sa demeure, en compagnie de sa femme Marguerite, il ne lâche pas sa guitare. Perdu dans ses idées farfelues, Claude n'a plus de souvenirs. Seules quelques réminiscences surnagent. Tel un possédé, il ne sait plus s'il est un authentique bluesman américain ou un poète français… Dans ce délire existentiel, son neveu Ben, un petit garçon taciturne qu'on prend pour un autiste. Mais en compagnie de son oncle, le petit Ben se révèle être un indigo. «J'ai une amie finlandaise qui m'a parlé de ce genre de personnes qui regardent les mots, leur donnent une couleur, ils ont une vision xtraordinaire, c'est ce qui m'a influencé pour Ben», déclare Yann Apperry.Le jeune Ben décide d'aider son oncle. Son seul espoir est de retrouver le suppôt de Satan pour rompre le contrat. Un long périple s'engage dans les différents Etats américains. Retour à la case départ. Yann s'exprime avec force et assurance. Un petit accent américain (il est franco-américain) plonge les spectateurs dans l'ambiance de l'histoire. Quant à Claude, qui se met aussi au chant avec sa voix rauque, il se déchaîne sur sa guitare enchaînant les riffs endiablés. Le show est bâti sur un concept d'échanges bien répartis. Les deux artistes se passent le relais. L'un parle, l'autre joue et vice-versa. Parfois, les voix des hommes se mêlent pour accompagner les délires d'oncle Claude. Le «concert littéraire» accroche l'auditoire par la force du verbe et la magie des notes, et cela grâce à la virtuosité du duo. W. S.