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La sécurité routière, une hydre à maîtriser
Code de la route, infrastructures routières, formation et sensibilisation
Publié dans La Tribune le 17 - 02 - 2010


Photo : S. Zoheir
Par Samir Azzoug
La sécurité routière demeure un volet complexe. Une bête à faces multiples. Pour faire avancer cette hydre, il faut que toutes les têtes soient orientées simultanément vers le même but et que la cadence se fasse au même rythme. Essentiellement, trois facteurs doivent être adaptés pour mettre un terme à l'hécatombe routière qui endeuille chaque jour près d'une dizaine de familles : Le code de la route, l'infrastructure routière et la formation, et son corollaire, la sensibilisation. Révision des paramètres, mise à niveau et adaptation à l'évolution des données économiques, démographiques, sociales et «comportementales» du pays.
S'agissant du premier volet, le législateur algérien a opté pour la politique de la «main lourde». A mesure que des réformes sont apportées au code de la route, les peines encourues par les contrevenants se font plus sévères.
Déjà en 2004, la loi n°16/04 du 10 novembre défrayait la chronique, puisqu'elle instaurait des peines et des amendes jugées très sévères par les automobilistes. Résultat : les accidents de la route avaient enregistré une légère baisse durant les deux années qui ont suivi la mise en application des nouvelles règles. Malheureusement, l'effet n'a pas duré longtemps.
En 2007, le carnage reprend de plus belle pour atteindre son apogée en 2009. Une moyenne de 12 morts et 182 blessés est enregistrée quotidiennement. Plus de 4 200 morts en 2009.
Pourquoi cette recrudescence ?
La question reste posée. Quant à la réponse, il faudra la chercher au niveau de l'application stricte des lois.
En matière de loi justement, une nouvelle réglementation en matière de sécurité routière est entrée en vigueur début février. Encore plus sévère, l'ordonnance n°09-03 du 22 juillet 2009 modifiant et complétant la loi n° 01-14 relative à l'organisation, la sécurité et la police de la circulation routière est carrément angoissante pour les usagers de la route.
En plus d'instituer le permis à points, le volet infractions, sanctions et procédures de l'ordonnance donne la chair de poule. Les contraventions sont classées en 4 degrés, dont les amendes varient de 2 000 à 6 000 DA selon la gravité. Dans les cas extrêmes (homicide involontaire), une peine de prison de 3 ans et une amende forfaitaire pouvant atteindre 150 000 DA sont également prévues.
Par ailleurs, en cas de constat d'une infraction, le permis de conduire est systématiquement confisqué jusqu'au règlement de la contravention. Le retrait du permis est également inclus dans la loi.
Le permis peut être retiré pendant une durée de 1 à 4 ans ou annulé en cas de récidive. Avant la mise en application du nouveau code de la route, les agents des services de sécurité abordaient les automobilistes pour leur expliquer les nouvelles règles. Dès la première semaine du mois de février, le nombre de policiers et de gendarmes visibles sur les routes semble avoir décuplé.
En tenue ou en civil, dans des barrages routiers ou à bord de véhicules banalisés, les forces de l'ordre ont repris du poil de la bête. Les radars routiers ont également pris place sur les autoroutes. Cela ressemble à un coup de force de l'ordre public.
Le résultat est d'ores et déjà perceptible pour celui qui a l'habitude de prendre la route. Les automobilistes de l'Algérois ont tendance à lever le pied sur l'accélérateur.
Quant la force de l'Etat est visible, les citoyens obtempèrent. Le constat est positif, d'autant que tous les bilans rendus publics par les services de sécurité et les différents organismes en charge de la sécurité routière indiquent que le facteur humain est la première cause des accidents (dans plus de 90% des cas).
Mais, comme signalé précédemment, la sécurité routière ne dépend pas uniquement du code de la route.
Le facteur répression est certes important et déterminant mais pas unique.
«Avant d'infliger des amendes de 2 000 DA aux piétons, il faut avant tout qu'il y ait des trottoirs dignes de ce nom, des passages protégés distincts et des feux tricolores qui fonctionnent», plaide un quadragénaire.
Un tour rapide à travers les artères de la capitale conforte sa plaidoirie. Les trottoirs sont squattés par des vendeurs à la sauvette, des véhicules mal garés, des bancs publics mal disposés, des pancartes qui gênent le passage, des travaux sans cesse engagés… ce qui oblige le citoyen à envahir la route. Quant aux passages pour piétons, s'ils ne sont pas complètement absents, ils sont pratiquement invisibles alors que les feux tricolores sont devenus un luxe qui ne fonctionne qu'au gré des «humeurs». Ce constat peut aisément être reconduit sur l'état des routes. Que ce soit au niveau de la qualité du bitume (quand il existe), de la signalisation, beaucoup de lacunes sont encore visibles. Des nids-de-poule aux ralentisseurs mal conçus en passant par le défaut d'éclairage, rien n'est épargné. Parfois, on peut même constater des situations hilarantes comme ces pancartes de signalisation qui n'ont aucun sens. Une limitation de vitesse à 30 km/h alors que la route hors agglomération est droite et sans danger visible. Deux plaques contradictoires, ou d'autres disposées d'une manière invraisemblable, impossibles à voir côté chauffeur.
L'environnement étant considéré, tout comme le facteur humain, comme un des éléments déterminants pour la sécurité routière, les concernés doivent prendre leurs responsabilités pour garantir les meilleures conditions aux usagers de la route.
Le troisième volet indispensable à la régulation de l'usager de la route se trouve être la sensibilisation et la formation. Un domaine où il reste beaucoup à faire. Le nouveau cahier des charges imposé aux propriétaires d'auto-écoles qui les oblige à dispenser plus d'heures de cours et d'apprentissage ne saurait être efficient si une véritable politique de gestion de ces «centres de formation» n'est pas mise en place.
La qualification des formateurs, les méthodes d'apprentissage… sont des données impératives pour une formation adéquate. Pour cela, il faut aussi leur assurer le minimum, comme des circuits conformes. Quant au volet sensibilisation, une attention particulière doit lui
être accordée.
Il faut savoir qu'un bon comportement au volant est tributaire de l'état d'esprit du chauffeur. Bannir le stress, la précipitation et l'énervement du conducteur est une condition sine qua non.
Le retard enregistré au niveau des infrastructures routières, 110 125 km de routes assurant 90% du volume des échanges pour un pays qui compte plus de 5 millions de véhicules et une superficie globale de près de 2,4 millions de km2 (11e classement mondial en termes de superficie), ajoutez à cela le nombre important de barrages routiers et autoroutiers (qui ont, certes, leur importance) entravent la fluidité de la circulation. Ce qui se traduit par une montée d'adrénaline chez le conducteur se répercutant sur sa manière de conduire.
Dans ce sens, l'Etat a certainement pris en charge ces considérations. D'ailleurs, l'université Abdelhamid Ben Badis de Mostaganem a pris en charge la conception et la mise en œuvre d'un système national de sécurité routière. Un outil qui a pour tâche de rassembler les données et d'élaborer une réglementation en fonction des constats réalisés sur le terrain. Notons enfin que les accidents de la route, en plus des vies humaines sacrifiées sur l'autel du bitume, coûtent près de 70 milliards de DA chaque année au Trésor public. Alors, levez le pied et épargnez vos vie et portefeuille. Ou alors, attendez le transport public.


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