Imaginons un étranger, ou même un groupe débarquant à Alger, Oran, Constantine ou Annaba et trouvant à l'aéroport ou dans l'hôtel où il descendra un dépliant qui lui suggérerait de «visiter les monuments et les quartiers historiques de la ville, où vous pourrez déguster des plats traditionnels dans de petits et sympathiques restaurants typés…» et tout le toutim, en langage touristique. Que ferait donc cet étranger ou ce groupe (la question ne se pose pas pour un touriste qui vient pour visiter) ? Même s'ils sont là pour «affaires», ils se débrouilleront pour trouver le moment de «visiter la ville», histoire de se délasser et d'oublier les tracasseries des contrats. Et que ferait ce visiteur une fois rentré chez lui ? Il ne peut que parler autour de lui, dans son entourage professionnel, sa famille, à ses ami(e)s, de la ville qu'il a découverte, suscitant ainsi chez eux l'envie d'en faire autant. Ne dit-on pas chez les professionnels du tourisme qu'«un touriste gagné, c'est dix de gagnés et un touriste perdu, c'est cent de perdus» ? Dès lors, une réaction en chaîne se déclenche pour faire, au final, de la ville une destination touristique…Il faut garder en tête que ce scénario positif est parti d'un postulat posé, imaginé. La réalité est tout autre. Nos villes ont, certes, des monuments, des bâtisses, voire des quartiers entiers, historiques qui pourraient devenir leur «carte d'identité culturelle et civilisationnelle», mais ces sites, ce patrimoine ne sont pas mis en valeur, ne sont pas exploités. Combien y a-t-il de responsables locaux qui pourraient se targuer d'avoir restauré une bâtisse ayant un cachet architectural spécifique, aménagé un quartier historique ou tout juste apposé une plaque identifiant un monument architectural, une place ou une rue emblématiques ? Pourtant, ils ont tout à y gagner, eainsi que leur ville.Reprenons le postulat de départ et imaginons une ville où les immeubles aux entrées et façades ouvragées, les squares avec leurs vasques et leurs naïades, les monuments et les quartiers historiques sont restaurés et mis en valeur. Une telle ville -qui n'existe pas dans la réalité, il va sans dire- ne peut que plaire aux visiteurs, étrangers et locaux, et aura même toute les chances de figurer sur les dépliants touristiques et les programmes d'étude des architectes, des historiens, des ethno-sociologues… De plus, l'aménagement urbain qui accorde l'importance et la place qu'il faut à la dimension culturelle, civilisationnelle et historique d'une ville ne peut qu'avoir un impact bénéfique sur les habitants. C'est tout bénéfice pour le statut de la ville, ses caisses -et celles du pays par conséquent-, ses habitants et pour la culture qui aura repris sa place et accompli l'une de ses missions sociales. H. G.