Photo : Riad Entretien réalisé par Algérie presse service APS : Monsieur le ministre, peut-on avoir un aperçu sur la pluviométrie enregistrée cette année et le taux de remplissage des barrages au niveau national ? Quel est aussi l'apport des dernières pluies qui se sont abattues sur l'ensemble du territoire national ? Abdelmalek Sellal : La question que vous poser me donne l'occasion d'insister sur des éléments qui me paraissent essentiels et que tous nos concitoyens doivent savoir. Dans notre pays, l'eau est rare et cela est désormais une constante avec laquelle nous devons nous adapter. L'Etat, à travers une gestion rationnelle des ressources naturelles et une planification des investissements, veille justement à prémunir le pays de l'aléa climatique. Au secteur des Ressources en eau, ceci est notre tâche quotidienne et notre souci premier. Depuis quelques semaines, il a été enregistré une série de perturbations météorologiques spatialement bien réparties sur le territoire national. Ces phénomènes météorologiques successifs d'Ouest en Est ont généré des précipitations importantes sur la quasi-totalité des régions nord du pays. Cette pluviométrie conséquente a été à l'origine d'une reconstitution des réserves de l'ordre de 300 millions de m3 supplémentaires, nonobstant les prélèvements opérés pour la satisfaction des besoins en eau potable (93 millions de m3) et en eau d'irrigation (14 millions de m3). Pendant les 5 dernières années, le taux global de remplissage des barrages en exploitation a progressé régulièrement pour se situer à 33,94 % au 31 janvier 2006, 40,21 % en 2007, 48,26 % en 2008, 60,84 % en 2009 et à 65,17 % en 2010, pour le même mois de référence. Il est à noter que le taux de remplissage des barrages est assez bien réparti d'Est en Ouest à travers le territoire national et que la capacité de stockage a aussi augmenté avec la réception de nouveaux barrages et la prochaine mise en service des barrages Bougous (El Tarf) et Safsaf (Tébessa). A l'heure actuelle, la réserve totale des ressources hydriques superficielles emmagasinées dans nos 63 barrages en exploitation avoisine les 4 milliards de m3, soit un taux de remplissage de 68 % en 2009, qui fût une bonne année. Ce même taux était de 64,57 %). Cette situation favorable (16 barrages sont remplis à 100%) laisse augurer d'une bonne année hydrologique et de conditions avantageuses en matière de couverture des différents besoins en eau (AEP et irrigation). Il ressort de ces différents éléments que si l'année hydrologique 2008-2009 a été une bonne année de reconstitution de la réserve, celle de 2009-2010 s'annonce comme une année de remplissage des barrages. Quels sont les grands projets en cours de réalisation dans le secteur des ressources en eau en matière de construction de barrages, des grands transferts d'eau ou de dessalement d'eau de mer? Quelles sont également les grandes actions inscrites pour le prochain quinquennat 2010-2015 ? Il serait ardu de lister dans cet entretien toutes les opérations en cours menées par le secteur et ses différents démembrements. C'est pourquoi je me contenterai de vous citer les plus importantes. Dans le domaine de la mobilisation et du transfert des ressources, il s'agit de la construction de 16 barrages à travers le territoire national pour une capacité supplémentaire de 1,8 milliard de m3, du grand projet d'AEP de Tamanrasset, à partir de la nappe de In Salah qui doit être réceptionné fin 2010, du système hydraulique Mostaganem-Arzew-Oran dont la livraison, en totalité, est prévue pour le mois d'avril 2010, sachant qu'il a été partiellement mis en service en juillet 2009, et du projet de transfert vers les hautes plaines sétifiennes avec la réalisation de trois barrages. Toujours en matière de mobilisation des ressources, l'action de l'Etat porte également sur un programme de dessalement d'eau de mer qui comprend la réalisation de 13 stations et de leurs aménagements en aval pour une production de 2,26 millions de m3/j. Ce projet, qui a été lancé, connaît un avancement effectif sur le terrain. Il y a aussi dans ce domaine, l'extension du système Beni Haroun par la réalisation de l'interconnexion des cinq barrages le composant, le transfert des eaux de la nappe de Chott El Gherbi vers les agglomérations de Tlemcen, Sidi Bel Abbès et Naâma et dont l'appel d'offres est en cours de lancement, l'alimentation en eau potable des wilayas des Hauts-Plateaux à partir du barrage de Koudiat Acerdoune, en cours, l'AEP des agglomérations du couloir Akbou-Béjaïa à partir du barrage de Tichy Haf, partiellement mis en service, et l'alimentation en eau potable des agglomérations de la wilaya de Jijel à partir du barrage de Kissir, en cours. En matière d'assainissement, plusieurs projets ont été engagés, notamment l'achèvement des systèmes d'assainissement et de lutte contre la remontée des eaux à Ouargla et El Oued, l'assainissement et la protection de la vallée du M'zab contre les inondations, la réalisation de 36 stations d'épuration et 40 lagunes ainsi que des travaux d'aménagement hydro-agricole sur 11 600 ha. Les différents composants du prochain programme quinquennal du secteur des ressources en eau devront contribuer à la consolidation des résultats obtenus par le secteur et asseoir dans notre pays une réelle gestion intégrée de l'eau dans ces différents usages domestique, agricole et industriel. Dans ce cadre, il est prévu notamment la réalisation de 19 nouveaux barrages et la surélévation de 4 autres pour atteindre une capacité de mobilisation de 9,1 milliards de m3, la réalisation de 6 grands projets de transferts et de 14 adductions d'eau potable, la réhabilitation des réseaux d'AEP pour 22 villes et des réseaux d'assainissement pour 12 villes, la construction de 44 stations d'épuration et 42 lagunes pour atteindre une capacité de traitement des eaux usées de l'ordre de 1,2 milliard de m3/an et les travaux d'aménagement hydro-agricole sur 60 000 ha et la réalisation de 174 retenues collinaires. En parallèle de ce programme de réalisation, le secteur entamera les chantiers stratégiques d'action suivants : les réserves régionales stratégiques de ressources en eau, le développement du potentiel d'irrigation au profit de l'agriculture, l'économie de l'eau, l'exploitation des systèmes hydrauliques complexes, la consolidation du déploiement national de l'Algérienne des eaux et de l'Office national de l'assainissements et l'étude de la production d'énergie électrique à partir des barrages. Une mise en demeure vient d'être adressée à la société chargée de la gestion de l'eau à Constantine. Peut-on avoir une évaluation de l'expérience de la gestion de l'eau confiée aux différentes entreprises étrangères ? De 2005 à 2007, la gestion des services publics de l'eau et de l'assainissement dans les villes d'Alger, d'Oran, de Annaba et de Constantine a été déléguée à des sociétés par actions (50% ADE et 50% ONA) dont le management a été confié à des opérateurs internationaux de renom sur la base de contrats à objectif incluant le transfert de savoir-faire. L'amélioration des indicateurs de performance techniques et commerciaux ainsi que du rendement en matière de qualité du service public est déjà constatée sur le terrain, principalement à Alger. En effet, 96 % de la population du Grand Alger sont aujourd'hui desservis en eau potable en H24 et le rendement des réseaux a nettement progressé. Le secteur demeure toutefois attentif au volet ressources humaines, surtout en ce qui concerne la capacité de nos sociétés à conserver leurs cadres ayant bénéficié d'un effort de formation soutenu et qui doit se poursuivre. La situation d'Oran, plus récente, est satisfaisante. Elle l'est moins à Constantine où la Société des eaux et de l'assainissement (SEACO) a connu quelques problèmes de démarrage qui ont été fermement pris en charge par la tutelle afin de garantir la réussite de ce contrat. A Annaba, si certains volets paraissent être pris en charge, des insuffisances ont été signalées et le partenaire va être aussi rappelé à l'ordre pour améliorer sa présence qualitative. En résumé, et à mi-parcours, les résultats de la démarche de délégation de gestion du service public de l'eau et de l'assainissement sont relativement acceptables. Cependant, on insiste beaucoup sur la formation et le transfert de savoir-faire car l'encadrement national devra nécessairement prendre en charge la gestion d'un service public qui devra être performant : c'est là notre principal objectif.