La Côte d'Ivoire peine à sortir de la crise née de la dissolution du gouvernement et de la commission électorale, n'ayant pour l'heure réussi à se doter que d'un cabinet de 17 ministres, en attendant l'entrée de 11 membres de l'opposition. La presse ivoirienne n'était pas tendre envers le gouvernement incomplet présenté mardi dernier, le jugeant «bancal», «amputé» ou «unijambiste». «Tout ça pour ça !» déplorait Nord-Sud, quotidien pourtant proche de l'ex-rébellion des Forces nouvelles (FN), dont le chef, Guillaume Soro, est Premier ministre depuis l'accord de paix de 2007. La rumeur avait un temps annoncé un gouvernement restreint de «technocrates», rajeuni et ouvert à la société civile. Si l'on compte trois nouveaux venus, le cabinet demeure conséquent (28 membres, contre 33 auparavant) et composé quasi exclusivement de politiques. Mais il pouvait difficilement en être autrement, les accords de paix prévoyant un gouvernement d'«union nationale» rassemblant les principales forces. La nouvelle équipe aura la lourde tâche de conduire enfin le pays à une élection présidentielle, sans cesse repoussée depuis la fin du mandat du président Laurent Gbagbo en 2005 et censée clore la crise née du putsch manqué de 2002, qui a coupé le pays en deux. Le scrutin est désormais remis à «fin avril-début mai», après le blocage de la commission électorale indépendante (CEI) depuis janvier et la double dissolution annoncée le 12 février par le chef de l'Etat. La crise qui a suivi a été marquée par des manifestations de l'opposition émaillées de violences et la mort d'au moins sept personnes lors de la répression des protestations. Les tractations pour la formation du nouveau gouvernement ont été difficiles. Et si l'équilibre annoncé reste «globalement stable» entre le camp présidentiel, les FN et l'opposition, le plus dur reste à faire : obtenir, d'ici au Conseil des ministres prévu aujourd'hui, l'entrée de cette dernière. Onze postes lui ont été promis. Dans l'entourage du Premier ministre, on indique que «les contacts doivent se poursuivre» avec l'opposition réunie au sein du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP), dirigé par l'ancien président Henri Konan Bédié et l'ex-Premier ministre Alassane Ouattara. Le RHDP fait valoir depuis des jours qu'il y va du respect de son exigence essentielle : obtenir le «rétablissement» de la CEI, cruciale pour la préparation du scrutin, avant de revenir aux affaires. Contrairement aux souhaits des partisans du président Gbagbo, qui voulaient une refonte de la CEI jusque-là dominée par leurs adversaires, la nouvelle commission doit garder la même «structure». Une autre bataille s'annonce cependant, puisque des postes doivent y être redistribués après la polémique sur une présumée «fraude» à la CEI. Un nouveau président et quatre nouveaux vice-présidents doivent être élus, alors que le RHDP détenait auparavant la présidence et deux vice-présidences. R. I.