«J'ai toujours souhaité qu'on discute avec franchise et profondeur les expériences passées, autant celles du FLN que celles du pays depuis l'indépendance. Des expériences relatives au système du pouvoir et de la gestion des affaires publiques […] Des congrès ont eu lieu depuis sans permettre l'expression d'une opinion différente, celle qui s'intéresse aux questions de fond», écrit l'ancien secrétaire général du Front de libération nationale (FLN), Abdelhamid Mehri, à l'adresse des participants au 9e congrès. Cette lettre, tenue ignorée par les organisateurs de ces assises, met le doigt sur une question fondamentale liée à ce que doit réellement être une gestion démocratique d'un parti politique. Son contenu, qui tranche considérablement avec la platitude et l'unanimisme qui ont prévalu durant les travaux de ce congrès, aurait mis mal à l'aise bien des militants si elle avait été rendue publique. C'est que son rédacteur sait de quoi il parle, lui qui avait été évincé de son poste au profit de Boualem Benhamouda, sans, précise-t-il dans sa lettre, qu'il n'ait jamais eu l'opportunité d'en expliquer les véritables enjeux et conséquences. La lettre de Mehri vient rappeler, si besoin est, le mode de fonctionnement légendaire du FLN, celui qui ne tient pas compte de l'avis contradictoire, du débat d'idées et qui s'est toujours complu dans un statisme qui profite néanmoins à ceux qui se servent de ce sigle historique pour des desseins exclusivement personnels. Tel un invité surprise qui sème le trouble dans l'esprit des hôtes, l'ancien patron du parti historique nous fait rappeler dans quelle mesure cette formation politique ne veut pas se départir des pratiques qui ont de tout temps accompagné son évolution et son refus de s'adapter aux nouveaux défis, aux revendications et aux préoccupations de la société. Cela, quand bien même les discours développés ces dernières années veulent nous persuader du contraire en insistant sur les exigences de renouvellement des rangs du FLN à travers un meilleur accès aux jeunes et de plus grandes chances pour la représentativité féminine. Dans le même temps, le FLN continue de s'enorgueillir de ses référents historiques et de vouloir s'approprier à lui seul la légitimité historique et la grandeur de la révolution de Novembre 54 au moment où celle-ci est le patrimoine et la fierté communes de tous les Algériens. Force est de relever que le déficit chronique en matière de gestion démocratique n'est pas le propre du FLN mais qu'il concerne, plus ou moins, l'ensemble de la classe politique, avec cette différence qu'à l'ex-parti unique, incombe une plus grande responsabilité en sa qualité de première force politique du pays et majoritairement représentatif du peuple au Parlement. La culture démocratique est absente de la vie de nos formations politiques mais pas seulement : elle l'est surtout à différents niveaux de la société algérienne. Une société qui se refuse toujours à admettre réellement le droit à la différence et à respecter l'autre. Simplement tel qu'il est. M. C.