Photo : S. Zoheir De notre correspondant à Béjaïa Kamel Amghar L'aspect extérieur, souvent répugnant, de nos villes n'incite pas à la quiétude et au bien-être. La médiocrité visible dans l'élaboration des plans d'occupation du sol, la qualité improbable de la production architecturale et la mauvaise exécution des travaux, voilà les trois principaux facteurs qui impriment dans le paysage citadin une espèce d'anarchie et de désolation. Quand on regarde n'importe quelle ville algérienne du ciel, on distingue nettement ce chaos urbain. Les tracés des quartiers et des cités n'obéissent à aucune règle géométrique. On ne discerne aucun alignement dans l'ouverture des voies de communication. On a l'impression que le développement de nos cités s'est fait dans la plus totale confusion, sans prospective ni vision futuriste. Aujourd'hui, on s'accorde à dire qu'il est extrêmement urgent d'améliorer la qualité du bâti afin d'offrir un cadre de vie agréable aux citoyens et une forme esthétique à nos villes et villages. Les pouvoirs publics, les urbanistes, les universitaires et les citoyens eux-mêmes sont d'accord sur ce point.Pour commencer, le gouvernement avait promulgué, il y a environ un an, trois décrets exécutifs portant sur l'achèvement des constructions et leur mise en conformité. Les propriétaires, les maîtres d'ouvrages et les intervenants habilités ont été «sommés» de finaliser tous les chantiers laissés en suspens. A cet effet, des commissions pluridisciplinaires ont été mises en place au niveau des daïras et des wilayas. Des groupes d'enquête et de suivi ont été constitués afin de traduire la chose sur le terrain. La collaboration étroite des APC a été aussi sollicitée pour assainir toutes les situations. Un ambitieux programme qui se décline comme un cadre à la réhabilitation intégrale de l'espace bâti à l'échelle nationale. Un an après, on en est quasiment au même point. Nul besoin d'aller consulter ces fameuses commissions, car rien n'a bougé. A Béjaïa, les quartiers les plus populeux comme Ighil Ouazzoug, Tizi ou Bir Slam affichent toujours les mêmes façades nues. La brique rouge impose sa couleur au décor hétéroclite environnant. Les cités surplombant le siège de la wilaya, à l'image de Houma Oubazine, de la cité Rabiaa ou de Mongin, donnent l'impression de s'être figées à l'état d'ateliers. Elles ressemblent davantage à des chantiers en voie d'achèvement. Les bâtiments de la vieille ville tombent en ruine. Ils nécessitent de profonds travaux de réhabilitation et de restauration. Les propriétaires, des particuliers pour l'essentiel, ne peuvent manifestement s'en charger seuls. Les prix des matériaux de construction, qui se sont carrément envolés ces dernières années, et le coût, tout aussi exorbitant, de la main-d'œuvre finissent immanquablement par dissuader les intéressés. Le même constat peut être fait et refait à travers toutes les localités de la wilaya. Le caractère «volontaire» de cette loi sur l'achèvement des constructions a eu également une incidence sur la faiblesse des suites pratiques qui lui ont été réservées.Il est vrai, cependant, que la finition des façades extérieures figure, depuis, comme une priorité dans la réception des nouveaux ensembles d'habitat collectif. Les logements sociaux locatifs et sociaux participatifs, à titre d'exemple, ne sont livrés qu'une fois tous les travaux achevés. On pourrait en dire autant du logement final où l'aide de l'Etat est conditionnée par l'accomplissement des travaux extérieurs. Toutes les maisons rurales récemment construites dans ce cadre-là affichent fière allure même si ce n'est pas nécessairement le cas à l'intérieur. En somme, on pourrait dire que l'exécution de cette loi n'a pas été à la hauteur des espoirs qui l'ont motivée au départ. Son caractère non contraignant, les difficultés budgétaires des ménages et la dilution de la responsabilité parmi les différents services chargés de son exécution sont autant de paramètres qu'il faudrait peut-être revoir pour lui donner toute sa force.