«La troupe s'attendait à recevoir le 1er prix mais, malheureusement, nous n'avons obtenu que le deuxième. Mais c'est déjà un exploit ! Cette pièce a été montée sans aucune subvention. Des comédiens ont vendu leurs téléphones cellulaires pour financer le spectacle. Nous avons travaillé dur, avec beaucoup de passion, mais, hélas, les autorités ne nous aident pas.» Ces révélations sont venues dans la bouche de Haroun Kilani, le metteur en scène de la pièce Un rêve sans récit de la troupe Masrah Laghouat qui vient de décrocher le deuxième prix du Festival national de théâtre de Sidi Bel Abbès. Une précision importante : Haroun Kilani en est à sa deuxième participation à ce festival. Autrement dit, les autorités locales, à leur tête la direction de la culture de la wilaya et l'Assemblée populaire communale (APC) de Laghouat, auraient pu miser sur lui, voire le considérer comme une valeur sûre pouvant représenter dignement la wilaya et, de ce fait, encourager cette troupe théâtrale et la soutenir par tous les moyens, dont ceux financiers. Que représente la production d'une pièce de théâtre dans le budget d'une direction de wilaya de la culture ou d'une APC ? Une broutille, surtout quand cette direction ou cette APC ne font rien de ce budget qui puisse animer la scène culturelle locale. Et c'est valable pour toutes les directions de la culture et les APC qui, bien qu'elles bénéficient de budgets et ont la mission de socialiser la culture en mettant à contribution toutes les potentialités locales, persistent dans cette gestion administrative de la culture. Or, on connaît le produit de cette gestion : une culture institutionnelle faite de commémoration, de dates historiques, d'hommages et de manifestations conjoncturelles, qui ne peuvent aucunement contribuer à la socialisation de la culture. Pourtant, comme nous l'avons déjà souligné, les directions de la culture, qui, faut-il le préciser, représentent le ministère de la Culture, ont toute latitude à utiliser, à bon escient, le budget qui leur a été alloué, même s'il est relativement modeste. Il s'agira donc d'établir un programme, une stratégie, pour établir les priorités. «Il faut s'astreindre à tracer des objectifs pour pouvoir délimiter et baliser le champ dans lequel la politique culturelle pourrait apporter des résultats probants à ses destinataires et ce, sans tomber dans des productions conjoncturelles», dira, fort à propos, le directeur de la culture de la wilaya de Constantine qui précisera qu'il s'agira aussi de cadrer le rôle de la direction pour qu'elle devienne un coordinateur entre toutes les compétences et acteurs actifs sur la scène culturelle locale. «Point d'exclusion, mais pas de culture pêle-mêle. Celui qui détient un projet littéraire fiable, artistique, théâtral ou autre, qu'il le présente à la direction pour élaborer un contrat programme», insistera-t-il. Idem pour les APC, censées avoir une commission, un conseil ou un office chargés de la culture. En fait, le tout n'est pas de disposer d'institutions ou d'infrastructures culturelles. Il faut d'abord disposer de responsables qui puissent faire preuve d'imagination, d'organisation et d'initiative. Faute de quoi, on peut créer de structures ou des infrastructures, mobiliser l'argent qu'on peut, sans que cela change quoi que ce soit à la culture, aux arts et aux aspirations des artistes, une situation loin d'être enviable. H. G.