De notre envoyé spécial à Chemini (Béjaïa) Salah Benreguia Consternation générale, incompréhension, incertitude et colère… L'assassinat, samedi dernier, de sept agents de sécurité à Tifra, dans la région de l'Akfadou, sonne le réveil des vieux démons dans la vallée de la Soummam. Après plusieurs années de lutte implacable contre les terroristes intégristes en tant que Patriotes, l'insolente Faucheuse a eu finalement raison d'eux en tant qu'agents de sécurité. Un destin qui nous rappelle la superbe expression d'Aït Menguellet dans la chanson le témoin de la nuit : «99 balles sans pour autant te toucher, la centième t'a emporté avec.» En effet, ces anciens Patriotes, travaillant actuellement pour la société privée de sécurité SPAS, assuraient la sécurité d'une entreprise turque activant dans cette zone où elle a obtenu un contrat avec Sonelgaz. Hier, jour de l'enterrement, l'ambiance était triste et lourde. Les détails de cet ignoble acte meurtrier reviennent sur toutes les lèvres. Dans les cafés, dans la rue, dans les lieux publics. Les supputations les plus fantaisistes n'ont pas cessé d'enflammer les discussions. Mais avec un dominateur commun : condamnation unanime et compassion envers les familles de ces «Patriotes martyrs». Tôt dans la matinée de ce lundi maussade, dans l'enceinte du cimetière du village, l'ambiance était aux derniers préparatifs de l'enterrement prévu après salat dohr. Le village de Sidi Yahia (marabout), sis à un 1 km du chef-lieu de la commune de Chemini, en perdant tragiquement ses trois anciens Patriotes (dont deux appartiennent à la même famille, Hadid Madjid et Hadid Mohamed), est devenu depuis samedi dernier la destination de tout le monde. Le parking du village était bondé de voitures, immatriculées dans plusieurs wilayas. Toutefois, l'atmosphère était lourde. L'enterrement a été marqué par la présence d'une foule très nombreuse. Environ 1 000 personnes ont tenu à faire un dernier hommage aux défunts. Côté officiel, en plus des autorités locales, des officiers du commandement de la Gendarmerie nationale de la wilaya de Béjaïa ainsi que le commandant du groupement de l'Armée nationale populaire (ANP) étaient présents. Les premières personnes sont arrivées dès 14 h. Vers 14h30, les ambulances transportant les dépouilles mortelles ont fait leur entrée. Des villageois ont hissé les cercueils sur leurs épaules avant de les porter d'un pas martial jusqu'à une tribune où sera prononcée l'oraison funèbre. Une foule nombreuse suit la procession conduite par les membres des familles des défunts. L'image est émouvante : des membres de la famille des trois victimes s'étaient agrippés au cercueil de leurs défunts. La rituelle prière du mort s'est déroulée à l'entrée du cimetière, exigu pour contenir une telle foule. Une haie d'honneur formée de policiers a salué solennellement les trois dépouilles de «Patriotes martyrs». L'émotion se lisait sur les visages. Les jeunes contenaient stoïquement leurs larmes. La famille et les proches des défunts ont assisté à l'inhumation, le regard embué. Ils ont reçu les ultimes marques de sympathie de la part de personnes compatissantes. Pour rappel, cette attaque est la plus meurtrière en Kabylie depuis fin octobre 2009 quand six agents de sécurité ont été assassinés à Tizi Ouzou.