Parler de violence est toujours un exercice difficile. A la sensibilité de la question s'ajoute sa complexité. Cette difficulté est d'autant plus vraie lorsqu'on situe le phénomène dans l'espace urbain. On en a assez parlé de ce fléau. Le constat est manifestement alarmant. Rapports conflictuels et disputes au sein de la famille, brutalités courantes et échange de vulgarités entre voisins de palier, affrontements entre bandes rivales et climat de terreur dans les stades de football, les manifestations de cette violence urbaine sont visibles partout. A l'école, à l'université, dans les transports en commun, au marché ou simplement dans la rue, on assiste souvent à des bagarres qui éclatent pour trois fois rien. Parfois, cela se transforme vite en bataille rangée entre deux quartiers distincts. Faute de prise en charge, cette «gangrène» se développe à une vitesse qui laisse pantois les services de sécurité, visiblement dépassés par l'ampleur de ces animosités ordinaires. Ces derniers temps, on assiste à des «soulèvements» où toute une cité se retrouve engagée dans des face-à-face inutiles. Rappelons à ce propos les violentes émeutes qui ont secoué récemment la ville d'Alger et ses environs. Les habitants des bidonvilles algérois, qui se comptent en milliers, se sont en effet insurgés contre les autorités publiques pour exiger des habitats sociaux décents. Venant de les régions d'Algérie, ces populations avaient illégalement érigé leurs hideux baraquements au cœur même de la capitale. Bénéficiant du laxisme des municipalités locales, ces nouveaux arrivants ont réussi ainsi à se faire servir les premiers. Les ménages, qui ont choisi la légalité en postulant aux diverses formules de logement, doivent encore patienter pour disposer d'un toit. Ce cas n'est pas isolé, d'autres grandes villes du pays ont également eu leur lot de révoltes du logement. Les difficultés du quotidien et la misère ne sont pas les seuls catalyseurs de cette violence. Il arrive qu'une simple dispute entre deux personnes embrase toute la ville. Les attaques inter-quartiers ont déjà touché de nombreuses cités. Constantine, Oum El Bouaghi, Annaba, Batna, M'sila, Alger, Tizi Ouzou, pour ne citer que ces régions-là, ont déjà enregistré de graves précédents dans ce domaine. Armes blanches, cocktails Molotov, gourdins et barres de fer, ces gladiateurs des temps modernes ne s'interdisent aucun moyen pour compliquer davantage la tâche aux forces de l'ordre. Aussi, les stades de football se transforment régulièrement en arènes de pugilat entre galeries rivales. Un champ de bataille où l'on déplore épisodiquement des morts et des blessés gravement touchés. En somme, les violences urbaines se radicalisent et engagent, désormais, des foules entières. Les spécialistes attribuent cette triste réalité «aux ratés de l'acculturation urbaine» et suggère en guise de thérapie «une mobilisation informée des acteurs sociaux, du débat démocratique et du travail d'expertise pour à la fois exorciser les mémoires des violences subies et initier une forme d'apaisement pour récuser la violence comme modalité de règlement des conflits entre individus et groupes sociaux». Pour cela, on est unanime à souligner l'impératif de développer les synergies nécessaires parmi l'ensemble des partenaires impliqués comme les comités de citoyens, les assemblées élues, les forces de police et les institutions de l'Etat. K. A.