Le Président de la République opère un remaniement ministériel    Relance du projet de la mosquée pôle    Quels impacts sur l'économie algérienne ?    Manifestation massive à Chicago pour appeler à l'interdiction des exportations d'armes vers l'entité sioniste    Scholz a qualifié sa conversation téléphonique avec Poutine d'importante et de détaillée    Les Verts terminent leur mission en beauté    Quatre membres d'une même famille sauvés de l'asphyxie    Des intrusions quasi quotidiennes de sangliers affamés dans les zones urbaines    Un millier d'hectares à emblaver dans la commune de N'goussa    Porteur d'émotion ou miroir d'état d'âme    Un maître de la céramique algérienne qui redéfinit l'art et la tradition    L'irrésistible tentation de la «carotte-hameçon» fixée au bout de la longue perche de la francophonie    6e édition du Salon "SECURA North Africa" prévue à Alger du 3 au 5 décembre    Détenus Palestiniens: de nouveaux témoignages de torture physique et psychologique dans des prisons sionistes    Bronchiolites: journée de sensibilisation et de formation à l'INSP    7e Sommet mondial de l'innovation pour les soins de santé: Saihi s'entretient à Doha avec son homologue palestinien    L'Algérie a réalisé une croissance "robuste" au 1er semestre 2024 (BM)    Entrepreneuriat: Le président de la République annonce l'organisation d'un concours national des meilleures start-up    Brahim Merad installe le nouveau wali d'Adrar    Ghaza: Borrell se dit "frustré" par la poursuite de l'agression sioniste    27e édition du SILA: plus de 4 millions de visiteurs    APN: Dahleb présente le nouveau projet de loi relatif à la gestion des déchets    Le point de départ d'une nouvelle étape    Des milliers de personnes manifestent à Madrid pour réclamer l'autodétermination du peuple sahraoui    L'engagement de l'Algérie à faire face aux défis environnementaux réaffirmé    Une opportunité de plaider pour les différentes questions concernant l'Afrique    Boxe : Mike Tyson, 58 ans, battu sur décision des juges par le YouTuber Jake Paul    L'USB piégée à domicile, l'USMA rejoint le MCA en tête    Foot/ CAN-2025 (Qualifications/ Gr.E - 6e et dernière journée) : l'Algérie domine le Libéria (5-1)    Sommet de la jeunesse africaine en Ethiopie: Hidaoui passe en revue l'expérience de l'Algérie en matière de prise en charge de la jeunesse    Match Algérie/Liberia : Tizi-Ouzou se pare des couleurs nationales pour un rendez-vous historique    Judo: le Collège Technique national les 22-23 novembre à Oran    Merad préside la cérémonie l'installation du nouveau wali d'Aïn Témouchent    Le rôle de l'association des Ouléma dans la préservation de l'identité nationale durant la période coloniale mis en avant à Djanet    70e anniversaire du déclenchement de la Révolution : un parcours révolutionnaire jalonné d'étapes phares    CAN-2025 Algérie-Libéria : les "Verts" décidés à conclure en beauté    L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Les cheminots à cœur ouvert
Conditions de travail, maladies, séquelles du terrorisme, mépris de la tutelle…
Publié dans La Tribune le 13 - 05 - 2010


Photo : Riad
De notre correspondant à Oran
Samir Ould Ali
«C'est la certitude d'être spoliés de nos droits et le sentiment d'humiliation qui l'accompagne qui sont les plus durs à supporter. Les travailleurs de l'ensemble des secteurs, public et privé, bénéficient d'augmentations de 20 à 23% sauf nous. Par quelle logique en avons-nous été exclus ?» C'est par ces paroles tristes où l'incompréhension le dispute à l'amertume que les cheminots d'Oran tentent d'expliquer leur décision d'entamer une grève qui, ils le reconnaissent volontiers, pénalise les voyageurs. Elle demeure la seule manière de se faire entendre dans un pays où «ni le ministère, ni nos dirigeants et encore moins nos représentants syndicaux ne semblent se soucier de notre situation socioprofessionnelle», explique un conducteur de train, 34 ans et déjà près de 20 ans de service. «Rien, aucune logique au monde ne peut justifier que les cheminots -ou n'importe quelle autre catégorie de travailleurs- soient exclus d'une augmentation salariale, décidée pour l'ensemble du secteur public.»
Assis face à des machines silencieuses, sur un quai pratiquement vide, les cheminots comptent les heures en attendant une communication qui, d'Alger, leur rendrait compte des résultats des négociations qui se déroulent entre leur fédération et le ministère des Transports : «Une seule décision compte à nos yeux : les augmentations salariales. Et qu'on ne vienne pas nous dire que la SNTF n'a pas les moyens de les assumer. C'est le problème des gestionnaires, pas celui des travailleurs.»
Mensonges et mauvaise gestion ?
Pour les grévistes, si les gestionnaires de la SNTF avaient voulu faire des bénéfices, cela se saurait : «La mauvaise gestion est le talon d'Achille de notre entreprise, explique un conducteur de locomotive, la quarantaine bien entamée. Nous avons les ressources humaines et financières mais pas de démarchage auprès des entreprises, et le transport de marchandises s'est réduit comme peau de chagrin. Par la faute des gestionnaires, nous n'exploitons aucun des nombreux atouts de la SNTF. Du moins dans la région ouest du pays.» Notre interlocuteur rappelle que la ligne reliant la gare au port d'Oran est abandonnée depuis de longues années, comme l'ont été d'autres projets d'extension et de développement des chemins de fer : «Et on se permet en plus de mentir au peuple. N'avons-nous pas, fin 2008, vu le président de la République inaugurer en grande pompe la ligne Oran-Arzew ? Voyez vous-même, jamais aucun train n'a pris le départ et la ligne est à l'abandon.» En effet, hormis la plaque commémorative rappelant que la ligne a été inaugurée à telle date par le président de la République, rien n'indique qu'un train assure une liaison avec Arzew, l'autre ville des
hydrocarbures. «Pour des raisons obscures, les gestionnaires de ce pays préfèrent voir Sonatrach transporter ses marchandises par route, malgré les risques, plutôt que par le rail. Si la gestion était bien pensée, le carburant de Sonatrach et les marchandises du port ne transiteraient-ils pas par la gare ? N'est-ce pas le mode de transport le plus sûr ?»
Dépités mais francs, les cheminots reconnaissent que les gares marocaines -dont les cheminots s'émerveillaient de la qualité de nos trains- qui n'étaient que ruines dans les années 80 ont surclassé les nôtres grâce à la clairvoyance de leurs gestionnaires : «Au lieu de s'équiper chez General Motors, ils se sont adressés à la française SNCF. Aujourd'hui, en cas de besoin, ils n'ont qu'à traverser la
Méditerranée alors qu'ici nous sommes obligés d'attendre les pièces de rechange du lointain Canada.» Revenant sur le motif de leur grève, les déçus de la SNTF n'hésitent pas à exhiber leurs fiches de paie pour montrer toute la précarité de leur situation socioprofessionnelle. «Comme vous le voyez, les rémunérations varient généralement de 12 000 à un peu plus de 16 000 DA. Pensez-vous qu'un père de famille peut subvenir aux besoins des siens avec un salaire pareil ? demande un cheminot du haut de ses 27 années de service. Seules les primes nous permettent de joindre, difficilement, les deux bouts mais, quand vous prenez votre congé, ces primes sont évidemment supprimées et vous vous retrouvez avec un salaire de base que beaucoup de nos concitoyens dépenseraient dans l'achat d'une paire de chaussures de marque.» Pour leurs voyages et déplacements, les cheminots perçoivent 37 DA de l'heure, ce qui suffirait à peine à un déjeuner. «Nous payons tout avec notre propre argent, renchérit un contrôleur.
Un déplacement à Alger rapporte 148 dinars avec lesquels nous nous débrouillons pour manger, boire ou acheter des cigarettes. Autre exemple : avec tous les risques et les dangers que nous encourrons [accidents ferroviaires, cas de suicide…] nous touchons 700 DA comme prime de risques. Vous pensez que c'est logique ?»
Les grévistes rappellent qu'ils sont passés par les années 90 dont ils gardent encore des séquelles physiques et psychologiques. «Un rien me fait sursauter, reconnaît le conducteur. Nous avons travaillé dans un tel climat de peur et de stress que beaucoup d'entre nous ont contracté le diabète ou des maladies psychologiques, mais cela n'intéresse personne. Comme personne ne se soucie du fait que les difficiles conditions de travail ont créé chez beaucoup de cheminots des problèmes articulaires, de dos, d'incontinence urinaire… Pourtant, des dossiers médicaux existent et nous avons saisi les responsables mais personne n'en tient compte. Je vous le dis, nous avons donné nos meilleures années à la SNTF mais celle-ci ne nous le rend pas.»
Réhabiliter le cheminot
Les cheminots insistent : «Nous ne cherchons pas à faire fortune. De toutes les manières, nous savons que ce n'est pas possible. Nous voulons juste qu'on nous rende notre dignité : que l'Etat reconnaisse les sacrifices que nous avons consentis pendant les années 90, que nos maladies soient prises en charge et que nos salaires soient revalorisés. Mais, surtout, nous ne reprendrons pas le travail si des augmentations ne nous sont pas accordées comme à tous les travailleurs algériens.»
A l'évidence, la grève des cheminots a rouvert bien des blessures et ravivé bien des souffrances que, dans leur empressement à «redorer le blason» du pays, les dirigeants ont oublié de guérir.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.