De notre correspondant à Béjaïa Kamel Amghar L'image fait vendre. Les industriels ont, de nos jours, parfaitement intégré cet aspect dans leur stratégie de développement. Beaucoup d'entreprises, aussi bien publiques que privées, élaborent des politiques marketing très ambitieuses et investissent des sommes colossales afin de gagner la dure bataille de l'opinion. L'éthique économique est devenue un indice de bonne santé et un atout majeur pour se faire une place face à une concurrence de plus en plus rude. Le respect de l'environnement et les questions écologiques requièrent ainsi une importance particulière dans les choix et les perspectives de l'ensemble des acteurs de la sphère productive. Depuis le début des années 1990, ce nouveau management a progressivement instauré ses règles avant de s'étendre à toutes les filières d'activité. Au tout début, les sociétés s'astreignent à cette nouvelle culture dans le seul objectif de se faire «certifier à l'ISO» avec un seul souci en tête, celui de défendre la qualité de leurs produits. Au fur à mesure, d'autres considérations s'y sont également imbriquées avec le développement de la législation et l'évolution comportementale du consommateur. «La forte fiscalisation des activités polluantes et les pressions multiples de l'opinion publique figurent parmi les principaux facteurs ayant contraint les opérateurs économiques au respect des normes environnementales et sanitaires», explique Sadek, enseignant à la faculté des sciences économiques de l'université de Béjaïa. Aujourd'hui, chaque entreprise compte dans son organigramme un département «hygiène et sécurité» et dispose d'un laboratoire d'analyse qualité de haute technologie. Des entités étatiques comme l'EPB (Entreprise portuaire de Béjaïa) et Alcovel (Algérienne de la cotonnade et du velours) figurent parmi les premiers opérateurs à se conformer aux nouvelles exigences. L'amélioration des processus de production, le recyclage des déchets en sous-produits, l'épuration des rejets liquides, la rationalisation de la consommation énergétique, l'optimisation de l'exploitation des ressources naturelles, la prévention des risques, la contribution à l'ancrage de la culture écologique et à la préservation des milieux naturels, à chaque opérateur sa recette pour se faire bonne presse dans l'environnement socio-économique. On doit souligner à ce propos l'éveil de la conscience citoyenne parmi les populations locales et leur mobilisation constante pour dénoncer tous les cas d'atteinte à leur santé et à leur sécurité. Rappelons à ce sujet les nombreux cas où des carrières d'agrégats et des sablières ont été fermées suite à des mouvements de protestation. Récemment encore, cette mobilisation s'est encore manifestée pour prévenir BMZ (Western Mediterranean Zinc) contre tout risque environnemental dans l'exploitation de la mine zincifère d'Amizour. Ayant anticipé très tôt cette dynamique sociale, les opérateurs de l'agroalimentaire ont su répondre à cette requête. Des sociétés comme Cevital, Soummam, Ifri, La Vallée, Toudja, Cojek, Giprolait, Danone-Djurdjura et Candia-Algérie, entre autres, ont précocement adopté la démarche HCCP (Méthode d'analyse des risques aux points critiques de contrôle) en s'alignant sur les standards internationaux les plus rigoureux en matière de qualité, de sécurité et de bonne gestion. Evoquant leur méthode de travail, les chefs d'entreprise parlent aujourd'hui couramment de développement durable et de système de management intégré (QHSE). L'Etat, à travers la forte fiscalisation des activités polluantes, a également contribué à asseoir cette culture écologique dans les milieux industriels. Dans le but de se conformer au dispositif législatif et réglementaire mis en place, les entrepreneurs se disent prêts à coopérer avec les pouvoirs publics pour assurer la lutte contre la pollution et remédier aux non-conformités par des actions correctives et préventives. Mieux, des entreprises comme l'EPB œuvrent également «à former et à motiver l'ensemble du personnel à adopter une attitude responsable vis-à-vis de l'environnement et de la sécurité au travail». Si les entreprises sont pressées de partout pour respecter les normes environnementales, les collectivités locales éprouvent cependant d'énormes difficultés dans la gestion des ordures et des déchets ménagers. Les décharges publiques anarchiques constituent aujourd'hui la première source de pollution. Les réticences opposées çà et là à l'implantation de décharges contrôlées (DPC) et des centres d'enfouissement techniques (CET) accentuent ce problème. Les mairies doivent absolument trouver la solution idoine avant de subir «les foudres» d'une opinion qui a déjà «forcé la main aux chefs d'entreprise».