«Par ici, Mpho !» «Antonio, passe, passe !» Dans le collège huppé de Sunward Park, près de Johannesburg, vingt footballeurs en herbe issus des ghettos s'entraînent tout en poursuivant leur scolarité, grâce à un programme qui ambitionne de s'étendre à toute l'Afrique. En shorts blancs, maillots gris et chaussures à crampons, les jeunes garçons se passent le ballon sous les ordres d'entraîneurs recrutés par une association d'anciens footballeurs nommée Diambars, «combattants» en wolof, la langue du Sénégal où elle a fait ses premières armes. L'objectif principal de Diambars, fondée par d'ex-vedettes comme Patrick Vieira et Bernard Lama, est d'offrir de solides études à des jeunes issus de milieux défavorisés et doués pour le football. «C'est la meilleure façon de devenir footballeur et je peux suivre une bonne scolarité en même temps», lance du haut de ses 13 ans Antonio Catania, appelé sur le terrain «Banderas», en référence à l'acteur espagnol. Le sport, «c'est un bel angle d'attaque» pour l'éducation, souligne le directeur de l'association, Jimmy Adjovi-Boco, qui profite du Mondial 2010 de football (11 juin/11 juillet), pour ouvrir sa première promotion sud-africaine. Depuis la première puissance économique d'Afrique, «incontournable pour tout projet qui se veut continental», l'ancien footballeur béninois entend essaimer sur le continent. «Avec la Coupe du monde, ça nous intéressait aussi en termes d'image et de notoriété», note-t-il. En Afrique du Sud, où l'éducation reste à deux vitesses seize ans après la chute de l'apartheid, les formations de ce type demeurent une exception. Les écoles de qualité dans les anciens quartiers blancs, où le rugby est roi, ne proposent pas de foot dans leur programme et aucun sport n'est inculqué dans les établissements des townships, faute de moyens. Les défis à relever dans l'éducation de base sont tels que personne ne se soucie de détecter les jeunes talents du football, le sport préféré de la majorité noire. Les initiatives du type de celle de Diambars se comptent sur les doigts de la main. Les jeunes Diambars, inscrits pour un cycle de cinq ans, sont principalement recrutés dans les townships et les zones rurales sur des critères sportifs. Au collège, ils bénéficient d'une remise à niveau avec cours de soutien. Et ça paye. «Ils ont envie d'apprendre, ils veulent être éduqués», se félicite Samuel Mphuti, professeur de sotho, l'une des onze langues officielles d'Afrique du Sud, recruté à Sunward Park pour ces jeunes qui n'ont jamais étudié l'anglais.