Le douzième jour de la compétition du Festival national du théâtre professionnel d'Alger a été marqué par l'entrée en lice du Théâtre régional de Batna qui a présenté, vendredi dernier, sur les planches du Théâtre national algérien, El Hachamine (les Timides) mis en scène par Bouzid Chaouki et adapté par Mourad Snouci du texte la Biche et les Deux Timides, d'Eugène Ionesco. Dans le style du théâtre de boulevard, la pièce relate l'histoire d'un père timide, interprété par Mahfoud El Hani, qui se voit contraint d'accepter la demande en mariage de sa fille par un homme audacieux, interprété par Kamel Zerara, qui sans même attendre la réponse du père s'autoproclame fiancé officiel. Mais la jeune femme dont il est question, incarnée avec talent par la dynamique Nawel Messaoudi, s'insurge contre l'arrogance de son prétendu fiancé, et refuse catégoriquement ce qu'elle considère comme un mariage forcé conséquent au manque de personnalité de son père. Elle affirme à celui-ci qu'elle s'oppose à cet homme envahissant, qui s'impose chez eux tel un conquérant, sans aucun savoir-vivre. L'effrontée choquera encore plus son timide père lorsqu'elle lui assène qu'elle n'épousera qu'un homme qu'elle connaît bien et qu'elle aime profondément. En fait, la fille est amoureuse de son cousin, interprété sur scène par Ramzi Kedja et c'est le seul homme qu'elle veut épouser. Mais le problème est que son cousin est encore plus timide que son père au point qu'il n'ose même pas avouer ses sentiments ni défendre celle qu'il aime contre l'indu prétendant. Cette situation va entraîner les différents personnages dans des péripéties rocambolesques, dans une succession de scènes hilarantes qui feront rire le public. Mélangeant savamment le style du théâtre de boulevard et celui de l'absurde, El Hachamine a eu du mal à accrocher le public dans le premier quart d'heure. L'incohérence des dialogues entre les personnages et les mouvements incessants d'une partie du décor, à l'instar du mouvement de celui de la porte et du canapé qui changeait sans cesse de position, donnaient le tournis. Après cette mise en bouche au goût âcre, le rythme de la pièce s'accélère, et le public est enfin captivé. Il faut saluer la prestation des comédiens qui ont incarné chacun leur rôle avec authenticité et ont créé une réelle symbiose avec le public. Quant à la mise en scène, Bouzid Chaouki a réussi à traduire l'absurde de la situation dans une disposition scénique fluide et digeste. Son choix des éléments de la scénographie, même si cela n'était pas visible de prime abord, a été pertinent et en adéquation avec l'aberration de la situation que vivaient les personnages. Quant à l'adaptation de Mourad Snouci, il a su se réapproprier le texte, en lui insufflant des repères de la culture algérienne, à l'instar de certaines scènes hilarantes, telles que celle où la fille parodie les films hindous et égyptiens, qui ont fait rire à gorge déployée le public. Au final, le Théâtre régional de Batna a choisi, pour cette édition du FNTP, un théâtre comique et distractif, certes de qualité, mais sans plus. S. A.