De notre correspondant à Béjaïa Nacer Aksel «La destination Béjaïa» ne date sûrement pas par les années de l'indépendance si l'on en juge par les différentes monographies et cartes postales publiées dès les débuts du siècle dernier, voire du XIXe. Plusieurs cartes postales de la ville de Béjaïa et de ses régions ont été produites tout juste après la colonisation et le beau livre Bougie, la perle de l'Afrique du Nord du comte Salvator de Habsbourg, comportant plusieurs tableaux de celles-ci et paru en 1898, est une preuve palpable de la qualité des visiteurs qu'elle attire. Et le premier guide touristique Bougie et la petite Kabylie, publié par le syndicat d'initiative (investisseurs coloniaux dans la région) et relatant quelques circuits, remonte déjà à 1914. Dès le début du XXe siècle, de grands hôtels ont fait leur apparition dans la ville de Béjaïa, comme le «Grand hôtel de la Gare» de M. Cortade. Comme partout dans le monde, ce sont les mouvements ouvriers des années trente, à l'exemple du mouvement populaire de 1936 en France, qui a imposé au gouvernement d'antan de revoir sa politique sociale. C'est, en effet, le programme Blum-Violette, établi par la SFIAO et le PCF qui ont accédé au pouvoir dans ce pays cette année-là, qui va accorder des salaires avantageux et des congés payés aux ouvriers, enclenchant ainsi une nouvelle dynamique touristique de masse dans le monde. En Algérie, les ouvriers pieds-noirs, qui ont profité bien sûr de ces acquis, ont commencé à investir dans le secteur du tourisme. D'ailleurs, plusieurs restaurants et hôtels ont été construits dans la région de Béjaïa après cette époque. Mais beaucoup d'entre eux ont disparu après l'indépendance. La seconde vague de construction d'hôtels de qualité remonte aux années soixante-dix, comme «les Hammadites» (Tichy), «Djorf Edhahabi» (Souk El Tenine)… Le grand boom de construction d'hôtels est enregistré, en revanche, durant les années quatre-vingt-dix. Béjaïa a, en effet, à la différence des autres villes d'Algérie, connu un contexte politique assez particulier : c'est la seule ville du pays qui n'a pas été directement touchée par la vague de violences, d'où l'affluence des estivants vers cette destination. Il y a eu, d'ailleurs, des saisons estivales où la région a recensé des pics de 6 millions de visiteurs. La wilaya compte en 2008 pas moins de 69 établissements hôteliers, dont plus d'une dizaine sont de grande qualité. Ils sont répartis ainsi : 20 hôtels balnéaires de 1 806 lits, 35 hôtels urbains de 1 531 lits, 3 hôtels sub-urbains de 58 lits, 10 hôtels thermaux de 296 lits et 1 hôtel climatique public de 60 lits. Mais la demande accrue en matière d'hébergement, d'une part, et la cherté des prix de séjour dans ces établissements, d'autre part, ont poussé à trouver des solutions compensatrices. Ainsi, le nombre de camps de toile s'est élevé à 57, totalisant 24 000 lits. La plupart sont concentrés sur la côte est, dont 21 à Souk El Tenine, 15 à Aokas et 10 à Melbou. La majorité de la clientèle de ces campings sont des familles de petites bourses ou celles qui n'ont pas eu le temps de réserver dans des hôtels. Sans compter les 17 centres de vacances qui offrent 1 950 lits. La deuxième solution, qui a pris de l'ampleur, est la location des logements des citoyens habitant les villes côtières. Ceux-ci préfèrent céder leur appartement et aller passer les vacances chez leurs familles dans les villages moyennant une somme relativement intéressante pour eux. Le nombre de ces logements, même s'il est difficile à déterminer car la plupart des opérations se font dans une opacité totale, est néanmoins estimé à plus de 5 000 unités, équivalent à 30 000 lits. L'urgence de répondre à une forte demande des vacanciers en matière d'hébergement a occulté la qualité des prestations de services dans plusieurs établissements et camps de toile. Quant aux centres d'attractions et de loisirs, ils se comptent sur les doigts.