Artistes, professionnels de la culture, et même responsables, occidentaux reconnaissent que les cultures et les arts africains se sont imposés sur les scènes internationales. La musique, la peinture, la sculpture, la danse, la littérature et le cinéma africains sont aujourd'hui des valeurs sûres sur tous les marchés de l'art du monde. Mieux, ils ont même investi d'autres cultures. Des artistes en quête de nouveaux sons, de nouvelles formes ou de nouvelles muses s'en inspirent et les intègrent dans leurs créations. Hier, le blues et le jazz, aujourd'hui la world music, les musiques ethniques, les fusions dans différents genres musicaux, le design, les arts plastiques, la chorégraphie… portent souvent une dimension africaine dans leurs expressions, productions ou créations. Celles qu'on appelait «cultures mineures» et ceux qu'on qualifiait d'«arts primitifs» se sont révélés d'une telle richesse et d'une telle originalité que la commercialité qui a soumis la culture à ses règles et transformé les productions culturelles en de vulgaires produits de marché, ne les a pas encore totalement corrompues, viciées. C'était «l'exception culturelle», ou plutôt les «exceptions culturelles», concept que l'Afrique a d'ailleurs longtemps défendu, mais en vain. Elle voulait, et croyait pouvoir, préserver ses cultures et les protéger des serres de tous ces chantres de la mondialisation et de la globalisation. Mais on ne peut rien défendre quand on n'a pas les armes et les moyens nécessaires. On ne peut pas protéger des cultures dont la promotion et l'exploitation sont prises en charge par des opérateurs étrangers, qui, bien entendu, entendent en tirer profit, d'une manière ou d'une autre. Les artistes africains sont d'ailleurs nombreux à reconnaître qu'ils sont étrangers chez eux. «Pour se faire connaître dans son propre pays, sur son propre continent, il faut partir pour l'étranger. Ce n'est qu'une fois connus et reconnus dans d'autres pays que nous avons une chance de l'être chez nous», s'accordent à dire ces artistes, qui, évidemment, déplorent cette situation et voudraient bien voir leurs cultures profiter d'abord à leurs sociétés, leurs peuples, leurs pays et leur continent. Or, pour réussir ce challenge, les Etats africains doivent prendre en charge, valoriser, promouvoir et défendre leurs cultures. Le veulent-ils ? Cette question est secondaire. Car la vraie question est : le peuvent-ils ? Les pays africains, dans leur majorité, ont-ils les moyens humains, financiers, matériels et techniques de construire des industries de cinéma, de livre, des écoles d'art, des théâtres, des académies de danse… toute cette machine, avec ses mécanismes d'aides à la création, de promotion, de diffusion ? Assurément non. Même si la volonté y est, ce qui n'est pas toujours le cas, la situation socio-économique a obligé l'Afrique à opérer des choix et opter pour des priorités où la culture est souvent absente. La solution ? Un éveil et une prise de conscience en Afrique. Mais pas seulement. Les pays riches qui ont jusque-là exploité l'Afrique comme le terreau qu'elle est devraient le vivifier et l'irriguer pour qu'il continue à produire et nourrir toute l'humanité dont il a été le berceau. H. G.