Une demande de constitution d'une commission d'enquête parlementaire sur la corruption, sur l'initiative du député Ali Brahimi (sans appartenance politique) et signée par 25 élus de différents partis siégeant dans la chambre basse du Parlement a été déposée hier en fin de matinée sur le bureau de l'Assemblée populaire nationale. L'initiateur de la requête nous a précisé hier en marge de la plénière que cette pratique relève des prérogatives du Parlement consacrées par la loi. Dès lors, le bureau de l'APN n'a aucun argument pour refuser cette commission d'enquête. «On ne demande pas à enquêter sur Sonatrach, nous a-t-il affirmé et encore moins sur les affaires qui sont entre les mains de la justice.» En fait, le document qui a été remis aux journalistes parlementaires établit un certain nombre de constats et pose beaucoup de questions, notamment sur l'efficience et l'efficacité des moyens de contrôle, en plus de l'absence de mécanismes de lutte contre la corruption qui n'ont pas encore vu le jour en dépit de leur consécration par la loi de 2006, relative à la prévention et à la lutte contre la corruption. «[…] Les scandales se suivent à une cadence de plus en plus effrénée. Ils révèlent, toujours plus, la profondeur et l'étendue du mal, son incommensurable volume et les graves et divers niveaux de responsabilité qu'il met en cause. Il n'est pas exagéré de dire qu'après le terrorisme, c'est la deuxième menace dangereuse contre la sécurité nationale», lit-on dans le document. Pour M. Brahimi et ses collègues, les projets publics sont «sous la menace d'un droit de cuissage d'un autre âge» et ce, depuis leur conception jusqu'à leur réception définitive. Les députés estiment que toutes les institutions classiques de contrôle et de répression (Douanes, IGF, Cour des comptes) doivent régulièrement faire l'objet d'évaluations périodiques de performance. Ils s'interrogent tout de même sur la non-mise en place de l'Office national de contrebande et de l'organe national de prévention et de lutte contre la corruption, pourtant prévus par la loi. Et de s'interroger : «Y a-t-il un plan doté d'objectifs et d'échéances dans la démarche de lutte contre la corruption ? L'action publique et judiciaire se déclenche-t-elle automatiquement et de manière indépendante dès lors qu'un scandale de corruption est mis au jour par le service d'investigation, la presse ou le citoyen ou d'autres indices comme les signes ostentatoires de richesse ? Quelle place et quelle garantie le dispositif de lutte contre la corruption offre-t-il à l'initiative citoyenne ?» Les auteurs de la requête interpellent les pouvoirs publics en s'interrogeant sur l'absence de communication ou, quand elle existe, elle est parcimonieuse. Les députés n'ont pas manqué de souligner le recours abusif au gré à gré dans l'octroi des marchés publics qui favorise la corruption. «En plus des détournements de franchises fiscales et douanières et autres facilitations bancaires imméritées, la fraude fiscale et l'évasion des capitaux sont d'autres plaies du chancre qui ronge l'économie nationale.» Tout comme d'ailleurs, le non-rapatriement des devises après des opérations d'exportation. Autant de questions que les auteurs de la requête veulent tirer au clair à travers cette commission, pour peu que le bureau de l'APN ne mette pas le coude dessus. F. A.