25 députés de différents partis ont adhéré à l'initiative d'un des leurs, Ali Brahimi, pour la constitution d'une commission d'enquête parlementaire sur la corruption dont la demande a été déposée à la fin de la semaine dernière sur le bureau de l'Assemblée populaire nationale (APN). Et il n'y a aucune raison pour que ce bureau rejette cette demande qui s'inscrit dans le cadre des prérogatives du Parlement. Partant d'un constat, que tout le monde a déjà fait d'ailleurs, sur le recours à la corruption et aux pots-de-vin qui s'est banalisé, les députés s'interrogent dans le document de présentation de leur initiative sur notamment l'efficience des moyens de contrôle existants et l'absence de mécanismes de lutte contre la corruption, et ce, en dépit de leur consécration par la loi. «Les scandales se suivent à une cadence de plus en plus effrénée. Ils révèlent, toujours plus, la profondeur, la gravité et l'étendue du mal, qui est incommensurable, ainsi que le volume et les divers niveaux de responsabilités qu'il met en cause. Il n'est pas exagéré de dire qu'après le terrorisme, c'est la deuxième menace dangereuse contre la sécurité nationale», explique le document. Et la menace est toujours là. Elle n'est même plus tapie dans l'ombre. Elle est dans tous les rouages de l'administration, à tous les niveaux. Aucun projet, aucune entreprise n'échappe à l'appétit vampirique des «affairistes». Il y a bien des institutions qui sont chargées de débusquer tous ces aigrefins. Mais elles semblent bien désarmées face à cette machine machiavélique dont les leviers de commande sont entre les mains de personnes souvent haut placées dans les sphères décisionnelles, sinon protégées par ces dernières. Les quelques scandales financiers dont l'opinion publique a eu vent montrent clairement la collusion entre ces milieux mafieux qui pratiquent la corruption comme stratégie économique et l'administration censée garantir la bonne gestion des projets et entreprises de l'Etat. La vox populi rapporte les rumeurs d'enquêtes sur des affaires douteuses, de dossiers en examen, d'audit dans des entreprises dont les responsables sont suspectés de malversations et/ou de corruptions… On a même des arrestations et des poursuites judiciaires. Mais on n'arrive pas à se départir de cette conviction que ce n'est là qu'un petit bout de la partie immergée de l'iceberg. Pis, il y a même cette certitude que le plus gros a toutes les chances d'être immergé, non par le principe d'Archimède mais plutôt par celui de l'effet domino et la réaction en chaîne que pourrait provoquer la mise en examen d'un responsable qui en entraînerait d'autres dans sa chute. Sinon, pourquoi la machine judicaire ne se met-elle pas automatiquement en branle quand il y a suspicion de corruption rapportée par la presse et/ou des sources, même anonymes ou suggérée par ces signes ostentatoires de richesse ? Pour ce faire, il faut d'abord que la justice soit complètement indépendante, et surtout qu'il y ait un dispositif de lutte contre la corruption qui impliquerait tous les citoyens et encouragerait les cadres soucieux du devenir de leur entreprise à dénoncer le moindre écart délictueux des responsables et gestionnaires. Car nombre de cadres intègres n'osent pas le faire de crainte que le responsable s'avérant intouchable ne leur en fasse payer les frais. La commission d'enquête de l'APN, si jamais elle est installée, se propose de se pencher sur toutes ces lacunes. Mais verra-t-elle le jour ? Et quand bien même, fera-t-elle mieux que toutes les autres commissions qui n'ont rien apporté ? Pourtant, il est grand temps de nettoyer tous les rouages de l'Etat et de l'administration. C'est même nécessaire. Le Président l'a d'ailleurs suggéré en déclarant que la rigueur sera de mise dans l'application du plan quinquennal 2010-2014 et que les dépenses seront sous surveillance. C'est le souhait de tous… sauf de ceux qui projetaient de s'enrichir encore au détriment du Trésor public. H. G.