Quarante-huit ans après l'indépendance, le message de Novembre passe mal. Très mal, notamment chez les jeunes. Mal au point que les référents nationaux n'existent pratiquement plus. Depuis l'indépendance, en effet, les pouvoirs successifs ont fait exactement le contraire de ce qu'il fallait faire en termes, notamment, d'enseignement de l'histoire. Au lieu d'une histoire apaisée, basée sur des faits, on a trouvé une histoire orientée, instrumentalisée et vidée de sa substance. Au lieu de vrais «héros», les pouvoirs ont créé de faux mythes, véhiculés par des médias aux ordres. Résultat, beaucoup d'hommes et de femmes qui étaient à l'avant-garde du mouvement national et de la guerre de libération ont tout simplement été frappés d'ostracisme. A tel point que, dans les années 1980, des lycéens, à qui on demandait de citer un héros de la guerre d'indépendance, avaient donné le nom de l'acteur Sid Ali Kouiret, alors à l'affiche dans plusieurs films historiques. C'est là tout le drame de la jeunesse algérienne. Il est vrai que, des années après l'indépendance, la jeunesse de l'époque continuait de croire en les acquis de l'indépendance. La situation n'est absolument pas la même, quelques décennies plus tard. Les jeunes d'aujourd'hui ne semblent même pas ressentir les effets de l'indépendance. Car, au lieu des promesses de justice sociale et d'égalité, les Algériens ont une autre réalité : chômage, pauvreté et corruption font partie du quotidien. «[…] Le résultat est-il à la hauteur des ambitions du mouvement national ? Nous sommes bien obligés de constater qu'au moins une partie de notre jeunesse souffre à tel point que certains, issus de toutes les couches de la société, préfèrent fuir le pays. Tous les jours, des richesses agressives, clairement et impunément mal acquises, narguent la majorité de la population qui peine dans des difficultés sociales. La lutte contre la corruption et pour la moralisation de la vie publique sont des chantiers prioritaires», constate Zohra Drif, une des icônes du mouvement national dans un entretien à nos confrères de Liberté. Le constat n'est pas fait par un jeune, mais par une personne qui a vécu les affres du colonialisme. Il est vrai que les résultats de l'équipe nationale de football ont redonné à la jeunesse un certain goût de l'attachement au drapeau national. Mais cela risque d'être d'une courte durée… A. B.