L'Assemblée populaire nationale effectue, aujourd'hui, le renouvellement des instances la composant. On verra ainsi de nouveaux vice-présidents, des présidents de commission et des rapporteurs. Ce mouvement de chaises musicales donne l'air d'une institution démocratique où l'alternance est maîtresse des lieux. La réalité est pourtant différente, puisque ces «changements» ne sont que l'illusion d'une institution qui tente de sauvegarder les formes malgré une situation pour le moins déliquescente. Depuis l'installation de la législature actuelle en 2007, les échecs se suivent et se ressemblent. Faite pour voter mais aussi proposer des lois, l'APN ne fait pratiquement ni l'un ni l'autre. Puisque même si, par le passé, les propositions de loi étaient rarissimes - elles n'étaient pas acceptées par l'Exécutif et/ou le bureau de l'Assemblée -, les députés de la sixième législature ne font même pas l'essentiel, à savoir voter des lois. C'est, en effet, la première fois que pendant au moins deux sessions parlementaires, le nombre de lois votées est totalement dérisoire. Pendant la précédente session, seules quatre à cinq lois ont été votées. Le nombre est un peu plus supérieur pour l'actuelle session, mais il reste très loin de ce que peut attendre le citoyen de ses élus. Et encore, ces chiffres existent grâce à des lois déposées par le gouvernement. Et quelles lois ? Juste quelques textes incontournables, à l'image de la loi de finances ou d'autres lois qui ne touchent pas forcément à la vie du citoyen lambda. Pourtant, les initiatives ne manquent pas. Des députés, y compris ceux issus de l'Alliance présidentielle, ont fait des propositions de loi. Certaines sont même de premier ordre. Celle concernant la criminalisation du colonialisme est des plus éloquentes. Inutile de mentionner les multiples tentatives de l'opposition ne serait-ce que pour faire inscrire une proposition de loi. Des initiatives restées lettre morte. C'est le cas, par exemple, de la proposition de débat sur la peine de mort, formulée par le RCD. Ou encore la proposition de la commission d'enquête parlementaire sur la corruption, formulée récemment par le député indépendant Ali Brahimi et ses collègues. On voit bien à travers ces exemples, qui sont loin d'être exhaustifs, qu'il n'y a pas que les propositions de loi qui ne passent pas. Jamais l'APN n'a organisé un débat sur une situation donnée. Elle n'a même pas accepté les multiples demandes formulées dans ce sens. Ce ne sont pourtant pas les occasions qui manquent. Pourtant, la chambre basse du Parlement ne manque pas de moyens. Pis, les députés - tout comme les sénateurs - sont parmi les citoyens les plus privilégiés. Il ne s'agit pas de jeter l'anathème a priori et de jouer au misérabilisme de mauvais aloi. Il est vrai qu'un élu doit être bien pris en charge et travailler dans de bonnes conditions. En contrepartie, il doit justifier cette dépense de la collectivité. Or, nous sommes loin des deux situations puisque les députés ont des privilèges qui frisent l'extravagance en contrepartie de presque rien du tout. La responsabilité dans ce cas est doublement partagée. Par l'Assemblée elle-même qui ne défend pas ses prérogatives et ne fait pas valoir ses attributions. Et par l'Exécutif qui ne semble pas trop se soucier du principe de la séparation des pouvoirs. A. B.