Des pacifistes juifs -européens, israéliens et américains- ont appareillé dimanche du port de Famagouste, dans le nord de Chypre, à destination de Ghaza, dans une nouvelle tentative de briser symboliquement le blocus maritime imposé par Israël. A bord d'Irene, un petit catamaran bleu et blanc, ont pris place une Juive américaine, un Britannique, une Allemande et quatre Israéliens opposés au blocus imposé par l'Etat hébreu à l'enclave palestinienne depuis 2006. «Nous voulons montrer au monde que tous les Juifs n'approuvent pas la politique israélienne», a expliqué aux agences de presse Edith Lutz. «C'est un devoir sacré pour moi en tant que survivant [de la Shoah, ndlr] de protester contre la persécution, l'oppression et l'enfermement de tant de gens, dont plus de 800 000 enfants à Ghaza», a pour sa part estimé Reuven Moskovitz, un Israélien de 82 ans. «L'Etat d'Israël est un rêve magnifique qui s'est réalisé, il faut faire en sorte qu'il ne devienne pas un cauchemar. Je suis sioniste, je crois que j'ai ma place sur cette terre, mais ce n'est pas une raison pour voler la terre des Palestiniens et violer les droits de 1,5 million de personnes», a-t-il ajouté. Avant de quitter le port, il s'est lancé, sous l'oeil éberlué de la police chypriote turque, dans un solo d'harmonica, un chant hébreu pour la paix. Le voilier a quitté Famagouste à la mi-journée, après des préparatifs très discrets, en partie par peur de sabotages ou de pressions qui pourraient empêcher son départ. «Nous avons choisi Famagouste car nous savions que les autorités [chypriotes] turques étaient favorable à ce type d'action, mais nous n'avions aucune garantie qu'ils nous laissent partir», a indiqué Yonatan Shapira, un ancien officier israélien, membre de l'équipage. En fin d'après-midi, le bateau a quitté les eaux territoriales chypriotes sans encombre, a-t-il précisé par téléphone satellitaire. L'opération, dont le budget dépasse les 20 000 livres soit près de 23 500 euros, a été financée par des dons récoltés notamment par différentes branches de l'organisation «Juifs européens pour une paix juste». A bord, une petite cargaison de jouets, livres, matériel de pêche ou encore médicaments, «une aide symbolique» pour la population de Ghaza. Le trajet vers Ghaza devait, en théorie, durer quelque 36 heures. Les militants ont l'intention de hisser à l'approche de Ghaza des drapeaux de paix multicolores arborant les noms de dizaines de Juifs soutenant leur action. «Nous avons une stratégie de non-violence», a souligné M. Shapira.Parmi les passagers, Rami Elhanan, 60 ans, dont la fille Smadar a été tuée à 14 ans dans un attentat suicide. «Nous nous tapons la tête contre un mur de haine très dur. Mais notre objectif est de faire des fissures dans ce mur, car c'est ainsi que les murs finissent par tomber», a-t-il déclaré. «La chose la plus intelligente que pourrait faire Israël, c'est de nous laisser passer, ainsi personne ne se souviendra de nous. Mais quoi qu'il se passe, le pire m'est déjà arrivé, je n'ai pas peur», a-t-il poursuivi. Le 31 mai à l'aube, des commandos israéliens avaient donné l'assaut à un convoi humanitaire maritime turc, baptisé «la Flottille de la liberté», tuant 9 passagers. Après la vague de réprobations internationales soulevée par l'assaut, Israël a accepté d'alléger le blocus qu'il impose à Ghaza depuis juin 2006, renforcé à la suite de la prise de contrôle du Hamas en juin 2007. L'Etat hébreu maintient toutefois un strict blocus maritime pour empêcher l'importation de matériel de guerre dans le territoire. R. I.