En 2010, des millions de personnes ont été menacées de famine en raison des catastrophes naturelles qu'ont connues plusieurs régions du monde. Le nombre des personnes souffrant de la faim ne fait donc qu'augmenter. Certes, le seuil d'un milliard atteint en 2009 n'a pas été dépassé cette année (il a baissé à 925 millions). Mais la situation est très inquiétante à la lumière des indicateurs enregistrés dans de nombreux pays. La lenteur des actions menées par les gouvernements pour résorber ce phénomène ravageur aggrave également la situation et accroît la vulnérabilité des populations par rapport à ce phénomène particulièrement en Asie ou en Afrique où l'on dénombre plus de 2 milliards d'hommes et de femmes pauvres. La célébration de la Journée mondiale de l'alimentation est l'occasion de revenir sur cette menace qui pèse sur le monde particulièrement en cette ère de changements climatiques. Selon les experts, ces bouleversements devraient à titre illustratif réduire de 50% les rendements agricoles dans certaines régions d'Afrique sub-saharienne d'ici à 2020. La sonnette d'alarme tirée par l'ONU et par les ONG n'a apparemment pas encore réussi à apporter les changements attendus. Des changements urgents pourtant notamment en matière d'organisation des systèmes alimentaires. «Les systèmes alimentaires dans le monde ne sont pas organisés à même d'assurer la sécurité alimentaire pour les membres les plus vulnérables de nos sociétés», a souligné à ce sujet le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-mon le 16 octobre dernier. Et de rappeler la nécessité d'une coopération mondiale réunissant les gouvernements, les organisations intergouvernementales, les organismes régionaux et sous-régionaux, les entreprises et la société civile, pour lutter contre la faim : «Unissons-nous contre la faim et garantissons la sécurité alimentaire et la nourriture pour tous», a-t-il lancé. Il y a donc lieu de s'unir pour tout revoir, et particulièrement les méthodes de production et d'irrigation. En d'autres termes, utiliser les ressources naturelles de manière rationnelle. Il y a aussi lieu de respecter les engagements d'aide aux pays pauvres. A ce sujet, il est utile de rappeler que les aides à l'agriculture sont tombées, selon les chiffres du premier responsable de la FAO, Jacques Diouf, à «6% du total des aides versées par les gouvernements en 2006, contre 19% en 1980». Ajoutons à cela l'instabilité croissante des prix des produits alimentaires, un phénomène qui constitue une vraie menace pour la sécurité alimentaire. On se souvient tous d'ailleurs des conséquences de la crise alimentaire qu'a connue le monde en 2008 avec la flambée des prix des produits de première nécessité tels que le lait et le blé. Situation alarmante dans 29 pays Selon un rapport intitulé «Indice de la faim dans le monde 2010» publié la semaine dernière par l'Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI), la pauvreté, les conflits et l'instabilité politique sont les principaux facteurs à l'origine de l'intensification du phénomène de la famine à travers le monde. Sur 122 pays en développement étudiés, la faim atteint des niveaux «alarmants» dans 25 pays et «extrêmement alarmants» dans quatre pays d'Afrique sub-saharienne. Il s'agit de la République démocratique du Congo, du Burundi, du Tchad et, enfin, de l'Erythrée. La République démocratique du Congo (RDC) enregistre le pire indice dans ce classement, avec l'un des plus forts taux de mortalité infantile au monde et les trois quarts de sa population qui souffrent de sous-alimentation, indique l'institut basé à Washington. A l'exception de Haïti et du Yémen, tous les pays dans lesquels cet indice a atteint un niveau «alarmant», se trouvent en Afrique sub-saharienne et en Asie du Sud. Les 25 pays où la situation est «alarmante» sont par ordre de gravité croissante : le Népal, la Tanzanie, le Cambodge, le Soudan, le Zimbabwe, le Burkina Faso, le Togo, la Guinée-Bissau, le Rwanda, Djibouti, le Mozambique, l'Inde, le Bangladesh, le Liberia, la Zambie, le Timor oriental, le Niger, l'Angola, le Yémen, la République centrafricaine, Madagascar, les Comores, Haïti, la Sierra Leone et l'Ethiopie. A titre indicatif, cet indice de la faim dans le monde est calculé à partir de trois indicateurs : la proportion de la population sous-alimentée, l'insuffisance pondérale infantile et le taux de mortalité infantile. De son côté, la FAO avance le chiffre de 22 pays où l'on enregistre une prévalence «extrêmement élevée» de la faim. Des progrès en Algérie mais… L'IFPRI estime à ce sujet que les progrès sont appréciables dans la lutte contre la malnutrition avec un score de malnutrition inférieur à 5 au cours de ces dernières années contre 6,1 dans les débuts des années 90. L'Algérie figure ainsi dans la catégorie des pays en développement dont l'indice de malnutrition est des plus faibles. Concernant la proportion de la population sous-alimentée, le rapport indique que l'indice de l'Algérie est passé à 3% actuellement, alors que la proportion des enfants de moins de cinq ans présentant une insuffisance pondérale a connu une baisse notable, passant à 3% en 2010 contre 8% dans les années 1988-1992. Quant au taux de mortalité infantile (enfants de moins de 5 ans), il a également enregistré un net recul à 4,1% en 2010 contre 6,4 % dans les années 90, selon cet institut international. Du côté du ministère de l'Agriculture et du Développement rural, on avance aussi que les progrès sont importants et on parle même de stratégie «très solide» pour assurer la sécurité alimentaire avec notamment une attention particulière aux filières agricoles stratégiques et une politique nationale dédiée au renouveau de l'économie agricole et au renouveau rural. Il faut dire aussi à ce sujet que le chef de l'Etat a, dans ses différents discours, mis l'accent sur l'aspect de la sécurité alimentaire qu'il considère comme un élément de la souveraineté nationale. D'où, entre autres, la loi sur les concessions agricoles qui vise particulièrement à préserver les terres des tentatives de détournement de leur vocation agricole. Un phénomène qui, faut-il le rappeler, a causé des ravages dans le secteur durant la décennie 90. Aujourd'hui, même si le taux de disponibilité des produits agricoles a atteint 100% dans certaines régions, l'Algérie continue à être dépendante des importations pour subvenir aux besoins des populations. C'est le cas pour de nombreux produits alimentaires, à l'image du lait. La crise que traverse cette filière illustre la nécessité de réorganiser les filières pour améliorer la production locale et éviter en parallèle les disparités dans la distribution. S. I.