Synthèse de Hassan Gherab L'enquête de l'ONU sur l'assassinat de l'ex-Premier ministre libanais Rafic Hariri est devenue le coin fiché dans la coalition gouvernementale libanaise qu'elle menace de faire exploser un an à peine après sa naissance au forceps. Le gouvernement d'union au Liban est en effet quasi paralysé à cause des positions diamétralement opposées des deux camps qui le constituent : celui de la majorité parlementaire du Premier ministre Saad Hariri, soutenu par l'Occident, et celui de l'opposition menée par le puissant groupe armé Hezbollah, appuyé par Téhéran et Damas.Embourbé dans cette crise, le gouvernement n'a répondu à aucune des attentes des citoyens, les deux courants y siégeant «cherchant chacun à faire passer son propre programme», souligne Mohamad Chamseddine, un analyste libanais cité par le site Iloubnan.info. Les deux parties ont divergé sur quasiment tout, principalement l'arsenal du Hezbollah chiite et le Tribunal spécial pour le Liban (TSL) dont le Hezbollah dit s'attendre à ce que certains de ses membres soient accusés dans l'assassinat de Rafic Hariri. Même le chef de l'armée libanaise s'est dit «inquiet» des répercussions d'une éventuelle accusation du Hezbollah par le TSL qui est soutenu par le camp Hariri. Selon des analystes, la crise pourrait paralyser totalement les institutions et provoquer la chute du cabinet, un scénario similaire à l'impasse qui avait failli plonger le pays dans une nouvelle guerre civile en 2008. «Nous avons un Etat qui dit que le Liban, membre fondateur de l'ONU, doit respecter les résolutions, et un mini-Etat (Hezbollah) pour qui le TSL n'a aucune importance […]. Le «gouvernement est devenu l'otage de l'acte d'accusation», explique à Iloubnan.info Imad Salameh, professeur de sciences politiques à la Lebanese American University.Le président français Nicolas Sarkozy qui fait tout pour redonner à la diplomatie française une place dans la région, n'a pas tardé à réagir à cette situation de crise qui menace le Liban, un des bastions français dans la région. Il a ainsi dépêché en urgence son ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner qui, avant son arrivée à Beyrouth, a demandé des rendez-vous auprès des différents responsables libanais jeudi dernier, et ce, sans donner la moindre explication à toute cette agitation.Selon des sources diplomatiques citées par le journal libanais l'Orient le jour, la mission de M. Kouchner se résume en l'établissement d'un rapport qui rendrait compte de la situation pour permettre à Paris, le cas échéant, de prendre contact avec les capitales pouvant contribuer à éviter tout débordement au Liban. D'autant plus que Paris ne semble guère satisfait ni de l'évolution ni des résultats des contacts entre Riyad, Damas et Téhéran concernant le Liban - lesquels contacts n'ont pour l'instant aucunement réussi à réduire l'intensité des campagnes médiatiques et autres crispations entre les deux camps.Il est attendu que Nicolas Sarkozy, une fois le rapport Kouchner entre les mains, propose un plan notamment axé sur des entretiens avec des responsables libanais de tous horizons, ainsi que des contacts plus ou moins intensifs avec l'Arabie saoudite et la Syrie afin de réduire l'impact qu'aurait l'acte d'accusation de TSL. Nicolas Sarkozy serait prêt à recevoir les parties libanaises en conflit et discuter avec elles, à condition que tous les belligérants en acceptent le principe et qu'un ordre du jour bien précis soit instauré.Selon l'Orient le jour, le ministre des Affaires étrangères français a d'ailleurs tâté le pouls de ses interlocuteurs pour savoir s'ils appuyaient ou non l'idée d'une médiation française... Et il semblerait bien que la grande majorité des Libanais soutient cette idée.