Chirurgien, membre influent du parti Tyyar Al Mustaqbel (Le Courant du Futur) dirigé par Saad Hariri, Moustafa Allouche, né en 1958, est un figure marquante de la scène politique libanaise. Alors qu'il était encore adolescent, Allouche a pris les armes aux côtés des forces palestiniennes lors des deux premières années de la Guerre du Liban. Il poursuivra ensuite des études de médecine à l'Université américaine de Beyrouth et aux États-Unis. C'est en 1998 qu'il intègre le Courant du Futur et en 2005 il devient député sunnite de Tripoli sur la liste de l'Alliance du 14 Mars, une coalition de partis politiques opposés à la présence syrienne au Liban. Il se fait remarquer à partir de l'été 2006 par des positions radicalement opposées au Hezbollah qu'il considère comme un appendice du pouvoir des mollahs iraniens au Liban. Nous avons interrogé M. Allouche au lendemain des incidents frontaliers de Adassiyé qui ont fait 3 morts du côté libanais et 1 mort du côté israélien. Le Temps d'Algérie : Le cabinet Netanyahou n'a jamais caché son intention de s'en prendre au Liban. Aussi, peut-on conclure que les derniers «incidents» frontaliers ne sont, en fait, qu'un prétexte à une attaque israélienne programmée contre votre pays ? Mustafa Allouche : Les intentions Israéliennes envers le Liban sont connues, et les Libanais les ont expérimentées durant plus de quarante ans. Mais, en dépit de cette menace, on ne peut pas conclure, en se basant sur un seul incident, que celui-ci va être un prétexte à une attaque programmée contre le Liban. Il faut attendre encore quelques jours pour voir comment les événements vont évoluer. L'armée libanaise affirme qu'elle ne restera pas les bras croisés. De son côté, le Hezbollah menace de «couper» la main israélienne qui prend pour cible le Liban. Sur le terrain, l'armée israélienne a déployé des renforts. La Finul lève les bras. Comment arrêter l'escalade ? L'armée libanaise a le droit et l'obligation de défendre le territoire national, et ce droit est reconnu par la communauté internationale. Mais pour ce qui est du Hizballah, ce mouvement est clairement associé à l'Iran, et s'il va intervenir, la confrontation va être entre l'Iran et Israël sur le territoire libanais. Dans ce cas, il serait très difficile d'arrêter l'escalade sur le plan local et régional. L'agression israélienne intervient après la rencontre historique entre les présidents Hariri, Al Assad et le roi Abdallah d'Arabie Saoudite, et dans une conjoncture politique interne dominée par l'enquête du Tribunal spécial pour le Liban sur l'assassinat de Rafik Hariri. N'y a-t-il pas volonté de saborder les efforts visant à consolider l'unité et la stabilité du pays ? La solidarité nationale est toujours assurée quand il s'agit de confrontation avec Israël. C'est pour cela qu'il est nécessaire de ne pas mêler les affaires du tribunal international dans les discussions politiques internes. Hassan Nasrallah a révélé qu'il détient les preuves de l'implication d'Israël dans l'assassinat de Rafic Hariri. Des rumeurs font également état de l'implication de membres de son mouvement dans ce meurtre que beaucoup de libanais attribuent à des commanditaires syriens. Tous ces ingrédients réunis ne vont-ils pas faire exploser la poudrière ? Dès lors, la crainte d'une nouvelle guerre civile peut-elle se justifier ? La présence d'une force armée hors du contrôle du gouvernement et appartenant à une faction religieuse qui associe ses intérêts aux intérêts iraniens est toujours une cause possible pour déclencher une guerre civile. Mais pour le moment, personne ne sait qui va être impliqué dans l'assassinat de Rafic Hariri. Ce qui est important pour nous, c'est que les accusations doivent être basées sur des évidences, des preuves solides et convaincantes pour qu'elles puissent être acceptées. Les menaces continues de déclencher une guerre civile - ou autre - pour contrecarrer le tribunal ne sont pas également une option qui peut assurer le salut national.