La Société nationale des transports ferroviaires SNTF, entreprise publique à caractère industriel et commercial (EPIC), s'est lancée dans un programme ambitieux pour faire du transport ferroviaire l'un des moyens de déplacement les plus importants. alors qu'il est fortement concurrencé par l'aérien et le transport routier, actuellement, les pouvoirs publics veulent cependant inverser la tendance en lançant un vaste programme pour la modernisation des chemins de fer afin de donner à ce secteur ses lettres de noblesse. Délaissé depuis près de trois décennies, le secteur ferroviaire algérien a vu ses équipements devenir obsolètes, diminuant son attractivité auprès des usagers. Conscient de cette situation, l'Etat a décidé de mettre le paquet en dégageant une importante enveloppe qui «servira à la modernisation de l'infrastructure ferroviaire, devenue une nécessité absolue compte tenu de la vétusté de l'infrastructure existante», avait indiqué le directeur général de l'Agence nationale d'études et de suivi de la réalisation des investissements ferroviaires (Anesrif), Hassene Saïdi, dans une déclaration officielle. Pas moins de 16,6 milliards de dollars sont alloués par l'Etat pour la concrétisation du schéma directeur du plan de développement des transports ferroviaires à l'horizon 2025. Avec ces investissements, les pouvoirs publics espèrent ramener, à terme, la part du rail dans le transport national de voyageurs de 5 à 20%, à l'horizon 2015, avec près de 80 millions de personnes transportées, selon les prévisions de la SNTF. Comment s'est construit le réseau ferroviaire algérien La réalisation du réseau de chemin de fer algérien remonte au 19e siècle. Elle s'est faite par étapes successives. Durant la période coloniale, trois programmes ont été initiés par l'administration française. Il s'agit du programme de 1857, de 1879 et celui de 1907. Le premier programme remonte au 8 avril 1857. Il autorise la construction de 1 357 km de lignes. Le 12 décembre 1859, l'armée d'occupation ouvre le chantier de la ligne Alger-Blida. Une entreprise de statut privé‚ appelée «Compagnie des chemins de fer algériens» est créée et prend le relais de l'armée à partir du 11 juillet 1860 pour achever la ligne. Cette compagnie obtient en même temps une concession pour la réalisation des lignes Oran-Sig et Constantine-Skikda, mais elle rencontre des problèmes de financement et seule la ligne Alger-Blida a pu être réalisée et ouverte au service voyageurs le 8 septembre 1862. La poursuite des travaux pour les autres lignes est assurée par cinq compagnies, à savoir la Compagnie Bône-Guelma (BG, la Compagnie de l'Est algérien (EA), la Compagnie Paris-Lyon-Méditerranée (PLM), la Compagnie de l'Ouest algérien (OA) et la Compagnie franco-algérienne (FA) Quant au programme de 1879, il a décrété le classement des lignes en deux catégories : d'intérêt général ou d'intérêt local. Seules les lignes d'intérêt général peuvent bénéficier d'une participation financière de l'Etat pour leur réalisation. Une loi datée du 18 juillet 1879 définit les lignes d'intérêt général et ajoute un programme de 1 747 km de lignes nouvelles au réseau existant. Au cours de la période 1879-1906, les lignes ou tronçons de lignes suivants, totalisant une longueur de 2 035 km, ont été réalisés ou entamés. Il s'agit des lignes Souk Ahras-Tébessa-Le Kouif et embranchement vers la frontière, Aïn-Mokra-Ramdane Djamel, Ouled Rahmoune-Khenchela, El Guerrah-Biskra, Sétif-Thénia avec embranchements vers Tizi Ouzou, Béjaïa et Sour El Ghozlane, Blida-Berrouaghia, Mostaganem-Relizane-Tiaret, Oran-Arzew, Sénia-Témouchent, Sidi Bel Abbès-Tlemcen-frontière et Tabia-Crampel, Mécheria-Béchar, Tizi-Mascara. Le programme de 1907, portant sur 1 256 km de lignes est établi et vient s'ajouter au réseau existant de 3 400 km de lignes ouvertes ou en cours de réalisation. Durant la période 1907-1946, les lignes ou tronçons de lignes suivants, totalisant une longueur de 1 614 km, ont été réalisés. En 1946, le réseau algérien comprend 5 014 km de lignes en exploitation sans compter les embranchements miniers, et les lignes de chemin de fer sur routes (CFRA)Les compagnies concessionnaires ont connu des déficits d'exploitation et l'Etat a racheté les concessions des compagnies franco-algériennes, Est algérien, Bône-Guelma et Ouest algérien en 1900, 1908, 1905 et 1920. Le 27 septembre 1912, est créée la Compagnie des chemins de fer algériens de l'Etat (CFAE) qui prend le relais de l'exploitation des réseaux des concessionnaires à l'exception du réseau PLM. Le 1er juillet 1921, la CFAE et PLM se répartissent les lignes : la PLM exploite la ligne Alger-Oran, et les lignes Oran-Témouchent, SBA-Tlemcen-Oujda-Crampel, Blida-Hassi Bahbah tandis que la CFAE exploite le reste du réseau. Le 30 mai 1938, les lignes CFAE et PLM d'intérêt général sont rattachées à la SNCF récemment constituée, et le réseau algérien en devient une région. Le 1er janvier 1939 est institué un Office des chemins de fer algériens (Office CFA). Le 30 juin 1959, est établie la convention entre l'Etat et l'office CFA. Le 1er janvier 1960 est créée une Société des chemins de fer français en Algérie qui sera régie par la convention de juin 1959 jusqu'au 16 juin 1963, date à laquelle sera créée la Société nationale des chemins de fer algériens (SNCFA). La convention de juin 1959 continuera à régir les relations entre l'Etat et la SNCFA jusqu'au 31 mars 1976, date à laquelle cette dernière a été restructurée en trois entreprises. Les investissements après l'indépendance En 1980, une convention définissant les responsabilités respectives de l'Etat et de la SNTF a été instituée par décret n° 88-128 du 28 juin 1988. Cette convention est toujours en vigueur ; elle reprend certaines dispositions de l'ancienne convention de juin 1959 concernant l'infrastructure et la compensation de service public. Le programme d'investissement de 1980 est considéré comme le plus large programme jamais accordé au secteur. Il a été lancé à partir de 1980 et se caractérise surtout par la modernisation et l'accroissement de la capacité des lignes du réseau, les grands aménagements ferroviaires régionaux et l'extension géographique du réseau. Ce programme a permis les réalisations de nouvelles lignes à savoir : Jijel- Ramdane-Djamel sur une distance de 140 km, la desserte des cimenteries de Beni-Saf et de Saïda sur une distance de 23 km chacune et celle d'Aïn-Touta sur 15 km. Le programme de 1980 a permis surtout un renouvellement complet des voies et ballasts d'une grande partie du réseau, soit un total de 1 400 km de voies. Il a également permis une mise à double voie de tronçons de la rocade nord sur 200 km, l'aménagement, la modernisation et la reconstruction des gares réparties sur le réseau ainsi que l'aménagement ferroviaire des régions d'Annaba et d'Alger. Depuis décembre 1990, la SNTF est dotée d'un statut d'établissement public à caractère industriel et commercial. Ses activités comprennent le transport des voyageurs et des marchandises, la gestion du réseau ferroviaire et la gestion du patrimoine ferroviaire. La SNTF a une organisation décentralisée comprenant les organismes suivants : la SNTF, société nationale chargée de l'exploitation et de l'entretien du réseau ferroviaire ; la SNERIF, société nationale chargée du renouvellement et de l'extension du réseau ferroviaire ; la SIF, société d'engineering et de réalisation d'infrastructures ferroviaires. Cette réorganisation avait pour objectif de séparer les activités d'exploitation et d'entretien de celles du renouvellement et l'extension du réseau. Cette expérience n'a pas atteint les objectifs attendus et les deux sociétés SNERIF et SIF ont été ainsi dissoutes. Un nouveau programme pour remettre le train sur les rails : Outre le projet engagé par la SNTF en collaboration avec le groupe «SNCF International» pour l'assistance technique et le suivi du parc ferroviaire en Algérie, des contacts avancés sont en cours avec l'Institut national des sciences appliquées (INSA) de Lyon (France), pour bénéficier de l'expérience de cet institut dans le domaine de la recherche en mécanique et la sécurité des équipements ferroviaires. Le savoir-faire acquis permettra de proposer des solutions fiables à des problèmes techniques très précis qui surviennent en cours de vie des équipements. L'atout de l'INSA est qu'il propose des prestations de services «clés en main» pour des problèmes techniques auxquels font face, quotidiennement, les mécaniciens de la SNTF. Le programme de modernisation vise essentiellement à parvenir à attirer de 80 millions de voyageurs en Algérie à l'horizon 2015. C'est pourquoi s'imposait, dès 2007, une rénovation des équipements de transport et de traction. La SNTF compte acquérir au cours de cette année 30 locomotives électriques, dont 16 appareils à motorisation diesel pour la traction des wagons de marchandises et 14 autres pour le transport des voyageurs. Le 10 mars dernier, intervient enfin, l'évènement tant attendu qui, comme le souhaite la compagnie nationale, transformera notablement le monde du rail. La mise en service d'autorails intervilles flambant neufs. Les premiers autorails qui ont été mis en circulation assurèrent les dessertes régionales entre Sétif et Alger et entre Tlemcen et Oran et très récemment entre Alger et Chlef en navettes à des horaires bien étudiés correspondant aux besoins de la clientèle. Ces nouveaux autorails d'un confort égal aux meilleurs standards européens sont des trains régionaux qui viennent compléter le maillage des dessertes traditionnelles assurées par la SNTF. Les autorails qui ont relié les villes de l'intérieur aux villes côtières ont facilité la circulation quotidienne des vacanciers vers les plages, offrant, par la même occasion, un transport moderne et performant et procurant aux citoyens qui les ont fréquentés confort et sécurité. A noter que d'autres liaisons seront bientôt desservies par ces autorails au fur et à mesure de leur réception en Algérie. La commande passée par la SNTF auprès du constructeur espagnol CAF des 17 autorails sera entièrement satisfaite au mois de novembre de l'année en cours, date à laquelle les principales villes du pays seront desservies. Le montant de la transaction est de 102 millions d'euros. Il convient de relever que la SNTF compte harmoniser l'ensemble de son parc avec les projets d'acquisition de matériels neufs et réinjecter du potentiel aux voitures, afin de prolonger leur durée de vie pour offrir à toutes les catégories d'usagers du train, des conditions de voyage nouvelles et attractives. Rien n'est négligé dans le cadre de la nouvelle stratégie. La SNTF se donne les moyens de relever le défi. Dans le cadre du programme d'organisation et du positionnement stratégique de la SNTF et conformément à la résolution n° 11/77/21/07/2007 du Conseil des participations de l'Etat du 21 juillet 2007, la SNTF a lancé, par voie de presse en date du lundi 3 septembre 2007, une invitation à manifestation d'intérêt à l'adresse des investisseurs potentiels pour exprimer leur intérêt afin d'acquérir une participation dans sa filiale Infrarail spa. Une SPA dont le capital social de 1 080 000 000 de dinars entièrement libéré, Spécialisée dans les travaux d'infrastructures ferroviaires et routières, notamment les travaux de génie civil et VRD, les travaux de pose de la voie ferrée, les travaux d'entretien de la voie ferrée et les travaux de spécialité béton (bâtiment, ouvrages d'art, aménagement des voies). Pour réaliser son plan de charge, elle dispose de cinq centres de production situés sur des terrains du domaine public ferroviaire moyennant baux à long terme. En plus de ces moyens de production, Infrarail spa dispose d'un parc de moyens modernes de travaux. Alors, l'année 2008 sera-t-elle l'année du rail comme le souhaitent les responsables de l'entreprise ? Vraisemblablement, c'est bien parti. Le train a bel et bien quitté la gare. G. H.