Le Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques (CNRPAH) organise, du 11 au 13 décembre prochains, à Annaba, un colloque international autour du «concept de l'Homo Universalis (el insane el kamil) dans le soufisme opératif», en hommage à l'imam Abou Abbas Ahmed Ibn Ali al-Bûnî. Ce colloque, qui se déroulera dans le cadre du 7ème Festival international «Soufisme, culture et musique», sera marqué par la participation d'une cinquantaine de conférenciers venus d'une vingtaine de pays d'Europe, d'Asie et d'Afrique. L'imam Abou Abbas Ahmed Ibn Ali al-Bûnî, natif de Annaba, est un célèbre savant musulman, devenu illustre en tant que théoricien en théologie et passionné d'astronomie et d'astrologie. Il est l'auteur d'une centaine d'ouvrages, dont les fameux Shams al-ma‘ârif al-kubrâ (le Soleil de la gnose) et Manba‘usûl al-hikma (Les Sources de la Sagesse), et ses écrits continuent d'être étudiés aujourd'hui dans les plus grandes universités du monde. Aux sources du houroufisme Considéré comme un véritable alchimiste, au sens noble du terme, Abou Abbas Ahmed Ibn Ali Al-Bûnî est l'initiateur en Algérie de la philosophie du «houroufisme» qui apparut dans le Caucase vers le XIVe siècle avant de gagner l'Orient. Les organisateurs du colloque soulignent que, tant en Orient qu'en Occident, le «houroufisme» continue de développer de nouvelles conceptions esthétiques, littéraires, poétiques, scientifiques et théologiques et n'aura de cesse d'élargir ses recherches à l'ensemble des branches du savoir et de l'existence : architecture, psychologie, physique, chimie.Parmi les conférences qui seront présentées dans le cadre de ce colloque, citons celles de Zohra Aliyeva de l'Académie des sciences d'Azerbaïdjan intitulée «La Philosophie du houroufisme chez Fazlallah Naîmî», de Cherinne Dafouri de l'université de Damas en Syrie qui présentera «l'Homo Universalis : la femme, la théorie et la pratique chez la savante Adjm Bent El Nafiis», de Yuriy Averyanov de l'Académie des sciences de Russie qui présentera «L'influence des idées houroufies sur les confréries des derviches mendiants dans l'Empire ottoman au XVIe siècle», de Jean-Charles Coulon de l'université Paris, intitulée «L'héritage manuscrit de l'œuvre d'Al-Bûnî» et de l'Algérien Saïd Djaab El Kheir, chercheur en soufisme, qui abordera «La vérité Mohamadia dans l'ouvrage Dalail ElKheiratt d'El Djazouli». Les sommets de la méditation mystique Le professeur Zaïm Khenchelaoui, coordinateur scientifique du colloque, souligne dans l'argumentaire de cette manifestation disponible sur le site du CNRPH que «l'alchimiste algérien Ahmed Al-Bûnî, qui est sans conteste le plus grand cryptologue de l'islam, nous délivre les correspondances des lettres avec les quatre éléments de la nature, avec les sphères célestes et les planètes, avec les constellations zodiacales et les différentes ipséités archangéliques […]. Or, Ahmed Al-Bûnî, dont les textes possèdent la particularité d'être codés, a très tôt conçu l'alchimie comme processus immatériel pouvant conduire à des transformations du subconscient suivant l'adage alchimique : nul ne peut transmuter s'il ne s'est transmuté lui-même».Zaïm Khenchelaoui explique aussi que l'imam Ahmed Al-Bûnî a particulièrement insisté sur la dimension psychologique ou spirituelle, voire initiatique de l'alchimie et ce, bien avant le traité de Blaise Pascal adressé en 1654 à l'Académie des sciences, les remarques de René Descartes, les critiques d'Antoine Lavoisier ou encore le renvoi par Carl Gustav Jung, disciple dissident de Sigmund Freud, des catégories traditionnelles de l'alchimie aux processus psychiques du subconscient. C'est dans cet esprit que plusieurs travaux de ce colloque seront dès lors consacrés à la philosophie du «houroufisme» qui «marque le paroxysme de la méditation mystique sur l'alphabet. Le mouvement tire son nom de l'arabe hurûf (lettres). Il divinise les lettres et les nombres. Pour cette doctrine, les lettres sont au principe de l'univers. Dieu créa le monde au moyen de deux lettres (k) + (n) = (KN) ce qui signifie en arabe “sois”. Les lettres sont en rapport avec l'univers entier […]. Toutes les lettres de l'alphabet, tous les écrits sacrés et Dieu Lui-même sont ainsi présents en Sa Majesté l'Homme considéré comme un modèle réduit de l'univers. Il s'agit là des prémices théoriques de la notion d'Homo Universalis». S. A.