Photo : Riad De notre correspondant à Oran Samir Ould Ali Un peu loin du Festival international du film arabe qui a lieu à Oran, l'Institut pour le développement des ressources humaines (IDRH) a abrité, samedi après-midi, une projection-débat portant sur la situation du cinéma arabe. Animée par El Hadj Bensalah, ancien directeur de la Cinémathèque d'Oran, actuellement consultant en cinéma, la rencontre, qui n'a malheureusement regroupé qu'une dizaine d'amateurs, a débuté par la projection d'un film documentaire fort justement intitulé Etat des lieux du cinéma arabe que le cinéaste algérien Nasser-Eddine Benalia a réalisé lors des 7èmes Biennales des cinémas arabes qui ont eu lieu à Paris en juillet 2004. L'auteur de la Casbah d'Alger et de Karana avait braqué sa caméra sur plusieurs grands - ou moins grands - noms du cinéma ainsi que sur des critiques qui ont établi un diagnostic sans complaisance sur la situation peu enviable dans laquelle se trouvait le cinéma arabe il y a six ans. «Il n'y a pas de politique cohérente de promotion de cinéma dans le monde arabe […], les films arabes, même bons, sont marginalisés, ghettoïsés en Occident […]. En dehors des festivals, il y a un problème de circulation des films […]. Pour ces mêmes raisons, le cinéma algérien se trouve dans l'impasse», résumait notamment le cinéaste algérien Merzak Allouache qui présentait son film l'Autre Monde.De son côté, Paul Balta, écrivain et spécialiste reconnu du monde arabe, a souligné le fait que l'aspect culturel n'était jamais évoqué dans les accords bilatéraux par des Etats arabes plutôt intéressés par le volet économique. «Ces pays-là n'exigent jamais plus de choses en matière de culture parce qu'ils ont peur de l'ingérence de l'autre […]. En matière de cinéma, nous sommes un peu revenus à ce qui se faisait au début du siècle à cause notamment de la pression des mouvements religieux […]. Il faut que la société civile, les associations et les ONG s'impliquent et fassent pression […]. Il y a encore un effort à fournir en matière de salles de cinéma», dira M. Balta.D'autres cinéastes et critiques de différents pays ont exprimé leur détresse devant la situation peu reluisante dans laquelle se trouvent les cinémas arabes, délaissés dans leurs pays, marginalisés et exclus des circuits occidentaux. L'Egyptien Yousri Nasrallah, notamment (assistant du défunt Youcef Chahine, mais surtout réalisateur de Vols d'été ou Mercedes), a attribué cet état au fait que le secteur du cinéma, en Egypte du moins, se trouve entre les mains de personnes complètement étrangères à la culture et que le président Moubarak n'aime pas le cinéma, lui préférant la télévision.Le tableau extrêmement noir du cinéma arabe que tous les intervenants ont brossé (hormis le bémol mis par Paul Balta qui soulignait l'extraordinaire avancée du cinéma iranien lequel s'est hissé au 10ème rang mondial) vaut encore aujourd'hui, six ans après, ont estimé les participants à la projection-débat. «Le cinéma arabe est effectivement confronté à de graves problèmes. Le cinéma algérien plus particulièrement, les voisins marocain et tunisien étant un peu mieux lotis en raison notamment de l'aide de leurs gouvernements respectifs», a estimé El Hadj Bensalah, à l'issue de la projection.Rappelant que, sur les 400 salles de cinéma héritées à l'indépendance, seule une vingtaine fonctionne aujourd'hui plus ou moins normalement, l'ancien directeur de la Cinémathèque d'Oran a appelé les organisateurs du Fifao à faire profiter le public oranais des films en compétition même après la clôture. «Il ne faut pas que les salles Maghreb et Saada ferment après le festival. Il est impératif que les trois salles ouvertes aujourd'hui le restent encore deux ou trois semaines après la fin du festival pour permettre aux Oranais de renouer avec le grand écran», affirme-t-il.