Deux ans après les «émeutes de la faim» qui avaient secoué plusieurs pays en développement, la nouvelle flambée des prix des denrées alimentaires, nourrie par de faibles récoltes, fait craindre de nouvelles tensions dans les pays pauvres. En effet, depuis six mois, les prix des denrées alimentaires n'ont cessé d'augmenter. L'indice mesurant les évolutions de prix d'un panier de céréales, oléagineux, produits laitiers, viandes et sucre est au plus haut depuis sa création en 1990, selon cette organisation de l'ONU pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Il s'est établi à 214,7 points en décembre, du jamais-vu, supérieurs aux 213,5 points atteints en juin 2008, année de l'envolée des prix alimentaires qui avait déclenché des manifestations meurtrières contre la vie chère et l'inflation dans une trentaine de pays dans le monde, principalement en Afrique et en Haïti, selon la même source. La FAO, qui a rendu publics les indices des prix des principaux produits alimentaires, a affiché ses inquiétudes du fait que ces hausses touchent la majorité des habitants de la planète, notamment dans son hémisphère sud. A titre d'exemple, entre décembre 2009 et décembre 2010, les indices des prix des produits alimentaires sont passés de 172 à 215, les huiles et oléagineux de 169 à 263, les céréales de 171 à 238, le sucre de 334 à 398 et celui des viandes de 120 à 142, selon la FAO. Seul l'indice des prix des produits laitiers a connu une relative baisse durant cette période, allant de 216 à 208. Cette hausse est «très inquiétante car elle touche des millions de gens, surtout quand elle concerne des produits de base comme les céréales», expliquent les économistes de cette Organisation onusienne, rapportent les agences de presse. Toutefois, certains experts minimisent l'actuelle crise : «La situation des céréales n'est pas aussi critique qu'en 2007-2008, mais des conséquences plus graves» ne sont pas à exclure dans les prochains mois, en fonction du climat, soutiennent-ils. Quelles sont les différentes causes de ces augmentations vertigineuses ? Pour les spécialistes en la matière, il s'agit des facteurs d'ordre climatique. En effet, la météo a affecté les récoltes dans nombre de pays producteurs. Les inondations en Australie ont «sérieusement dégradé la qualité des céréales», expliquent certains experts. En Russie, autre gros producteur de blé, les incendies de l'été dernier ont conduit les autorités à décréter un embargo sur leurs exportations. «Nous nous orientons donc en ce début d'année 2011 vers une poursuite de la hausse des cours des matières premières agricoles, hausse alimentée également par la demande chinoise qui ne faiblit pas et par les craintes de sécheresse qui se profilent maintenant sur l'Argentine», ajoutent-ils. Face à cette situation, au demeurant alarmante, des manifestations contre les hausses allant jusqu'à 30% de certains produits de première nécessité ont éclaté. Inquiets d'un effet domino, certains gouvernements ont déjà mis en place des mesures préventives pour assurer leur sécurité alimentaire, comme puiser dans leurs réserves ou inciter les banques à accorder des crédits aux paysans. C'est le cas en Inde, en Malaisie ou en Indonésie. S. B.