La justice tunisienne a lancé un mandat d'arrêt international contre l'ancien président Ben Ali et son épouse Leïla Trabelsi. L'ancien président et son épouse, dont la fortune est estimée à plusieurs milliards d'euros et qui contrôlaient le pays d'une main de fer, sont officiellement poursuivis pour «acquisition illégale de biens mobiliers et immobiliers» et «transferts illicites de devises à l'étranger». Le président Ben Ali a fui la Tunisie, le 14 janvier dernier, sous la pression d'une révolution populaire sans précédent, et a trouvé refuge en Arabie saoudite alors que la révolte battait son plein. Son épouse Leïla, considérée comme un personnage primordial dans la mise en coupe réglée de tout un pays, est également en fuite. D'autres personnes du clan familial sont concernées par la justice tunisienne. Belhassen Trabelsi, personnage sulfureux et frère de Leïla Trabelsi, lui aussi en fuite, est également visé par cette enquête ainsi que huit autres membres de la famille Trabelsi détenus en Tunisie. Les mesures visent aussi la garde rapprochée du tyran déchu. Six autres membres de la garde présidentielle, dont l'ancien chef de la sécurité de Ben Ali, l'inamovible général Ali Sériati, sont poursuivis dans le cadre d'une enquête sur les exactions des forces de sécurité contre la population. Homme-clé de la sécurité du Président déchu et à la main lourde, Sériati est considéré comme le commanditaire de la campagne de terreur menée par des miliciens dans les folles heures qui ont immédiatement suivi la chute de l'homme fort de Carthage. Dans une Tunisie qui vit des moments particuliers de son histoire, le souffle de la révolte ne retombe pas. Les caciques de l'ancien régime aux postes principaux (défense, intérieur, justice, affaires étrangères), sont priés de «dégager». Des milliers de travailleurs ont parallèlement entamé une grève à Sfax dans le Sud, la deuxième ville du pays, exigeant ni plus ni moins la démission du gouvernement de transition. Les cinq ministres ayant démissionné la semaine dernière, trois syndicalistes, un opposant et un membre de l'ancien régime, devraient être remplacés. Beaucoup de responsables qui ont servi l'ancien régime et des personnages connus du RCD, le parti devenu symbole de la dictature, sont toujours sur la scène, une situation mal acceptée par le peuple tunisien. Ghannouchi, dernier en date des Premiers ministres de Ben Ali, occupant le poste durant onze ans, est également très contesté par les protestataires. Ces derniers réclament son départ comme symbole d'ouverture d'une nouvelle page dans l'histoire de la Tunisie. M. B.