En octobre 2010 plus de 600 Congolaises - femmes et jeunes filles - auraient été violées à la frontière entre la République démocratique du Congo (RDC) et l'Angola à l'occasion d'une opération d'expulsion massive d'immigrants illégaux de l'Angola. D'après des responsables de l'ONU, une femme est décédée des suites de lésions internes causées par la violence.Ce mois-là a également marqué le 10e anniversaire de l'adoption par le Conseil de sécurité de l'ONU du texte historique de la résolution 1325 sur les femmes, la paix et la sécurité. Elle réaffirmait le rôle crucial des femmes dans la prévention et la résolution des conflits, et la consolidation de la paix et visait à protéger les femmes et les jeunes filles de la violence, en particulier la violence sexuelle en situation de conflit et d'après-conflit.Dix ans plus tard, les femmes et les jeunes filles sont toujours persécutées dans les conflits armés. D'après le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, la violence sexuelle demeure l'une des tactiques de guerre les plus répandues et se perpétue bien après la fin des hostilités. L'an dernier, rien qu'en RDC, plus de 8 000 femmes ont été violées au cours d'affrontements entre belligérants, affirme le Fonds de l'ONU pour la population. «Ce qui nous inquiète, confie Maurizio Giuliano, porte-parole du bureau de l'ONU pour la coordination des affaires humanitaires, est que le viol semble devenir endémique dans plusieurs régions du Congo…Nous craignons qu'il devienne courant.»De telles agressions sur les femmes sont «malheureusement un moyen très efficace, bon marché et silencieux avec des incidences durables sur la société, affirme Margot Wallström, représentante spéciale de l'ONU sur les violences sexuelles en période de conflit. C'est un moyen de montrer qu'on est fort et tout puissant. Le viol terrorise la communauté toute entière. Il envoie aussi un message aux hommes : «Vous n'êtes pas capables de défendre vos femmes». Ouvrir de nouvelles voies Depuis des années, des organisations de la société civile et des groupes de femmes s'efforcent inlassablement d'inciter la communauté internationale à réagir au traitement brutal et inhumain des femmes et des jeunes filles pendant les conflits armés. La Conférence mondiale sur les femmes, qui s'est déroulée en 1995 à Beijing, a souligné que la pleine participation des femmes dans le processus de prise de décisions est indispensable à la prévention et à la résolution des conflits et au maintien de la paix et de la sécurité.Ensuite, le 31 octobre 2000, la résolution 1325 du Conseil de sécurité a fixé le cadre directeur des actions et des politiques de l'ONU relatives aux femmes, à la paix et à la sécurité. Pourtant, s'il est vrai que la résolution a contribué à sensibiliser les institutions, les Etats membres de l'ONU et les groupes de la société civile à cette question, force est de constater que les réalisations dans ce domaine sont rares, souligne un récent rapport du Secrétaire général au Conseil de sécurité. Mesures concrètes Certains pays africains ont néanmoins pris des mesures concrètes. En décembre 2008, l'Ouganda a lancé un plan d'action national pour la résolution 1325 et adopté des politiques systématiques d'action positive, exigeant notamment que chaque département soit représenté par au moins une déléguée au Parlement et que chaque conseil local compte au moins un tiers de femmes parmi ses membres. Le Kenya réserve 47 sièges aux femmes dans son Assemblée nationale et 16 dans son Sénat, en plus des représentantes élues dans différentes circonscriptions. Les autorités s'efforcent, par ailleurs, d'augmenter le nombre de femmes qui participent aux missions de maintien de la paix.Le ministère namibien pour l'Egalité des sexes et le Bien-être de l'enfant propose des stages de sensibilisation des personnels des ministères de la Défense et de la Protection et de la Sécurité à leurs obligations juridiques conformes à la résolution 1325, notamment en matière de consolidation de la paix, de résolution des conflits, de violence sexuelle, de viol et de droits de l'enfant. Un plan d'action national du Burundi préconise la mise en place de politiques favorables à l'égalité des sexes et contribue à l'augmentation du nombre de femmes aux fonctions gouvernementales. Au Rwanda voisin, un plan similaire a été rédigé en mai 2010 prévoyant l'application d'une disposition constitutionnelle au terme de laquelle 30% au moins des postes de responsabilité sont attribués aux femmes. Préalablement, la participation des femmes dans le corps législatif du pays a atteint les 56%, taux le plus élevé du monde. Mission de maintien de la paix Trois ans après l'adoption de la résolution 1325, le Département de l'ONU pour les opérations de maintien de la paix (DPKO) a produit du matériel de formation visant à sensibiliser les militaires et le personnel de la police civile à la question de l'égalité des sexes avant leur déploiement. Cette initiative a été suivie de la mise en place de programmes continus de sensibilisation sur le même sujet pendant toute la durée des opérations de maintien de la paix. L'ONU a également invité les Etats membres à accroître la participation des femmes comme soldats de la paix, notamment aux postes de commandement. Compte tenu de la vulnérabilité persistante des femmes et des filles à la violence sexuelle et sexiste en Afrique, le DPKO a également encouragé les pays africains à adopter des législations protégeant les droits des femmes, notamment pour ce qui concerne la violence sexuelle en RDC, le viol au Liberia et les droits de succession en Sierra Leone. Plusieurs missions de maintien de la paix de l'ONU en Afrique ont encouragé la constitution de cellules spéciales de la police nationale chargées de lutter contre la violence sexuelle et sexiste, notamment au Liberia et en Sierra Leone. Dans la région du Darfour soudanais et en RDC, les forces de l'ONU ont multiplié le nombre de patrouilles pour prévenir la violence sexuelle. L'ONU a néanmoins du mal à faire appliquer la résolution 1325. Le Secrétaire général fait remarquer qu'en dépit de l'intensification des efforts depuis plusieurs années, «ces actions manquent d'une vision claire et d'objectifs et de buts limités dans le temps permettant d'accélérer la mise en œuvre et de définir les responsabilités».D'après le Programme de l'ONU pour le développement (PNUD), le financement insuffisant des programmes pour l'égalité des sexes explique les occasions manquées. L'administratrice du Pnud, Helen Clark, a souligné à l'occasion du lancement en octobre d'une Foire de la paix de cinq jours consacrée aux femmes, à la paix et à la sécurité, que la mise en œuvre de la résolution ne nécessite pas simplement des programmes concrets et limités dans le temps, mais aussi des ressources. Il appartient aux gouvernements et à l'ONU, a-t-elle dit, de «conformer leurs actes à leurs paroles». M. A. In Afrique Renouveau, magazine de l'ONU