Et l'on continue à parler football. Comme si le sport roi ailleurs pouvait mériter encore quelques bribes de ce statut en Algérie. Le football par-ci, le football par-là et le football partout. A grosses manchettes souvent racoleuses et en manque flagrant de véritables scoops et sensations à écouler, dans les potins qu'il confectionne par le génie populaire à pouvoir toujours trouver quelque chose à raconter et à atténuer le drame de la routine, dans les chiffres à plusieurs zéros qui bâtissent les montants des transferts incessants de joueurs et entraîneurs, dans les injures qui fusent de partout et dans tous les sens, dans les soupçons de combine et corruption mi-confirmés mi-démentis, dans la destruction des biens publics… Le football est partout ailleurs et nulle part sur un terrain de football, lorsque des joueurs jouent à tout et à n'importe quoi sauf au ballon : des coups francs à la douzaine à tout instant, des contestations de décisions d'arbitre, des gestes antisportifs, des mains qui gesticulent inlassablement et des pieds noués par l'incapacité d'être footballeur, des lignes de touche où les ramasseurs de balle sont des supporters du club qui joue chez lui, des photographes aussi supporters qui s'oublient à exulter à défaut de pouvoir immortaliser quelques instants éclair d'une rencontre morne à mourir de chômage… Mais qu'est donc le football sinon qu'une image parmi tant d'autres de ce qu'est tout un environnement, de ce que sont nos réflexes, nos défauts, nos bévues et même nos tricheries ailleurs. A l'école, dans la rue, au boulot, chez soi et n'importe où… Nos footballeurs seraient-ils donc des individus issus du pays de Chelsea et Manchester pour qu'on exige constamment d'eux qu'ils soient ce que nous ne sommes pas ? Ne sont-ils pas finalement le reflet de ce qu'ils auraient pu être ailleurs loin du football, loin des yeux de tout le monde, des médias, des spectateurs et téléspectateurs. A l'abri de la critique et de la remise en cause des masses. Réformer le football, c'est bien, mais réformer avant d'arriver au football, c'est assurément mieux. Et durable surtout. L. I.