Le Bahreïn, petit Etat du Golfe, vit des heures difficiles. Les protestations de rue se font de plus en plus prononcées et la répression policière de plus en plus rude. Les manifestations ont éclaté lundi dernier dans les villages chiites sur l'initiative d'internautes qui ont appelé sur Facebook à manifester pour réclamer des réformes politiques et sociales. Les soulèvements populaires en Tunisie et en Egypte continuent à produire leurs effets à Bahreïn, pays à majorité chiite. Cet Etat fait figure de parent pauvre à côté des autres monarchies pétrolières de la région, ses réserves de pétrole étant pratiquement taries et la structure sociale du pays semble désormais constituer un danger pour l'intégrité territoriale. Les réseaux sociaux sur Internet jouent particulièrement un rôle majeur dans la mobilisation de la contestation. Les internautes ont appelé sur Facebook à poursuivre les manifestations, notamment à une forte participation aux obsèques des victimes. Le bloc chiite au Parlement, le mouvement al-Wefaq qui compte 18 élus sur 40 sièges, a annoncé avoir suspendu sa participation à l'assemblée en raison de la répression «sauvage» des manifestants qui réclament des mesures du gouvernement pour calmer la situation. Un jeune manifestant a succombé, lundi dernier, à ses blessures lors de la dispersion d'une manifestation dans le village chiite de Diya, à l'est de Manama. Le ministère de l'Intérieur annonce l'ouverture d'une enquête pour savoir si la police avait «eu un recours injustifié aux armes». Cette dernière a fait usage de gaz lacrymogènes pour disperser des centaines de manifestants dans plusieurs villages chiites, dont Darraz, à l'ouest de Manama, Sitra dans l'est, Balad Al-Qadim et Jed Hafs au centre. Un deuxième manifestant chiite a été tué par une «balle à fragmentation» lors de la dispersion d'un rassemblement à Manama. Outre la Chambre, qui dispose de pouvoirs limités, le Parlement comprend un Conseil consultatif dont les 40 membres sont désignés par le roi et qui peut bloquer toute initiative émanant de l'assemblée élue. La révolte des chiites pourrait être particulièrement violente étant donné que les antécédents sont loin de manquer. Entre 1994 et 1999, le Bahreïn avait été le théâtre de violences extrêmes animées par des chiites, qui avaient fait une quarantaine de morts. Les chiites s'estiment discriminés au niveau de l'emploi, des services sociaux comme l'habitat et des services publics. La question chiite reste centrale au Bahreïn. A plusieurs reprises, le pouvoir sunnite en place a sévèrement réprimé des rebellions d'une population majoritairement chiite. Ces tensions sont souvent interprétées dans un cadre géopolitique régional. M. B.