Les perspectives de changement politique en Algérie et la situation sociale et économique du pays ont fait l'essentiel des interventions du secrétaire général du Rassemblement national démocratique (RND) et Premier ministre, M. Ahmed Ouyahia, lors d'un passage mercredi soir à l'émission "Hiwar Essaâ" de la télévision nationale, réservée aux responsables de formations politiques. M. Ouyahia a, à cette occasion, réitéré la position de son parti qui s'oppose à l'idée d'une assemblée constituante, comme avancée par certains partis politiques, affirmant que l'Algérie "ne connaît pas actuellement une crise politique". Il a souligné que le recours à une assemblée constituante "ne peut intervenir que dans des circonstances bien précises, comme dans le cas d'une crise politique ou d'une paralysie du fonctionnement des institutions politiques", a-t-il expliqué. La Constituante "ne ressuscitera pas les victimes de la tragédie nationale ni les morts de 1963", a dit M. Ouyahia, en référence au terrorisme des années 1990 et à ce qu'on appelle la "crise du FFS". Il a également mis en doute la capacité d'une assemblée constituante, dans la situation et la composante politique actuelle du pays, d'aboutir à un consensus sur un régime politique à adopter. M. Ouyahia a indiqué que, pour l'heure, son parti était un partisan "convaincu" du régime présidentiel. Prié de donner son avis sur les positions épistolaires exprimées par certaines personnalités, comme Hocine Ait Ahmed ou Abdelhamid Mehri, sur leur vision du changement politique en Algérie, il s'est contenté de s'interroger sur "l'importance" de ces initiatives. Par ailleurs, l'invité de la télévision nationale a admis l'existence de tensions sociales en Algérie, à cause notamment, a-t-il dit, d'un "manque de transparence dans la communication" et un "problème de transmission" et non pas à un déficit de réalisations. Chiffres à l'appui, M. Ouyahia a tenu à rappeler les réalisations enregistrées par le pays dans différents domaines ces dernières années. "Il faut laisser le temps au temps et chaque chose viendra au moment opportun car il y a une réalité politique connue de tous en Algérie, qui a besoin de panser ses blessures", a-t-il dit à propos de l'agrément de nouveaux partis politiques, suspendu de fait ces dernières années. A la question de savoir si une réunion de la tripartite gouvernement-UGTA-patronat était envisagée, M. Ouyahia a répondu qu'il n'y avait pas "urgence" à la tenir et qu'elle interviendra "en temps voulu"Concernant les critiques formulées par le Mouvement de la société pour la paix (MSP) concernant le fonctionnement de l'alliance présidentielle, il a rappelé que ce pôle politique avait été créé "sur une base volontaire et souveraine" avant d'ajouter: "si le MSP n'est pas satisfait il n'a qu'à se retirer en 2012" de l'alliance. M. Ouyahia a toutefois assuré que les trois partis qui constituent ce pôle (FLN, RND et MSP) "continueront à travailler ensemble". M. Ouyahia a par ailleurs démenti les rumeurs faisant état de sa démission après les évènements qu'a connus le pays début janvier et qu'il attribue, en grande partie, à des "gens hostiles à des mesures d'assainissement économiques et bancaires comme l'utilisation du chèque dans les transactions commerciales". M. Ouyahia a fustigé, à l'occasion, "l'alliance entre la mafia financière avec les barons" du commerce, précisant que ce phénomène était apparu avec l'adoption par le pays de l'économie de marché dans les années 1980. Il s'est interrogé sur le sort des milliards de dinars qu'imprime la Banque centrale, étant donné que des sommes colossales circulent hors des circuits bancaires. La Banque d'Algérie imprime, depuis octobre dernier, quelque 18 milliards de DA par jour contre 10 milliards de DA auparavant, a-t-il informé. Sur la lutte contre la corruption, M. Ouyahia s'est limité à dire qu'il fallait faire confiance à la justice. Par ailleurs, l'invité de la télévision a écarté toute idée d'échec de la politique économique mais admet l'existence de "lacunes", expliquant que le gouvernement tient à utiliser de la meilleure manière les revenus des hydrocarbures pour la relance de l'économie. M. Ouyahia a annoncé que de nouvelles mesures à caractère social et économique seront prochainement révélées, ajoutant que ces mesures s'inscrivaient en prolongement de celles déjà arrêtées par le conseil des ministres lors de sa réunion du 22 février dernier. Ces mesures, même si elles vont constituer une charge supplémentaire pour le trésor public, se justifient car "la stabilité du pays n'a pas de prix", a-t-il soutenu. Au plan international et concernant la situation en Libye, M. Ouyahia a indiqué que la position de son parti "ne peut différer de celle, officielle, de l'Algérie", qui refuse toute ingérence étrangère dans les affaires internes du pays. "La question libyenne concerne le seul peuple libyen", a-t-il dit, rappelant que l'Algérie était contre l'usage de la violence dans les règlements des conflits et contre toute intervention militaire étrangère. Il a fait part de l'inquiétude de l'Algérie concernant l'avenir de la Libye et son intégrité territoriale.