Plus de deux mois après le soulèvement des Egyptiens, des dizaines de milliers de manifestants se sont rassemblés hier sur l'emblématique place Tahrir, dans le centre du Caire, pour appeler à «sauver la révolution» qui a renversé le président Hosni Moubarak et à purger le pays des restes de l'ancien régime. Sur la place, 15 000 personnes ont participé à la grande prière du vendredi et 30 000 étaient rassemblées en fin d'après-midi, a rapporté l'agence officielle Mena. Les Egyptiens sont bien décidés à aller au bout de la révolution. «Le peuple veut purifier le pays», «maréchal, maréchal, la légitimité vient de Tahrir», criaient des manifestants en référence au maréchal Hussein Tantaoui, le chef du Conseil suprême des forces armées qui gère le pays depuis la démission, le 11 février, sous la pression de la rue, de Moubarak. «Le peuple veut limiter les pouvoirs du Président et une république parlementaire», proclamait une pancarte au milieu des drapeaux égyptiens mais aussi yéménites, tunisiens et libyens. Le rassemblement se déroulait dans une ambiance de kermesse, sans qu'aucune présence policière ou militaire soit visible aux abords de la place. La «coalition des jeunes de la révolution», qui rassemble les groupes ayant lancé le soulèvement contre Moubarak, avait appelé cette semaine à une nouvelle manifestation, exigeant en particulier que les responsables des tirs contre les manifestants et les symboles de la corruption soient jugés au plus vite. Les jeunes militants pro-démocratie demandent aussi que les institutions soient «purifiées» des éléments du Parti national démocrate, l'ancien parti au pouvoir, et que «les milliards volés au peuple» soient rendus. La justice égyptienne a interdit à plusieurs anciens ministres, responsables et hommes d'affaires de quitter le pays et a gelé leurs avoirs en attendant les résultats des enquêtes pour corruption ou détournement de fonds. En février dernier, Hosni Moubarak et sa proche famille avaient fait l'objet d'une mesure similaire. L'armée a annoncé cette semaine que le président déchu était en résidence surveillée en Egypte. Mais les militants pro-démocratie, qui disent craindre un retour en arrière et la «confiscation» de la révolution, tiennent à maintenir la pression sur les forces armées et le gouvernement chargé de gérer les affaires courantes, pour que toutes leurs revendications soient satisfaites. Ils protestent ainsi contre un projet de loi interdisant les manifestations pouvant perturber le travail. Après un référendum sur des amendements à la Constitution, le 19 mars, les Egyptiens se rendront de nouveau aux urnes en septembre pour des élections législatives. La présidentielle doit avoir lieu «un ou deux mois» plus tard, selon l'armée. R. I.