Synthèse de Ghada Hamrouche Plus d'un an après le séisme dévastateur qui a frappé le pays, c'est une élection qui met du baume au cœur des Haïtiens. A 50 ans, le chanteur Michel Martelly a remporté l'élection présidentielle avec 67,5% des suffrages, contre l'ex- première dame, Mirlande Manigat, qui a obtenu 31,7% des voix, selon les premiers résultats du scrutin annoncés par le Conseil électoral provisoire (CEP). Les résultats définitifs seront connus le 16 avril. En attendant, le score de Michel Martelly a donné lieu à des scènes de liesse dans la capitale, Port-au-Prince, dès son annonce lundi soir. Michel Martelly, si les chiffres sont confirmés, succédera au président sortant René Préval que la Constitution empêchait de se représenter. Le premier tour de l'élection, le 28 novembre, avait été marqué par la désorganisation, des violences et des fraudes. Michel Martelly avait dans un premier temps été exclu de la course, ce qui avait déclenché trois jours d'émeutes, paralysant la capitale Port-au-Prince. L'Organisation des Etats américains (OEA), qui avait envoyé des observateurs, avait demandé l'exclusion du candidat gouvernemental Jude Célestin du second tour, avalisée par la Commission électorale provisoire (CEP). Mirlande Manigat était arrivée en tête du premier tour mais Michel Martelly avait depuis gagné en popularité. Les deux ont présenté des programmes semblables : reloger les 800 000 sinistrés qui vivent toujours dans des «camps d'hébergement temporaires» après le séisme dévastateur de janvier 2010 ; relancer la reconstruction, à l'arrêt ; rebâtir l'économie; favoriser l'éducation dans un pays où la moitié seulement des enfants va à l'école ; combattre le choléra, qui sévit toujours. Agé de 50 ans, «Sweet Micky» Martelly était jusqu'à présent connu pour être un des maîtres du compas, un style de musique haïtien proche du merengue, dansant et très populaire. Il a longtemps joué de sa réputation de fêtard provocateur, amateur de jurons et consommateur de marijuana ou de cocaïne. Un passé révolu, a-t-il souligné durant la campagne électorale. Commentant les premiers résultats de l'élection, il a promis, dans un message sur Twitter, de «travailler pour tous les Haïtiens. Ensemble, c'est possible». Mirlande Manigat n'a pas fait de déclarations pour le moment. Les défis qui attendent Michel Martelly sont énormes. Il devra, entre autres, composer avec un Sénat et une Chambre des députés contrôlés par le parti de M. Préval et la colère suscitée par les retards dans la reconstruction du pays à la suite du séisme de janvier 2010. En succédant à René Préval, Michel Martelly, dont la femme a joué un grand rôle dans la gestion de sa carrière et pendant sa campagne, va prendre la tête d'une administration amputée après le séisme dévastateur du 12 janvier qui avait fait près de 250 000 morts. Comme un symbole, le palais présidentiel détruit par le séisme n'a toujours pas été reconstruit. Il trouvera aussi un pays qui fait face aux démons du choléra qui a fait près de 5 000 morts et à ceux de ses anciens présidents de retour d'exil. Le second tour a en effet été marqué, quelques jours avant le scrutin, par le retour en Haïti de l'ancien président Jean-Bertrand Aristide après avoir été chassé du pouvoir et sept ans d'exil. Deux mois plus tôt, c'était l'ancien dictateur Jean-Claude Duvalier qui avait regagné le pays après 25 ans d'exil en France.