De notre correspondant à Tizi Ouzou Malik Boumati La rentrée scolaire est dans quelques jours et les bambins se préparent déjà, dans l'enthousiasme, à aller rejoindre les bancs de l'école, avec le bonheur de retrouver leurs camarades ou d'en connaître de nouveaux dans le cas des élèves qui ont changé d'établissement. Mais, c'est un enthousiasme que l'on ne trouve pas chez les parents, dépouillés par un été très dépensier (vacances et fêtes) et un mois de Ramadhan qui n'a pas perdu sa réputation de grand budgétivore. C'est que la rentrée scolaire n'a rien à envier à la saison estivale et au mois de Ramadhan en matière de dépenses, avec notamment les fournitures scolaires qui coûtent de plus en plus cher et les ouvrages scolaires qui ont perdu leur gratuité depuis des années déjà. Le citoyen, particulièrement celui qui arrive difficilement à nourrir ses enfants, affronte cette année quatre événements budgétivores, presque au même moment (saison estivale, Ramadhan, rentrée scolaire et Aïd El Fitr). Cela s'applique également aux citoyens de la wilaya de Tizi Ouzou dont la pauvreté devient de plus en plus aiguë et visible du fait principalement de la quasi-inexistence des activités économiques dans la wilaya. En effet, les parents d'élèves ne savent plus que faire, tant les dépenses deviennent de plus en plus insupportables. Ali, un fonctionnaire de la mairie et père de trois enfants dont deux scolarisés, semble avoir trouvé la parade. Pour lui, aucune dépense ne sera tolérée à l'occasion de l'Aïd. «Je vais trouver les moyens de leur offrir tout ce dont ils auront besoin à l'école et si ce n'est pas trop cher, je pourrai peut-être leur acheter quelque vêtements», dit-il avec une certaine amertume. A l'image de ce fonctionnaire, beaucoup de citoyens, pour ne pas dire la quasi-totalité, ont décidé de limiter les dépenses à l'occasion des événements budgétivores qui se succèdent à un rythme rapide pour le budget des ménages. Notre interlocuteur ne cache pas sa volonté d'attendre quelques jours avant d'acheter les fournitures scolaires pour ses deux enfants scolarisés. «J'attends de savoir si les trabendistes des trottoirs vont proposer les articles scolaires, parce qu'avec eux, je suis sûr de payer nettement moins qu'en les achetant dans les librairies», affirme-t-il sans hésiter, tout en se disant «conscient qu'avec les produits chinois qui sont écoulés en Algérie, il existe forcément un risque pour la santé de mes enfants». Et Ali, il importe de le relever, n'est pas unique dans cette situation puisque de nombreux autres pères et mères de famille souffrent également de ce chevauchement de fêtes budgétivores. C'est aussi le cas de Saïd, un enseignant de 45 ans et père de trois enfants scolarisés. Il dit avoir fait le tour des librairies de Tizi Ouzou pour se renseigner sur les prix. Des prix qui varient entre 400 et 500 dinars le trousseau pour les élèves du cycle primaire et qui avoisinent les 600 dinars pour ceux du cycle moyen. Cela sans compter le cartable. Des prix confirmés par un libraire de l'avenue Abane Ramdane de la ville des Genêts. Première résolution de Saïd : il n'est pas question qu'il achète des cartables pour ses enfants qui devraient garder ceux de l'année dernière, surtout que les ouvrages scolaires vont lui coûter les yeux de la tête. En effet, pour ses trois enfants, il est appelé à débourser environ 6 000 dinars rien que pour les livres scolaires et s'il doit leur offrir de nouveaux vêtements, il sentira le poids de la facture qui sera bien plus lourde. D'où la seconde résolution qui consiste à ne rien acheter à l'occasion de la fête de l'Aïd el Fitr, le Ramadhan ayant déjà fortement entamé budget et économies. «Mais, je reconnais que j'y ai pensé à l'avance», dit Saïd qui affirme avoir choisi de passer des vacances pas trop chères pour pouvoir affronter «ce mois de septembre de toutes les dépenses». En fait, beaucoup de familles à Tizi Ouzou ont tout simplement choisi de ne pas aller en vacances pour faire un maximum d'économies afin de pouvoir faire face à ce mois de septembre qui était attendu, la peur au ventre. Beaucoup d'entre elles attendent de savoir si le commerce informel proposera des articles scolaires pour réduire les dépenses. Mais jusqu'à lundi dernier, les rues de Tizi Ouzou sont restées désespérément vides de fournitures scolaires, contrairement aux années précédentes, au grand dam de ces familles mais aussi au grand bonheur des commerçants qui activent dans la légalité ainsi que pour l'économie locale. Surtout que cette année aucune foire n'a ouvert ses portes à l'occasion de cette rentrée scolaire 2008/2009. Des foires squattées généralement par des grossistes qui n'arrivent pas à écouler leurs marchandises ou même certains commerçants qui semblaient exprimer leur ras-le-bol devant l'étalage de fournitures scolaires sur tous les trottoirs de la ville. Le fait qu'ils soient contents cette année qu'il n'y ait pas de vente informelle est plus que légitime, en espérant que cette situation se propagera à tous les autres produits pour que le commerce serve effectivement l'intérêt public. Mais ça, c'est une autre histoire…