Photo : Sahel Par Amel Bouakba Le parc d'attractions de Ben Aknoun respire la morosité et semble à l'agonie. Cette vaste étendue verdoyante qui faisait le bonheur des petits comme des grands est dans un sale état. Situé sur une superficie de 304 hectares au cœur d'un écrin de verdure luxuriant, cet espace de loisirs créé en 1982 offre aujourd'hui une bien désolante image. Réparti en deux espaces, un pour les animaux et un autre pour les attractions, le parc vit ses plus mauvais jours. Tout tombe en ruine. Faute d'entretien, de nombreux animaux ont péri, d'autres amaigris ne tiennent pas sur leurs pattes. Il n'en reste que très peu, comme à l'image de quelques antilopes, qui derrière leurs cages, fixent les visiteurs, le regard triste. Les animaux ont, hélas, perdu toute leur majesté dans un environnement délabré et sale. Le parc de Ben Aknoun est devenu au fil du temps un véritable mouroir pour animaux. Les manèges sont, eux aussi, dans un piteux état. Certains ne fonctionnent plus, comme le manège à sensations, le grand huit, qui est depuis quelques années à l'arrêt. D'autres sont dans un état de dégradation. Sur place, tous les manèges sont vétustes. Dès l'entrée du parc côté attractions, une odeur âcre se dégage des sanitaires dont l'utilisation est fixée à 20 DA. Les tarifs d'accès au parc et aux manèges ont doublé. Passé les portes d'entrée, le visiteur est frappé par l'état lamentable des lieux. Les jeux d'attraction sont plus que vétustes, la peinture s'est effritée, les grillages sont rouillés, le parc sent la grisaille… «Les manèges n'ont pas été remplacés depuis près de trente ans, soit depuis que le parc a ouvert ses portes», nous dit un agent de sécurité. «Quant aux animaux, ils sont mal nourris et mal soignés et ils finissent généralement par mourir», déplore-t-il. L'insalubrité des lieux est affligeante. Le manque flagrant d'hygiène dans les fast-foods et cafétérias situés dans ce parc est alarmant. C'est l'anarchie totale. Ici, la propreté est loin d'être une préoccupation. Il n'y a pas que l'abandon auquel il est voué qui décourage les familles de s'y rendre. Ce parc qui drainait jadis un monde fou est devenu avec le temps le lieu de prédilection des couples qui recherchent quelques endroits intimes, s'exhibant de façon «impudique» et faisant fuir les familles qui y viennent à la recherche de quelques moments de détente.Beaucoup d'entre elles redoutent de se rendre au parc de Ben Aknoun car il est devenu mal fréquenté. Quelques-unes rencontrées sur place déplorent l'état d'abandon total dans lequel il se trouve aujourd'hui. «C'est bien dommage, il n'y a plus grand-chose à voir ici. Où sont passés les animaux, les manèges sont complètement délabrés, d'autres ne fonctionnent plus», demandent des parents accompagnant leurs bambins. «Nous craignons même pour la sécurité de nos enfants tant les manèges montrent leur état de défectuosité», ajoutent-ils. «L'image actuelle qu'offre le parc est loin d'être celle qu'on avait connue au moment de son ouverture, il y a près de trente ans», confie, nostalgique, la jeune maman. «J'ai un haut-le-cœur à chaque fois que j'y viens», dit-elle. Les visiteurs ne comprennent pas pourquoi tant de négligence et de laxisme à l'égard d'un espace aussi magnifique qui mérite plus d'attention et qui doit d'être réhabilité. Que fait le ministère de l'Agriculture dont dépend le parc de Ben Aknoun ? Pourquoi n'y a-t-il pas d'actions de rénovation ? s'interroge-t-on. Des questions qui resteront sans réponse. Nous avons tenté de nous rapprocher des responsables de la gestion du parc, mais ces derniers étaient réunis en conseil d'administration à l'hôtel Moncada. Les employés du parc que nous avons rencontrés sur les lieux se disent, pour leur part, impuissants devant la déliquescence qui a fait de ce lieu ce qu'il est. D'ailleurs, ils affirment ne pas être mieux lotis que les bêtes abritées par le parc. Ils se plaignent d'«une situation socioprofessionnelle déplorable». La protestation qui n'épargne aucun secteur ni aucune corporation couve ici. Les travailleurs menacent, en effet, de faire grève pour revendiquer une augmentation salariale. «Nos salaires sont dérisoires», nous ont-ils expliqué. Ils interpellent leur tutelle, en l'occurrence le ministère de l'Agriculture, pour prendre en charge leurs doléances. Ecœurés par leur situation, ils n'en sont pas moins émus par l'état dans lequel se trouve le parc d'attractions, leur outil de travail et leur seul gagne-pain, et, en même temps, «un joyau» dont devraient profiter tous les Algériens. Là aussi, ils en appellent au ministre de l'Agriculture et à tous les pouvoirs publics pour des mesures urgentes pour la réhabilitation de ce parc, livré à lui-même et en état de décrépitude avancé. D'autant qu'il y a un manque grave d'espaces verts et de lieux de divertissement publics. Le peu d'espace qu'il y a à Alger est mal entretenu. De nombreux jardins sont abandonnés, au moment où la population aspire à la détente dans des lieux appropriés. Ces derniers sont transformés en décharges sauvages, au vu et au su des autorités locales qui laissent faire, alors que leur rôle est de les réhabiliter et de les protéger. Les APC brillent par leur inaction et leur passivité. Récemment rénové et ouvert au public, le jardin d'Essais, véritable joyau de la nature, demeure le seul espace vert digne de ce nom qui soit encore en état d'être visité. Les familles y viennent de partout, des excursions y sont organisées pour les écoliers. Reste toutefois à espérer que cette merveille pourra être préservée.