De notre envoyé spécial à Cannes H. Mohamed Le jury officiel du 64e Festival de Cannes, présidé par Robert de Niro, a dévoilé dimanche dernier son palmarès lors de la cérémonie de clôture au grand Théâtre Lumière. Le rideau est tombé donc sur la Croisette en révélant son palmarès après deux semaines de compétition acharnée, de montées de marches, de soirée strass et paillettes et mondanités bling-bling sous le soleil de plomb de la Croisette.La présidente d'honneur, Mélanie Laurent, a accueilli Jane Fonda sur la scène du Grand Théâtre pour remettre la Palme d'or au meilleur des 20 films qui concouraient en compétition. Le film de clôture les Bien-Aimés de Christophe Honoré, avec Catherine Deneuve, Chiara Mastroianni, Ludivine Sagnier, Louis Garrel et Milos Forman, a été projeté à l'issue de cette prestigieuse cérémonie qui fera couler beaucoup de larmes et émouvoir plus d'un. Ainsi, la Palme d'or est revenue au film du genre, inclassable de surcroît et que d'aucuns comparent à un objet filmique non identifié, The Tree of life (L'Arbre de vie) réalisé par Terrence Malick. «Nous avons senti que c'était «le» film à primer et qui méritait ce titre, de par sa grandeur, l'ampleur de ses intentions qui semblaient correspondre à l'esprit de la Palme d'or, sans négliger la qualité des autres films», a déclaré Robert de Niro lors d'un point de presse après la cérémonie de clôture. Un sentiment partagé par les autres membres du jury, notamment les comédiens Jude Law, Emma Thurman, le réalisateur Tchandin Haroun Mamt Salahet et le Français Olivier Asayas. «Les discussions étaient passionnées. Mais nous avions un président démocratique», dira Emma Thurman avec le sourire. The Tree of life est une histoire de famille qui se retrouve un jour bouleversée par un événement précaire qui viendra tout remettre en question. Le grand prix a été attribué en ex aequo aux films le Gamin au vélo de Jean-Pierre Dardenne et Luc Dardenne et Once Upon in Anatolia de Nuri Bilge Ceylan. Le prix de la mise en scène, quant à lui, est revenu à Nicolas Winding Refn pour Drive, dont la suite est prévue à l'automne prochain. Le prix du jury a été attribué à Poliss réalisé par Maiwenn, qui joue également dans son film. Un prix qu'elle a dédié à toute son équipe et ses partenaires des premiers jours, qui l'ont vue accéder aux premières marches de la gloire petit à petit, de la pièce de théâtre autour de sa mère jusqu'à ses trois films. Un univers de flicaille qu'elle a suivi en émergeant de plain pied dans une brigade des stups pour mineurs. Le film rend bien compte de cette vie complexe des policiers tout en s'intéressant à leur existence intime entre tragédie et humour comme pour conjurer le mauvais sort. D'aucuns qualifieraient son film de docu-fiction pour le degré accru de réalisme qui s'en dégage et rend son long-métrage encore plus touchant, car mettant en exergue la vérité des banlieues notamment à Belleville d'où son héroïne est originaire. Un choix lié à sa propre enfance, elle qui ne s'est jamais sentie proche de ses parents, avoue-t-elle. Le prix d'interprétation masculine a été décerné unanimement au fameux Brice the Nice, alias Jean Dujardin dans l'excellent film muet en noir et blanc The Artist, réalisé par Michel Hazanavicius. Que d'émotion, une démarche de génie que le réalisateur a su exploiter pour révolutionner le cinéma d'aujourd'hui tout en piochant dans le passé. Le prix d'interprétation féminine est revenu à la belle «Juliette», Kirsten Dunset, dans le sombre et poétique Melancholia réalisé par Lars van Trier. Le prix du scénario a primé le Turc Joseph Cedar pour The Arat Shulayim (Footnote). Un film salué par la critique, qui remet au-devant la scène le septième art turc, un peu déclassé par les feuilletons qui connaissent un succès fulgurant en Turquie.Ainsi, celui par qui le scandale est arrivé cette année au Festival de Cannes, le réalisateur danois, Lars van Trier repart bredouille. Doublement. Il s'est fait carrément chasser du festival suite à ses propos humoristiques tenus lors de la conférence de presse, autour de son film Melancholia. Qualifié de «persona non grata» par les organisateurs du festival après qu'il eut déclaré sa «sympathie pour Hitler». Son propos décevra même le jury qui souhaitera lors de la conférence de presse d'usage après chaque clôture, ne plus voir se reproduire ce genre de situation, tout en affirmant que ces mots n'ont eu aucune incidence sur le choix des prix qui s'adressent d'abord au film et distinguent leur qualité. Malgré ses excuses, Lars van Trier sera poussé à la porte de sortie du festival. Le cinéma africain en sort également bredouille, puisque aucun prix n'a été attribué au film du Sud-Africain Olivier Hermanus, Skoonheid (Beauty), non plus pour Et maintenant, on va où ? de la Libanaise Nadine Labaki. Un film qui se veut une véritable ode au dialogue interculturel et des religions. Rien non plus aux comédiennes du film la Source des femmes dont Beyouna et la Française d'origine algérienne Leïla Bakhti.Le festival a eu le mérite toutefois d'honorer deux pays au niveau de la Quinzaine des réalisateurs, la Tunisie et l'Egypte, printemps arabe oblige, en attendant la révolution cinématographique qui tarde à se faire, surtout en Algérie. Les cinéastes algériens ont, en effet, brillé par leur absence cette année.