Des représentants du mouvement associatif national ont appelé, hier à Alger, à la nécessité d'associer les acteurs concernés dans l'élaboration de la nouvelle loi sur les associations annoncée entre autres réformes par le président de la République, le 15 avril dernier dans son discours à la nation. Ils réclament, également, une plus large participation dans les discussions en cours sur ces réformes. Invitée du centre de presse du quotidien El Moudjahid, à l'occasion d'une table ronde sous le thème «la place, la mission et le rôle de la société civile dans le processus démocratique», Mme Saïda Benhabylès, ancienne ministre de la Solidarité, aujourd'hui présidente de l'association de solidarité avec la femme rurale, a indiqué qu'en Algérie «la loi sur les associations n'est même pas respectée», avant de s'interroger sur la relation partis politiques/associations citoyennes. A ce titre, l'oratrice a dénoncé ce qu'elle qualifie de «diktat» exercé par les partis politiques sur le mouvement associatif dans notre pays. Un diktat qui n'est pas sans conséquence sur la société, selon elle. «Le diktat et la mainmise des partis politiques sur les associations constituent un danger pour la société civile», a-t-elle indiqué se demandant par là même d'où proviennent les financements de certaines associations. «Il y a certaines (associations) qui sont financées à partir de fonds dont on ignore l'origine», a indiqué l'ex ministre qui ne voit pas d'un bon œil l'«immixtion» des partis politiques dans le mouvement associatif. «Au cours des années 1990, ce ne sont pourtant pas eux (les partis politiques) qui avaient pris les armes pour combattre le terrorisme qui menaçait les fondements même de la République», a-t-elle martelé. Et d'enchaîner : «Les partis politiques sont en train de cueillir, aujourd'hui, les fruits du combat citoyen !». Toutefois, elle concédera qu'il y a davantage d'associations qui se prêtent d'allégeance à des partis politiques plutôt que d'écouter les doléances des citoyens. «Nous ne voulons plus continuer à jouer les comités de fêtes des partis politiques qui ne font appel à nous qu'à l'occasion des échéances électorales», a prévenu l'hôte d'El Moudjahid.Tout en s'interrogeant sur le sens véritable de ce qui est appelé «mouvement associatif», Mme Benhabylès a souligné que le rôle premier des associations est d'être «l'écho des citoyens sans voix et non pas d'être sous l'égide d'un parti politique». «Cessez de nous prendre pour des enseignes vis-à-vis de l'étranger», a-t-elle prévenu, ajoutant que le mouvement associatif national, ou ce qui en fait figure «est instrumentalisé à des fins politiciennes par les partis politiques mais aussi à des fins de consommation internationale par le pouvoir», a accusé Mme Benhabylès. «On ne nous prend pas au sérieux !», déplore-t-elle. Elle s'est, en outre, interrogée sur les critères qui président au choix des interlocuteurs de Abdelkader Bensalah et ses deux collaborateurs, désignés par M. Bouteflika pour conduire les consultations sur les réformes annoncées.Sur le même chapitre des réformes, le président de l'Association du 8 mai 1945, Boukherissa Kheireddine, n'y est pas allé par quatre chemins en assimilant les réformes annoncées par le chef de l'Etat à un «aveu d'échec». «Les réformes annoncées récemment sont superficielles. Tant qu'on n'a pas touché le fond, c'est-à-dire l'Algérie profonde, on n'ira nulle part. De plus, elles interviennent au bout de trois mandats ce qui signifie qu'elles sous-entendent un aveu d'échec», a-t-il estimé.«La société civile se cherche en Algérie alors que dans les moments les plus difficiles qu'a traversés le pays, elle a toujours été aux avant-gardes», relèvent les participants. Un intervenant a mis en exergue le «fossé» qui sépare les hautes autorités du simple citoyen. «Nous avons tiré la sonnette d'alarme depuis 2006 et 2007, mais malheureusement on ne nous a pas pris au sérieux», a indiqué le président d'une association de jeunes. Ce dernier a appelé à l'ouverture d'un dialogue «ambitieux» à travers des Assises nationales pour débattre des «maux» de la société civile, assises dans lesquelles «le mouvement associatif doit impérativement être partie prenante». Y. D.