Photo :S. Zoheir Par Amel Bouakba Ceux qui se réjouissaient à l'idée de voir la célèbre décharge de Oued Smar se transformer en espace vert et jardins publics doivent encore attendre. La concrétisation de ce projet n'est pas pour demain. La décharge de Oued Smar, à l'est d'Alger, dont la fermeture a été annoncée depuis cinq ans, continue d'accumuler des tonnes de déchets. Le projet portant réaménagement de cette décharge en espaces verts a tout l'air d'être renvoyé aux calendes grecques.Sur place, les camions appartenant aux APC continuent de déverser des tonnes d'ordures ménagères issues des différents coins de la capitale et des déchets hospitaliers provenant de diverses structures hospitalières, sans aucun souci écologique ou sanitaire, sans aucune précaution. A tel point que l'entassement des ordures est devenu non seulement catastrophique, mais tout à fait ingérable. «Les pouvoirs publics ont, certes, annoncé que cette décharge allait être transformée en parc mais pour l'heure, elle est toujours fonctionnelle», assure un agent du bureau d'études chargé du projet. Source de pollution, véritable danger pour les populations riveraines, la décharge de Oued Smar, qui est arrivée à saturation, génère toutes sortes de désagréments (poussières, odeurs et émanations toxiques) et enlaidit de la capitale. Les populations riveraines subissent les effets de cette pollution et les odeurs nauséabondes qui se dégagent de ces amas de déchets. «Cette décharge qui existe depuis la fin des années 1970 et qui s'étend sur des dizaines d'hectares nous pourrit la vie», avouent, désabusés, des riverains qui espéraient que le projet annoncé tambour battant par les pouvoirs publics, depuis quelques années, allait enfin les délivrer de cette montagne d'ordures. Mais ils ont vite déchanté.En 2006, le ministère de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement avait fait part d'un projet visant à transformer le site de la décharge publique d'Oued Smar en un parc public. Les travaux de réaménagement de cette gigantesque poubelle à ciel ouvert située au cœur de la capitale devaient être réalisés par la société System Yapi Turquie pour plus de 6,4 milliards de dinars (65 millions d'euros). Mais à ce jour, le projet traîne encore.Pourtant, les appels des experts en environnement et en santé se multiplient pour la fermeture de cette décharge, devenue un véritable problème environnemental et de santé publique. Au niveau de ces décharges, les déchets sont stockés en grande quantité dans des conditions telles que pratiquement chaque décharge entraîne une véritable catastrophe écologique par le biais des eaux de lixiviation qui s'en échappent ou parce que le feu couve souvent en profondeur dans ces déchets, par le biais des gaz de combustion chargés de dioxines, de PCB, de vapeurs de mercure, etc. qui sont rejetés dans l'atmosphère et qui empoisonnent l'air. Mais les pouvoirs publics semblent avoir du mal à trouver une alternative à Oued Smar. Depuis quelques années, les centres d'enfouissement technique (CET) étaient donnés comme alternative aux décharges publiques. On en parlait comme d'une solution de rechange. Plus écologiques, elles devaient remplacer ces réceptacles d'ordures qui sont à l'origine de véritables catastrophes écologiques. Mais à Alger, seul le centre d'enfouissement technique de Ouled Fayet semble réellement fonctionner. Quatre autres CET devaient voir le jour à Alger, notamment à Staouéli, Corso, Réghaïa et à El Hamiz, mais ils ne sont toujours pas opérationnels. Dans la capitale, le principal obstacle qui se pose à la réalisation de CET réside dans l'identification de sites appropriés. Alger ne parvient plus à se débarrasser de ses déchets en raison d'un manque de lieux pour les déposer. Toujours est-il, les pouvoirs publics sont appelés à faire preuve de bon sens pour résoudre le problème de la gestion des ordures ménagères, notamment à l'approche de l'été, période durant laquelle les vers et les insectes porteurs de nombreuses maladies se développent plus facilement. L'accumulation des ordures entraîne la prolifération des rats, des moustiques et d'autres insectes qui contaminent ensuite la nourriture. Les mouches peuvent laisser plus de 2 millions d'œufs dans une maison pendant l'été. A l'approche des grandes chaleurs, des tonnes d'ordures envahissent les rues de la capitale, et les services de Net Com, une entreprise publique d'hygiène, semblent avoir du mal à régler ce sempiternel problème. La situation est inquiétante. Les décharges sauvages prolifèrent un peu partout. Au niveau de la place des Martyrs, les rues sont jonchées, parfois obstruées de déchets, répandant une odeur pestilentielle due à la décomposition des ordures provoquée par la forte chaleur de l'été. Au niveau des marchés, les vendeurs de marchandises diverses laissent sur place les résidus de leur commerce qui empestent l'environnement. La situation n'est guère meilleure aux alentours des quartiers populaires. Bien que la gestion des déchets ménagers soit une affaire des collectivités locales, celles-ci semblent, dans la majorité des cas, défaillantes. Au niveau de certains quartiers, les habitants tentent, tant bien que mal, de déclarer la guerre à la propagation des immondices. C'est le cas à la cité CNS, à Chevalley, où les locataires organisent des campagnes de nettoyage régulières. Mais le manque d'implication de l'APC, ici comme ailleurs, reste déplorable. De leurs côtés, les responsables de Net Com évoquent le manque de civisme du citoyen et insistent sur le respect des heures de ramassage d'ordures et des points de chute des détritus. Sans parler des sachets en plastique qui font partie du désolant décor. La situation est d'autant plus préoccupante que les températures commencent déjà à monter, rendant l'odeur insupportable dans certaines rues et présentant potentiellement des risques pour la santé. Pour rappel, au début des années 2000, l'Algérie avait annoncé un programme ambitieux de gestion des déchets, notamment le fameux Plan national de gestion des déchets solides ménagers (Progdem), où il était question de l'installation d'une centaine de centres d'enfouissement technique, de la réhabilitation des décharges sauvages, la mise en place d'incinérateurs notamment au niveau des hôpitaux. Mais aujourd'hui, seulement près d'une vingtaine de CET sont exploitables. Quant aux incinérateurs, la majeure partie des hôpitaux n'en disposent pas et déversent leurs déchets directement dans les décharges. Une question se pose aussi : où est passée la police de l'environnement ?