Le sport le plus populaire dans le monde est géré par une institution fermée. L'élection présidentielle d'hier a confirmé que la FIFA peut allègrement disputer la première place des instances les plus minées par la corruption. Le Suisse Blatter peut encore régner sur la planète football. Les observateurs ont ainsi remarqué, à travers les péripéties de cette élection, que le jeu de la Fifa est loin d'être propre. Il est très édifiant de constater que la réélection de M. Blatter, celle du quatrième mandat comme celle du troisième en 2007, s'est faite sans le moindre concurrent, une sorte de présidence à vie à la tête de l'ONU du football. La dictature de Blatter ne laisse ainsi aucune place à une rivalité. L'opposition, montée autour de la candidature de Bin Hammam, n'a pas vécu plus que la durée de la campagne. Cette campagne, ouverte au départ, a été étrangement achevée par une élection fermée.Il ne faut pas perdre de vue cependant qu'une élection-plébiscite n'est pas un fait nouveau dans les scrutins de la Fifa. La nouveauté, la vraie, réside en revanche, dans cette masse d'informations servies ad nauseam, dans l'objectif de disqualifier Bin Hammam. Sans l'afficher clairement, faute de preuves, il a été reproché au qatari «d'acheter» l'organisation du mondial 2022. La commission d'éthique de la Fifa a, dans une célérité déconcertante, pris la décision de suspendre le président de la Confédération asiatique à cause d'une affaire de fraude électorale présumée liée au scrutin de la Fifa. Ce qui l'a empêché de mesurer son poids dans une instance en pleine tourmente. Au royaume de la Fifa, des soupçons de corruption suffisent pour prendre des sanctions. Curieusement, des preuves de corruption n'empêchent pas des réélections sans fin. Et les deux schémas profitent à une seule personne, M. Blatter en l'occurrence. Pourtant, ce dernier reconnait, de manière claire, qu'il a fait perdre à la Fifa sa crédibilité auprès du monde du football. Ne pouvant plus masquer son sinistre bilan moral, M. Blatter a déclaré, à quelques heures de son plébiscite : «Nous savons tous que le bateau de la Fifa est dans des eaux mouvementées…»M. Blatter fait preuve de pertinence en soutenant que l'attribution des Mondiaux 2018 et 2022 a déclenché une vague d'accusations contre la Fifa. C'est sur la base de ce constat qu'il propose un nouveau mode d'attribution de la coupe du monde. Il plaide, dans ses réformes, pour une attribution votée par le Congrès (208 membres) au lieu du Comité exécutif (24membres). La mémoire du foot dit cependant que la corruption au sein de la Fifa n'a pas commencé le 2 décembre 2010, elle est bien plus ancienne. Le livre Carton rouge : les dessous troublants de la Fifa, d'Andrew Jennings, édité en 2006, fait encore foi. Score d'espoir : les jeux de coulisses par et autour de M. Blatter n'empêchent pas le football, version Messi, de s'exprimer et d'offrir spectacle et plaisir à des millions de gens. A. Y.